1704, ü Y avoit en tout plus de ioo.mil-
15. Aral, le perfonnes tant à pied qu’à cheval
, outre ceux qui s’étoient placés
fur le haut des maifons. Je fus le
feul European qui s’y trouva habillé
à la maniéré de notre pais. Auf-
fi-tôt que le Roi parut, on fit é-
carter la foule à grands coups de
bâton, de forte que plufieurs tombèrent
dans l’eau avec leurs chevaux}
d’autres furent accablés de
coups, 8c moi je me retirai fort
fatigué. Cependant tout fut fait
plus d’une heure avant midi, non-
obftant qu’on eut traverfé la ville
en ceremonieen s’en retournant. On
avoit auill fait promener ce chameau
, de même, par toutes les
rués, dix jours de fuite avant celui
du facrifice, couvert d’épines 8c de
chofes pareilles , 8c précédé d’une
lance, d’une hache, & de plufieurs
inft rumens.
A b on - On égorge & on mange ce jour-
dancc de là, plus de 50. mille moutons à 1s-
é“ pahan, 8c ceux qui ont le bonheur
d’attraper un morceau du chameau,
ne manquent pas de le faire bouillir
avec leur mouton. D’autres en
font une relique qu’ils confervent
toute l’année. Au rèfte, ilefttrës-
certain qu’on confomme tous les
jours de l’année-io. à 12. mille moutons
8c chevreaux en cette ville, 8c
que tout le monde eût obligé d’en
manger ce jour-là. J ’en rencontrai
une fi prodigieufc quantité quelques
jours auparavant, que j ’eus
bien de la peine à m’en deba-raiïer:
On y mange aufli un nombre inconcevable
d’agneaux5 de 20, 25 J:
£30. jours. Cela commence au mois
de Novembre, 8e dure jufques à
ceux d'Avril 8c de Mai} fur tout
parmi les perfonnes die confidera-
tion. Le prix de ces agneaux, eft
ordinairement de 7 , 8 , à 9. Mo-
roedjes , dont il en faut fept pour
faire un écu: de notre monnoye. Ces
agneaux-' pefent environ, 6, 8c jufques
a ri':-livres-.- ûC’éft une des
pins grândèsedélicateifes de la Per-
fe , 8c fur tout parmi les gens de condition
, qui ne mangent jamais de
beuf , qti’on laifife aux pauvres ,
aufli-bien- que lé bufle , qui fe
vend publiquement. - i7°4-
Quelques jours après cette fête, 13. Avrit
le Roi alla à la'campagne avec fes
concubines, Sc fe divertit à voir paf- c am p a -
fer à la nage quelques élephans, au f"sec“vncc
travers d’une riviere, que les pluies cubines.
avoient fait enfler extraordinairement.
Le vingt-troifieme, on célébra la Fête
fête d’Aidikadier , jour auquel lesi^!^
Perfes prétendent que Mahomet déclara
au peuple, qu’A/z devoit être
fon fuccefleur, 8c leur ordonna de
le reconnoître en cette qualité. Ils
difent que cela fe fit dans. l’Arabie
heureufe, proche du villa'ge de Shom-
kadier, d’où.ils dérivent le nom de
cette fête, qu’il n’y a que les Perfes
qui celebrent. Les autres Mahomet
ans n’en veulent pas entendre
parler. -
Les arbres commencèrent à pouffer
en ce tems-là , Sc le mois finit
par de grandes pluies, qui endommagèrent
plufieurs maifons, 8c en
renverférent d’autres. On ne doit
pas s’en étonner, la maçonnerie de
ce païs-là étant comme une éponge}
8c les maifons plat tes par le
haut, de forte qu’il eft impofitble
de les tenir féches- lors qu’il pleut.
Le tems fe mit au beau, à l’entrée
du mois de Mai. J’allai à là
campagne avec Moniteur Kaflelein.,
à deffein- de fuivre 'le cours de la riviere
} mais nôus la troùvâmês- tellement
débordée-par les pluies qui
avoient régné depuis un certain
tems, que nous fûmes' obligez de
traverferles terres, par un chemin
qui nous- eondu-ifit en deux heures
de teins à une niaifon de plaifancè
nommée Goès-jeron, fur la ri viere de A n c i e n n e
Zènderoey à-l’eft dé la ville. Elle a “cap°a°.
un- grand jardin rempli de' Sené 8ç fine*
d’arbres fruitiers-} où- plufieurs cri- y« é
voyez de la- Compagnie des Indes,
fe font arrêtez à leur arrivée, 8c à
leur départ d? Isp ah an. Gëtte mair
fon a plufieurs appartemens, dont
une partie commence à tomber
en ruines, 8c les environs en font
très-agréables. On trouve dans ce
Jardin quatre grands arbres defené,
à pne petite diftance, lfefquels couvrent
une gloriette, où- l’on monte
J ’ïpA'f',.
1703
s. Mai.
par quelques marches, Ils font,
courts 8c gros de tige, 8c il y en a
deux quiont 16. piedsdetour. On
les eftime fort anciens, jufques là,
qu’on prétend que Tamerlan fe repo-
fa autrefois à l’ombre de leur feuillage.
r} v v ' -jÿ !
N ous nous étion s flattez d.y trouver
du gibier, mais la pluie qui
furvint tout à coup nous obligea de
retourner à J u if a , où nous reliâmes
jufques au foir. Les jours fui vans
continuèrent variables, & je fus attaqué
de la fievre, dont je n’eiij
que quelques accès, qui ne laifle-
rent pas de m’affoiblir de maniéré,
que je m’en fentis jufqu’à la fin du
B « S
i . M a i .
Defcription i ’Ifpahan, & de ce qü ily a déplus remarquable
en cette ville-, & aux environs.
Jiuëfciâ T Spahan eft uiie ville de très-gran-
J l de étendue en comptant fesfaux-
bouigSi Cependant elle ne paroit
pas beaucoup par dehors., foit à
l ’égard des mofquées, des tours ou
des grands bâtimens, parce que les
arbres’, dont elle eft entourée, la
¿ouvrent ën été. Par cette raifoii
j’attendis l’hyver pour en faire lé
Plan, 8c nonobftant cette précaution
je ne pus le faire qu’allez imparfaitement
à caufe des palmiers,
des pins , des fenés 8c des cyprès qui
s’y trouvent, qui font toujours verts,