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IO PHYSIOLOGIE
sont si intimement identifiées , que l’anéantissement de ces propriétés
entraîne nécessairement la dissolution des corps.
Il en est de même de la tendance formatrice r ou de lame plastique
que les anciens admettoient dans le règne végétal. Les lois d’après
lesquelles s’opère la fructification des plantes, d’après lesquelles leur
germe se forme , se développe et acquiert enfin son accroissement
total, leur irritabilité spécifique , leurs rapports particuliers entre
elles et avec les autres êtres, sont des propriétés essentiellement inhérentes
à leur nature. Enlevez ces propriétés, et vous détruirez l’idée
dé l’existence des plantes.
Si de là on passe aux animaux , et que l’on réfléchisse à leurs instincts
et à leurs aptitudes industrielles , il n’est pas moins évident que
ces qualités sont innées ehez eux, et qu’elles dépendent de 1’organi-
sâti.on. La toile de l’araignée , l’enveloppe des larves des insectes, la
fosse conique que creuse le fourmilion dans le sable, la cellule hexagone
de l’abeille , le nid des oiseaux, la cabane du castor, sont des
produits qui tiennent à la nature de ces animaux. Quand l’abeille ,
avant d’aller pour la première fois dans les champs, s’élève en l’air ,
et tourne en rondpour recohnoître laposition dé sa nouvelle demeure,
quand le canard et la tortue, traînant encore des débris de l’oeuf dont
ils viennent de sortir, courent vers l’eau la plus prochaine; quand
l ’oiseau broie le ver avec son bec, quand le singe coupe avec ses
dents la tête du coléoptère, avant de le dévorer, toutes ces actions nous
montrent les résultats des dispositions données à ces animaux, et faute
desquelles ils ne tarderoient pas à disparoître de la surface de la terre.
C’est par la même raison que le hamster amasse des fruits, que le
chien cache la nourriture qu’il a de trop ; que le faucon tue le lièvre
en le frappant sur la nuque ; que l’écureil ouvre la noisette par l’extrémité
pointue , et commence par la base à détacher les écailles du cône
du sapin, afin d'en avoir les semences.
C’est d’après des lois semblables que l’appétit des animaux et de
l ’homme est calculé sur les objets du monde extérieur, et mis en rapport
avec eux par le moyen de leur organisation. Voilà pourquoi,
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aussitôt qu’un animal rencontre la nourriture qui lui est destinée r
son odorat et son goût se déclarent pour elle. Il n’est donc pas surprenant
que la jeune chèvre dont parle Galien, apercevant pour la
première fois un cytise, l’ait mangé avec avidité. Le cochon, par la
même raison, mange avec avidité le premier gland qu’il trouve, et
qu’il nè connoissoit point encore; et l ’abeille, à sa première sortie ,
recherche le saule et le framboisier. La conduite des animaux, dans
ces circonstances, n’exige ni un exercice préalable des sens, ni une
idée innée de l’objet de la nourriture, ni une comparaison ou un choix
entre plusieurs choses, comme le prétendent Darwin1 et d’autres *.
Chacun sait que nous ne pouvons nous faire une idée d’une chose du
monde extérieur qui ne nous est pas encore tombée sous les sens. II
en est ainsi des animaux ; comment auroient-ils une idée claire ou
même confuse de .ce qu’ils n’ont éprouve en aucune manière? Mais de
même qu’un mets, à la première impression, nous plaît ou nous dégoûte
, de même les animaux choisissent ou rejettent les objets du
monde extérieur, d’après les lois de sympathie et d antipathie qui
existent entre leurs sens, leurs organes nourriciers, et ces mêmes objets.
L ’enfant nouvellement ne suce son doigt, et cherche le sein , comme
le jeune chien et le veau cherchent la mamelle; le veau tire et repousse
alternativement la tétine ; le chien presse en trépignant les
mamelles de la chienne; l’enfant,.tout en sommeillant, presse alternativement
de ses deux mains le sein de sa mère. Ces trois etres agissent
ainsi, non parce qu’ils ont calculé que ces mouvemens feront couler
le lait plus abondamment, mais parce que la nature est venue au-
devant de leurs besoins, et a uni intimément à leur organisation 1 art
de ce procédé si bienfaisant pour eux , mais dont ils n ont pas la
conscience.
A la même cause sont dus les sentimens et les mouvemens que nous
avons .coutume de. désigner par le terme d.affection. La .satisfaction et
* Zoonomie , t. I, sect 16.
* Richerand, Phys., quatrième édit., t. II, p. 62.