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Je suis persuadé, du reste, que la cause de beaucoup de maladies
mentales susceptibles d’être guéries, se retrouve dans le bas-ventre,
mais elle ne s’y trouve qu’autant que des maladies des viscères de 1 abdomen
deviennent des causes éloignées de ces maladies ; la cause prochaine
de la manie n’existe et ne peut exister que dans l’encéphale.
Lorsque des vers intestinaux causent une démangeaison dans le nez,
des éternuemens , une toux, la cécité, l ’épilepsie, la manie ; qui osera
soutenir pour cela que le siège de cette démangeaison, de ses eternue-
meus, de cette toux, de cette cécité, de cette épilepsie, est dans les
intestins? De tous temps, les médecins ont expliqué par la sympathie
les symptômes qui naissent dans des parties éloignées du siégé du mal.
Or, y a-t-il des parties entre lesquelles il y ait une sympathie plus marquée
, qu’entre le cerveau et l ’abdomen *?
C’est pour cela que les médecins qui s appliquent au traitement des
maladies mentales, ne devroient jamais perdre de vue la grande influence
que le cerveau exerce sur les viscères de 1 abdomen. Personne
n’ignore combien une contention d’esprit trop long-temps soutenue
affoiblit les forces digestives; que le chagrin donne souvent naissance
à des maladies du foie, etc. Aussi, est-il souvent très-difficile de déterminer
aveG certitude, si cesontles désordres existans dansl abdomen qui ont
réagi sur le cerveau, et en ont troublé les fonctions, ou si c est le cerveau
qui a été la première cause du désordre des fonctions du bas-ventre,
Il est certain que les observations de M. Pinel ne prouvent rien contre
la doctrine que le cerveau est le siège de la manie. Je m adresse maintenant
à son élève qui, comme lui, s’occupe surtout du traitement des
aliénés. C’est trop peu pour M. le docteur Esquirol, que les physiologistes,
dans leur incertitude sur le siège de la manie, ne balancent 1
1 M. Dubuisson dit fort bien : « Dans Ja manie sympathique, tous les desordres
ont leur siège dans quelques-uns des viscères de 1 abdomen, ou dans les
organes de la génération, d’où émanent comme dun foyer dirritation les influences
perturbatrices qui troublent le rhythme naturel des fonctions du cer-
yeau, et déterminent la subversion de l'entendement ». Dissertation sur la
manie, p. 72.
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qu’entre le cerveau et l’abdomen ; il nous apprend que les organes du
mouvement sont le siège du délire, de la fièvre, de la manie, etc.
« Dans le délire fébrile », dit-il, la manie sans fureur, la démence]l’imbécillité,
le délire, semblent ne s’exercer que sur les facultés effectives-
les organes de la mobilité paroissent seuls en être le siège : ces organes
sont dans une excitation continuelle dans la carphologie, la loquacité,
le somnambulisme, la manie' ». Argument qui doit paraître péremptoire
à ceux qui ont découvert la cause de l ’aptitude architectonique
du castor, dans sa queue; de Ja raison de l’homme, dans ses mains ; et
des admirablesiifacultés de l’éléphant dans sa trompe ! Immédiatement
apres, le meme auteur s exprime ainsi::« Le délire est idiopathique
dans l’inflammation aiguë ou chronique des méninges et du cerveau
dans les épanchemens aigus ou chroniques , primitifs ou secondaires,
dans les lésions organiques du crâne, de l’encéphale et de ses membranes.
Les plaies de tête, la méningité, la céphalité, l’hydrocéphale
l’apoplexie, la manie, la démence, la paralysie, l’idiotisme, le crétinisme
, offrent des exemples nombreux de délire idiopathique » \
Plus bas, M. Esquirol parle aussi de causes qui à la vérité existent
dans des parties éloignées, mais qui n’en occasionnent pas moins une
manie sympathique. L ’on trouye donc dans cet auteur les mêmes idées
que je viens de développer plus haut sur un siège immédiat de la manie,
et sur des causes éloignées qui y coopèrent immédiatement.
Mais à la page suivante, il se rétracte en disant :
'« Quant au siège du délire, il nous sera inconnu aussi long-temps
que nous ignorerons le siège de la faculté pensante, et la manière dont
son action se produit au-dehors. L ’ouverture des cadavres n’ayant rien
appris à cet égard, nous n’avons aucune donnée positive sur les conditions
matérielles ou organiques du délire » Q ;
Ailleurs, il dit :
/< Il est des folies qui ne dépendent que de la lésion des forces vitales