2 0 2 P H Y S I O L O G I E
aussi, tombe d’une contradiction dans une autre, en combattant la
doctrine des fonctions du cerveau.
Il entreprend de prouver en même temps que le cerveau n’est ni le
siège des penchans, des instincts et des facultés, ni le siège immédiat
de la manie, qu’il appelle le délire.
„ On ne ponvoit pas se dissimuler, dit-il, que malgré l’étendue
de leur cerveau et sa construction, presqu’en tout point analogue à
celle du cerveau humain, les animaux, et en particulier les manfrni-
fères, ont une sensibilité très-peu développée, qu’ils manquent d’idées
et d’imagination ; qu’ils ont fort peu d’affections morales , que leurs
passions sont toujours bornées aux besoins physiques , et entièrement
subordonnées aux forces du corps, qu’enfin ils sont exempts de cette
maladie connue sous le nom de folie. Donc, ont aussi pondu de tous
les temps les hommes les plus sensés, si le cerveau est un organe qui
sert à l’intelligence même : s’il concourt au phénomène de la folie,
ses maladies, (car celui des bêtes en est également susceptible), ne
sont pas suffisantes pour la produire ; ils ont été fortifiés dans cette conclusion,
par l’absence ou la presque nullité du cerveau chez plusieurs
animaux dont l’instinct est assez vif, et ils ont dit : donc le cerveau
n’est pas même le siège exclusif de l’instinct ». Et dans une note il
ajoute : « Ce qui prouve encore plus que tout le reste que l’énergie
intellectuelle est Loin de coïncider avec une plus grande proportion
de la masse cérébrale, c’est l’observation que tout le monde peut faire
que le volume de la tête prédomine dans les premiers âges de la vie,
quoique ce soit précisément le temps de la plus grande foiblesse de
notre entendement. Les recherches d’anatomie démontrent que la masse
du cerveau, qui forme à la naissance la sixième partie du corps, décroît
relativement, dans la suite, d’une manière telle qu’elle n’en fait
plus chez l’adulte, que la trente-cinquième partie ; c’est donc autrement
que par sa masse, que le cerveau peut concourir à la yie intellecr
tuelle '.
Traité du délire , T, II, p. 82,
B U C E R V E AU. 2q 3
Je prouverai dans cette section même, que la proportion du cerveau à
tout le corps est un moyen trompeur pour mesurer l’intelligence ; du
reste , il est bien naturel qu’à volume égal, un cerveau qui n’a point
encore acquis sa maturité, ne puisse pas encore exercer ses fonctions
dans toute leurplénitude. Et enfin, comment attendre des vues saines de
la part d’écrivains qui ont, comme M. Fodéré, lesidées les plus fausses en
fait d anatomie comparée ? Que l’on compare le cerveau du veau PI. III,
celui du mouton,PI.XIV, Celui de l’orang-outang, PI. XXXIV, celui du
lion, PI. XXXIII, fig. 5 , avec celui de l’homme, pour se convaincre si
ces cerveaux ont la même étendue, et une structure presque en tout
point analogue à celle du cerveau humain.
M. Fodéré, à l’appui de l’assertion, que le cerveau n!est pas le
siégé de la manie, dit page i 34 : « Nous avons écarté les lésions et
vices organiques du rôle de siège ou cause prochaine de la folie et des
prédispositions, d’autant plus que ces agrégés solides contrastent avec
la mobilité du siège de plusieurs maladies ».
M. Fodéré confond les produits de la cause première de l’aliénation
mentale, les lésions organiques, avec les lésions des fonctions vitales.
Il est des maladies qui, comme la goutte, peuvent avoir leur siège dans
une partie quelconque du corps douée de sensibilité ; une maladie
semblable peut affecter aujourd’hui la tête, demain le pied ; mais
comme le cerveau est exclusivement le siège des facultés intellectuelles,
il n’y a que lui qui puisse être le siège de leur dérangement. M. Fodéré
continue ainsi : « Les phénomènes de la nutrition, des sécrétions, ne
nous permettent pas de douter que nous renouvelons sans cesse quelque
partie de notre corps t Jean Bernoulli, soumettant ce renouvellement
au calcul, avoit trouvé que l’homme perd les deux tiers de son corps
dans l ’espace d’une année, par le changement continuel de la matière ;
qu’au bout de deux ans, il n’en reste plus que la quinzième partie, et
qu un homme qui vit quatre-vingts ans se renouvelle vingt-quatre fois
pendant ce laps de temps. Quelque exagéré qu’on puisse supposer ce
calcul, il est impossible, d’après les exemples journaliers de la puissance
étonnante du système absorbant, d’en contester la vérité, quant au
n- 38