1704. eUK' Ainfi , quoi .qu’apimez d’une
¿ni, ambition demçfurée, i'Is.fe donnent
billement.
la difcipli ne . en préfenee du, peu pie,
ils s ’abaiffejxt pour s’élev-ér, 8c font
femblant de méprifer ce qu’ils fou-
haitent avec .le plus d’ardeur -, de for-
te qu’on diroit qu’ils n’afpirent qu’à
la fehç-jté,du Paradis^ Ils attirent
chez. eux.-un grand nombre .de jeunes
gens poat leur en apprendre les
v.oyes , 8c afin de donner une idée
avantageiiferduzele qui les anime,
ils traitent, cette jeuneffe ftupide,
avec une modération & une patience
toute particulière , fans jamais
s’emporter 5, avec peu de paroles, accompagnées
d’un air de fageife 8c
, de faintetè dont on eft charmé.
Leur ha--Leurs habits font blancs, 8c de poil
de, chameau ou de chcvre, & ils portent
un grand turban , qui les fait
paroître maigres 8c défaits. Lors
qu’ils fortent, ils affectent une grande
fimplické, 8c ne fe font accompagner
que d’unieul valet, qui porte
un liyre; » allant à petits .pas- les
yeux fixés’ en terre. Ils-fréquentent
beaucoup les mofquées, .où ils font
de longues prières avec uni zele affecté
j Se fe .retirent enfuite dans un
Coin , où ils s’exercent à inftruire
les enfans, outre qu’ils fantfouvent
des oraifons au peuple. C ’eft par
cet artifice qu’ils s’attirent l’affection
8c le refpeétdu peuple, Sc qu’ils
fe font craindre au Roi même, qui
n’aferoit rien changer au fervice divin,
de crainte de s’attirer l’indignation
de ces têtes facrées. I l s’en
trouve plufieurs exemples, 8c on ne
fauroit donner une preuve plus évidente
de la confideration qu’on a
pour eux , que le privilège qu’ils
ont de s’affepir à côté du Roi , à
une petite diftance, dans les affem-
blées Royales.
Gens . La maniçre de vivre de la Cour
d épée, g;- ¿g nobleffe eft fort différente
d:e la leur. Les courtifans affectent
une civilité toute particulière , 8c
■ ; une franchife engageante, mais leur
langue s’accorde rarement avec le
Leur"dif-coeur. Ils - s’abandonnent entiere-
ment à la fenfualité 8c aux plaifirs.
Leurs habits 8c leurs équipages font I
magnifiques, 8c ils aiment l’argent)
à un tel point, qu’on ne peut rien j.~6 , ,
'obtenir d’eux qu’en leur faifantdes If Mai."’-
préfens. Au refte ils font fort affa-
bles. Sc paroiffent fort honnêtes:
mais ils font rampans envers ceux
dont ils . attendent quelque chofe,
8c haïffent mortellement ceux qui
les traverfent ou afpirent à ce qu’ils
fouhaitent ; lefquels ils traitent avec
une dureté qui ne tient rien de la
nature humaine , lors qu’ils ont quel-
qu’avantage fur eux. Ils ne négligent
aucune occafion de leur nuire,
8c ont l’art de donner une idée def- -
avantageufe de ce qu’il y a de plus
recommandable en eux. 'En un mot
ils n’ont point de repos qu’ils ne les
aient ruinez;. Au contraire ils flat-
: tent avec exces ceux qui font favo-
! rifez de la fortune, 8c dans les grands
emplois , Sc leur attribuent toutes
les perfections dont ils peuvent s’a-
vifer : mais auiïï , ne font-ils pas
plûtôt tombez dans la difgrace,
qu’ils infultent à leur, malheur , 8c
chargent d’oprobres ceux qu’ils a-
voient élevez jufques.aux nues,pendant
qu’ils étoient dans la faveur.
Il arrive même fouvent en ce cas,
que ceux qui leur ont le; plus d’obligation
font les premiers aies déchirer.
La maniéré d’agir des gens de let-G«is *
très, ou de plumé j comme on leslcttr“ ‘. ’o
nomme en ce pais-là, eft à peu près
femblable. Ils font orgueilleux 8c
fuffifans, etivieux Sc jaloux du mérité
des autres, faifant bonne mine,
& mille careffes à ceux qu’ils" haïffent
le plus, lors, qu’ils les rencontrent
, & les déchirent impitoyablement
auffi-tôt qu’ils ont le dos
tourné. La diiEmulation eft leur Leu r dif-
vice favori , 8c leur vanité s’étend{™nula‘
jufques à fe louer eux-mêmes à-tous
propos,. 8c à faire , fans fcrupule,
l’éloge de leur propre mérité. Cependant
ils font religieux en apparence,
■& affeâent de faire paroître
un grand dégoût- des vanitez
mondaines, ne parlant que de la félicité
du Paradis pendant qu’ils .s’abandonnent
en fecret aux vices les
plus énormes ,8c mêmeles plus contraires
à la nature. Au refte ils haïffent
mortellement les Chrétiens de
VEu-
D E C O R N E l L
Europe, & tous ceux qui différent
| Mah de leur croyance : aufîi ni y auroit-
il aucune fureté pour eux, fi le droit
des gens ne tenoit fes Infidèles en
bride.
L’ufure regne plus en cepaïs-là,
qu’en lieu du monde, bien qu’il s’y
trouve d’honnêtes gens comme par
tout ailleurs. Mais on peut dire en
général' que les Pe.rjans font natu- j , 0 .
Tellement ingrats-, 6c qu’ils n’ont Mai.
ni honte ni modeftie.
La Perfe. éà compoféa de trois Etat de
ordres , comme les: Etats de l’Eu- p?rfc-
rope. Le premier comprend la Nobleffe
ou les gens d’épée:;.le fécond,
,les gens dé. robe.5 8c le, troifième,
les Marchands 8c les Artifans.-
C h a p i t r e XLII.
Enterrement des Rois de Perfe. Qualitez du Rot régnant.
. portrait. Habillement des Periès.
Son
ON ne publie jamais en Perfe
la mort du R o i, qu’après a-
voir placé fon fucceffeurfur le trône.
Cependant le R,oi Sulemoen,1
pere du R.oi qui regne aujourd’hui,
n’eut pas plûtôt rendu l’efprit que
la nouvelle s’en repandit de tous
côtés par l’indifcretion de fon pre-
Mort du mier Médecin. Ce Prince mourut
Roi, . le 2 9 . Juillet 1 6 9 4 , à l’âge de 4 8 .
ans, après en avoir régné 2 9 . Les
officiers de la Couronne, 8c les principaux
Seigneurs du Royaume, fe
faifirent immédiatement du Palais,
& mirent bon ordre de tous côtez.
Les habitans.fermèrent leurs mai-
fons 8c leurs boutiques, 8c il ne parut
aucunes perfonnes de confidera-
S o n en - ri°n dans les rues. Le premier jour
d’Août, le corps de fa Majefté fut
pofé fur un chariot, couvert d’un
poêle de drap d’or des plus riches,
8c tranfportéàune chapelle, qui eft
à une lieue d’Ifpahan, d’où il fut
conduit à Com , pour y être inhumé
dans le fépulchre des Rois fes
peres. Tous les grands du Royaume
le fui virent à pied, à la referve
d’un des officiers de la Couronne,
nommé Mierfa Taher , 8c d’un Ec-
clefiaftique de diftinction, auxquels
on permit d’aller à cheval,à caufe
de leur grand âge. Ces Seigneurs
étoient fui vis des gens, de robe ou
de plume , pleurant 8c chantant, 8c
ceux-ci d’un grand nombre de fol-
dats, qui accompagnèrent le corps
terreni
ent.
jufques à cette chapelle , avec des
flambeaux fumans fans être alumez.
Lors qu’on y fut arrivé , ceux qui
avpient affifté à cette pompe funèbre
déchirèrent leurs vêtemens, 8c
s’en retournèrent à la ville,laiffant
à leur place, de leurs parens ou de
leurs amis pour fuivre le corps pendant
la nuit. On ne manqua pas
auffi de doubler les gardes du Palais,
pour prévenir lesdefordresqui
font à craindre en ces occafions-là,
dans une ville fi peuplée 8c fi remplie
d’étrangers. Cependant lesofficiers
de la Couronne donnèrent ordre aux
Aftrologues, félon la coutume, de
choifir un moment favorable, &de
bonne augure , pour le couronnement
du nouveau R o i, perfuadez,
qu’en ce cas, ce Prince n’entrepren-
I droit rien à leur préjudice, fur tout
au commencement de fon regne.
On n’entendit pendant tout ce tems-
là ni tambours ni trompettes, ni aucun
fon qui pût interrompre la fo-
lemnité du deuil 8c de cette aftion,
qui dura jufques au 6. Août, que
les Aftrologues déclarèrent unanimement,
qu’ils avoient trouvé cet
heureux inftant. On ne manqua Conron-
pas d’en profiter pour couronner le nement
fils aîné du Roi défunt, qu’on avoit
tiré du ferrail immédiatement après
la mort de ce Prince,pour l’enfermer
dans un autreappartement; où
il refta jufques au moment qu’on le
mît fur le trône, où tous les grands
D d 3 de