
ag8 physiologie
tournoit toujours les yeux de ce côté là, quoiqu’il sentît distinctement
avec son côté droit, que ces sons ne provenoient que d’un dérangement
dans le côté gauche de sa tête. Lorsqu’il avoit la fièvre, il n’étoit plus
en état de combattre l’illusion. Long-temps après sa guérison, toutes
les fois qu’il faisoit un excès de vin , ou qu’il se livroit à la colère , il
sentoit dans son côté gauche les approches d’une rechute.
Je donnai, à Paris, des soins à une jeune dame qui me témoignoit
souvent l’appréhension où elle étoit de tomber en démence d’un côté
de la tête , parce qu’elle remarquoit que la marche de ses idées n’étoit
pas la même de ce côté que de l’autre.
Une autre dame, femme d’infiniment d’esprit, me tint à peu près le
même langage ; elle m’assura sentir distinctement que du côté gauche
elle percevoit tout différemment que du c-ôté droit ; que de ce côté,
tout l’affectoit autrement que de l’autre. Elle me dit que quelquefois
sa faculté de penser toute entière étoit entravée de ce côté là , et que
cette impuissance étoit accompagnée d’une torpeur glaciale : il me
semblé , voilà ses expressions , et elle appliquoit sa main perpendiculairement
sur le front dans la ligne médiane, il me semble que depuis
le front jusque sur le derrière de la tête, mon cerveau est divisé en
deux moitiés distinctes. Ni l’une ni l’autre de ces deux dames n’avoit
la moindre connoissance, ni de la structure du cerveau, ni de mes découvertes
physiologiques.
L’exemple suivant, que j’ai déjà rapporté ailleurs, trouve encore sa
place ici. Un médecin avec lequel je faisois mes études à Vienne, seplai-
gnoit souvent de ce qu’il n’étoit capable de penser qu’avec l’un des côtés
de sa tête ; il sentoit distinctement l’impuissance dé l’autre côté. En
effet, le côté foible étoit beaucoup moins élevé et beaucoup moins
large que l’autre.
11 paroît invraisemblable à beaucoup de médecins, qu’il puisse exister
deux états si divers des deux hémisphères , et que l’exercice de leurs
fonctions puisse différer d’une manière si frappante. Mais qu’est-ce donc
qu’une hémiplégie, si ce n’est une paralysie de l’une des moitiés du cerveau
qui entraîne une paralysie de l’un des côtés du corps, et d’ordinaire du
D U C E Ï V E i ï ï . *99
côté opposé ? J’ai vu un malade semblable qui garda le lit pendant
plus de vingt ans ; le côté malade dépérit, l’oeil attaqué s’atrophia peu
à peu, tandis que l’autre conservoit toute sa vigueur; la bouche resta
toujours tirée d’un côté, et cependant je ne remarquai pas qu’il eût
perdu aucune de ses facultés intellectuelles.
Dans les cas d’épancbemens cérébraux, qui ont si souvent lieu chez
les enfans après une inflammation cérébrale méconnue, ou traitée peu
convenablement, l’un des côtés de la tête est presque toujours plus
chaud que l’autre, et c’est de ce côté qu’ils la tiennent penchée. D’ordinaire
aussi, l’on trouve, de ce côté les vaisseaux sanguins plus tur-
gesçens, des inflammations, et même des suppurations, des hydatbides
dans les membranes cérébrales, et un épanchement plus abondant.
Dans la migraine ', les vaisseaux sanguins sont manifestement plus
türgescens d’un côté que de l’autre; c’est ce que nous avons eu occasion
de constater parla complaisance de M. Osiander, professeur à
Gôttingue; ce savant nous fit voir le cerveau d’une jeune fille, qui après
avoir long-temps souffert de la migraine, étoit morte de cette maladie ;
les vaisseaux, du côté malade, étoient beaucoup plus distendus que
ceux du côté sain.
Un enfant mourut d’un coup qu’il reçut sur le côté droit de la tête-
}a partie moyenne du pariétal droit, ainsi que le cuir chevelu ,■ étoient
meurtris. Lorsque j’eus mis le cerveau à nu, je trouvai tout l ’hémisphère
droit pâle et vide de sang, tandis que l ’hémisphère gauche é.toit
d’un rouge vif, fortement injecté et enflammé. Ce cas prouve jusqu’à
l’évidence, que les deux' hémisphères peuvent se trouver dans un état
diamétralement opposé. Si l’enfant avoit vécu, il eût certainement été
paralysé du côté gauche, et il eût éprouvé de violentes convulsions du
côté droit.
Chez une femme qui avoit été en démence pendant plusieurs années
nous trouvâmes, dans les couches optiques du côté gauche, un grand
ulcère qui en avoit détruit une partie; en conséquence de ce ravage,
' Migraine, ( hémicranie ) douleur qui affecte un seul côté de la tête.