
jeunesse dans la dissolution, peut-il être appelé continent et modéré
parce que les désirs l’ont abandonné 1 ? Ce sont donc précisément les
mauvais penchans que plusieurs personnes croient incompatibles avec la
gloire de Dieu, avec la noblesse de l’homme et le bien de la société, qui
donnent à l’homme la possibilité d’être vicieux ou vertueux ; ce n’est que
par là que les actions peuvent avoir du mérite ou du démérite; et quiconque
veut éteindre dans l’homme la croyance à des inclinations perverses,
éteindra aussi en lui la crainte des peines et l’espérance des
récompenses futures.
Résumé.
Nous avons prouvé que, de tous temps, les opinions les plus contraires
ont été tour a tour anathématisées et divinisées; qu’en conséquence, lorsque
1 on fait des découvertes, on doit moins s’inquiéter du jugement de
Ses contemporains que de la vérité; — que l’évangile, les apôtres, les pères
de 1 église, et en général les hommes qui ont le mieux connu leurs semblables
, et ceux qui les ont le plus aimés et leur ont fait le plus de bien,
ont reconnu que les qualités de l’esprit et del’ame sont innées, et que leur
manifestation dépend de conditions matérielles; — que ceux qui accusent
notre doctrine de matérialisme, confondent les conditions matérielles
avec les forces ou les facultés, et tombent par là dans des contradictions
perpétuelles ; que la supposition d’un point central que l’on croyoit
devoir consacrer pour mettre à l’abri la nature spirituelle de l’aine,
n atteint pas a ce but, et contredit la structure du cerveau et ses fonctions
; que même nos adversaires à qui il semble que la pluralité des
Quidam in juventute luxuriose viventes, in senectute continentes fieri
delectantur et tune eligunt servire castitati, quando libido eos servos habere
contempsit. Nequaquam in senectute continentes vocandi sunt qui in juventute
luxuriose vixerunt; taies non habent proemium, quia laborîs certamen non
habuerunt ; eos enim exspectat gloria, in quibus fuerunt gloriosa certamina.
Isidor. de summo bono , lib. I , c. 51.
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organes favorise le matérialisme, sont forcés de reconnoître cette pluralité,
parce que le cerveau est double, et que, par conséquent, chacune
de ses parties l’est aussi ; — que ceux qui regardent comme dangereuse
la division des facultés de l’ame en plusieurs facultés fondamentales, ont
de tous temps, adopté des divisions semblables, puisqu’ils ont admis les
facultés de juger, de vouloir, de se souvenir, d’imaginer, etc.;_que,
par conséquent, on ne peut, sous aucun rapport, flétrir notre doctrine
plutôt qu’unè autre, de l’accusation de matérialisme.
Quant au fatalisme et à la liberté morale, nous avons également prouvé
que les hommes les plus vénérables ont reconnu l’influence la plus puissante
de plusieurs causes sur nos déterminations; — que les sensations,
les penchans, les désirs, ainsi que les idées et les jugemens de l’homme,
sont soumis à des lois déterminées; mais que l’on ne peut induire de là ni
le fatalisme qui fait naître le monde du hasard, ou qui n’en donne pas la
direction a une intelligence suprême , ni cet autre fatalisme qui asservit les
actions de l’homme a une nécessité aveugle : — qu’une liberté illimitée et
une liberté absolue répugnent à la nature d’un être créé, mais que l’homme
raisonnable, en vertu des dispositions dont le nombre et la noblesse l’élèvent
au-dessus des brutes , a acquis la faculté de fixer son attention, non-
seulement sur les impulsions du dedans et du dehors, mais encore sur
des motifs plus nobles qu’il puise dans son intérieur ou qu’il reçoit de
l’extérieur, et de pouvoir par là ou être déterminé par les motifs exis-
tans, ou se déterminer par des motifs nouveaux que l’homme bien
organisé peut appeler continuellement à son secours ; — que cette faculté
constitue la véritable liberté morale, et que cette liberté pratique est la
seule que supposent les institutions civiles, l’éducation, la morale et la
religion; — que celte liberté soumise à ses propres lois, telles que l’influence
puissante des motifs les plus nombreux et les plus forts, et surtout
du désir du bonheur, rend l’homme qui agit et ses instituteurs, responsables
de toutes leurs actions morales; — que c’est sur cette notion de la
liberté que reposent la dignité et la nécessité de l’éducation, de la morale,
de la législation, des peines, des récompenses et de la religion. I! suit
ainsi de notre doctrine que toutes les fois qu’un homme sain et bien orga