
rester fidèle aux principes de son maître : mais à chaque pas, l’évidence des
faits le force d’admettre que l’encéphale est l’organe des facultés intellectuelles,
et que par conséquent, contre l’opinion de M. Pinel, la manie
et la démence ont leur siège dans le cerveau, et nullement dans le bas-
ventre ; malgré cela, il montre partout une singulière disposition à se
déclarer contre notre doctrine sur les fonctions du cerveau , disposition
qui certainement peut seule expliquer les contradictions dans lesquelles
il tombe à chaque page.
Comment M. Esquirol prétend-il prouver l’assertion, que les dé-
rangemens organiques du cerveau n’ont rien de commun avec la manie
et la démence , mais qu’ils ne tiennent qu’à la paralysie et aux convulsions?
Ne voit-on pas souvent des paralysies et des convulsions,
sans que pour cela l’on trouve des dérangemens organiques dans le
cerveau ? N’y a-t-il pas plus de raison de considérer la paralysie et les
convulsions qui viennent se joindre à la manie ou à la démence ,
comme une suite de l’augmentation des dérangemens qui existoient
antérieurement dans le cerveau ? d’autant plus, que ces dérangemens
si nous exceptons les épanchemens subits, ne peuvent naître que peu
à peu, tandis que la paralysie et les convulsions surviennent quelquefois
brusquement. Ailleurs, dérogeant à ses principes, il d it; « Les convulsions
qui surviennent dans quelques cas de folie, loin d’être
critiques, annoncent un épanchement cérébral, qui aggrave le mal
et présage la fin prochaine du malade » Du reste , on trouve tout
aussi souvent ces vices organiques chez des aliénés qui, avant leur mort,
n’avoient éprouvé ni paralysie, ni convulsions. Combien il est difficile
à ceux qui se sont conjurés contre la physiologie du cerveau, de trouver
des armes pour la combattre !
Enfin, si M. Esquirol en effet ne croit pas que le cerveau soit le siège
des qualités morales et des facultés intellectuelles, et par conséquent de
la manie et de la démence, pourquoi mesure-t-il,pourquoidessine-t-i!les
têtes et les crânes des aliénés ? pourquoi espère-t-il arriver par-là, à des
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résultats importons pour la théorie et le traitement des différentes
espèces d’aliénations ?
Il serait bien à désirer que M. Esquirol resserrât dans un aperçu général
ce qu il dit dans son article Folie, sur les causes, le plus souvent morales
, de l’aliénation, et sur les symptômes qui en sont les précurseurs
sur lepassage d’un genre de folie à un autre, et sur le genre de mort des
aliénés. Avec quelle vérité ne s’exprime-t-il pas sur les causes prédisposantes
de la folie !
« Je suis convaincu plus que jamais, dit-il, que les causes existantes
de la toile n agissent brusquement que lorsque les sujets sont fortement
prédisposés. Presque tous les aliénés offraient, avant leur maladie
, quelques altérations dans leurs fonctions, altérations qui
remontoient à plusieurs années, et même à la première enfance la
plupart avoient eu des convulsions , des céphalalgies, des coliques
ou des crampes, de la constipation, des irrégularités menstruelles;
plusieurs etoient doués d’une grande activité des facultés intellectuelles,
et avoient été les jouets de passions véhémentes, impétueux
et colères. D’autres avoient été bizarres dans leurs idées, dans leurs
affections, dans leurs passions; quelques-uns avoient été d’une imagination
désordonnée et incapable d’études suivies; quelques-autres
opiniâtres jusqu’à l’excès, n’avoient pu vivre que dans un cercle
tres-étroit d’idées et d’affections, tandis que plusieurs, sans énergie
morale, avoient été timides, méticuleux, irrésolus 5 indifférens
pour tout. Avec ces dispositions, il ne faut qu’une cause accidentelle
pour que la folie éclate Ê
Il est donc prouvé par les observations même de MM. Pinel et Es-'
quirol, qu il faut reconnoître le cerveau pour le siège des maladies
mentales.
C est une chose bien triste, qu’en écrivant pour des hommes qui devraient
avoir les idées les plus nettes sur les maladies mentales, il faille
commencer par établir quel est le véritable siège de la manie. M. Fodéré,