
de la faculté, aucun organe ne puisse naître ni exister. Les hommes et les
animaux apportent, en venant au monde, tons les organes des fonctions
des sens, et même les organes intérieurs que M. Ackermann suppose, tels
que l’organe de la volonté, de la comparaison, de l’abstraction. Il lui sera
difficile de l'évoquer en doute que nous naissons avec lés yeux et leurs nerfs,
avec la langue,le nez, les oreilles, les mains et avec les nerfs de toutes
ces parties, avec le grand ganglion cérébral appelé jusqu’ici couches optiques
, enfin avec les deux hémisphères du cerveau. Ces parties sont donc
nées et existent avant tout exercice, avant toute manifestation de faculté;
et quoique tant d’animaux restent sourds et aveugles pendant plusieurs
jours, et que les enfans nouveaux nés ne puissent encore ni comparer,
ni abstraire, toutes leurs parties tendent cependant peu-à-peu à leur
perfectionnement, et deviennent par degrés capables d’exercer leurs
fonctions. On ne sait, au reste, comment répondre à la métaphysique
de M. le professeur Ackermann. 11 s’ensuivroit, en prenant ses opinions
à la lettre, que l’atrophie même des organes est impossible; car s’il est
vrai, comme il le répète si souvent, que l’existence de l’organe coïncide
nécessairement avec la manifestation de la faculté, il doit en résulter que
les organes, tant qu’ils ne sont pas détruits violemment par la mort,
s’exercent continuellement, et conservent par - là leur existence et leur
intégrité.
Objection.
« §. 78. La belle hypothèse par laquelle le docteur Gall croit, dans
l’exposition de sa doctrine, avoir assuré la liberté de l’homme, s’écroule;
car aussitôt qu’il montre un organe du vol, l’être chez qui il l’observe doit
être un voleur ; et un assassin n’a pas seulement l’organe du meurtre, mais
aussi quiconque a sur son crâne l’organe du meurtre, est un assassin. S’il
dit que l’on peut avoir l’organe du meurtre sans être un assassin 1 je nie
cette proposition , parce qu’aucun organe ne peut exister sans que la
faculté ne se manifeste; s’il objecte que la manifestation de la faculté peut
être arrêtée par d’autres organes et d’autres actions, je dis que, dans ce
cas, l’organe doit aussi s’atrophier, et que par conséquent l’organe du
meurtre doit manquer chez celui qui défait n’est pas assassin.»
« S. 79. Il faut convenir que l’idée d’admettre des organes sans la
présence des facultés qu’ils doivent représenter, est un excellent subterfuge
pour échapper et pour répondre à tous les reproches et à toutes les
objections que 1 on peut faire a 1 organologie. Car si quelqu’un dont on
examinera le crâne, a 1 organe du vol et n’est point cependant un voleur,
on dira que l’organe indique seulement la disposition, et que l’homme,
en ne volant pas, prouve qu’il a eu une bonne éducation qui lui a
donné le moyen de résister à un penchant violent. Si un coquin fieffé
n’a pas l’organe du vol, on se tirera de même très - bien d’affaire, en
démontrant que le respect pour la propriété d’autrui a été tant soit
peu mis de côté par l’action prépondérante des autres organes, mais
que l’on ne peut imputer cet acte à l’organe du vol qui manque entièrement.
»
« §. 80. M. le docteur Gall a un vaste champ ouvert devant lui, il
peut le parcourir avec les gens à vue courte, et mettre leurs objections
à l’écart avec une extrême facilité. Mais il est enchaîné en présence du
véritable observateur de la nature, auquel il ne ressemble que par le
masque. Il faut qu’il avoue que, s’il y ayoit des organes tels que ceux qu’il
imagine, ces organes ne pourroient exister Sans manifestation de facultés-
et que quiconque a l’organe du meurtre, doit être un assassin, de même
que quiconque n’a jamais assassiné, ne peut avoir cet organe. Il faut qu’il
avoue qu’une doctrine semblable, si elle pouvoit subsister, anéantiroit
la liberté de l’homme, et qu’alors la société humaine ne seroit gouvernée
que d’après les lois d’une aveugle nécessité, et non d’après celles de la
raison. Mais heureusement la doctrine des organes du docteur Gall ne
vaut pas mieux que sa logique et que ses observations de la nature
prises en masse. Il est évident qu’il n’y a , et qu’il ne peut y avoir d’organes
pareils à ceux qu’a inventés le docteur Gall ».