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chant irrésistible à voler, à incendier, etc. Quelques-uns ont un amour
de l’ordre extraordinaire, une grande facilité pour retenir les chansons ,
pour imiter les mines, les gestes, etc.
11 en est absolument de même des cerveaux qui, quant à la masse ,
ont le plus haut degré de développement. A volume égal de cerveau,
chez un individu, c’est le talent poétique qui se manifeste; chez un
autre, c’est un courage héroïque; chez un troisième , un esprit philosophique
et observateur; chez un quatrième, la ruse, l’astuce, l’esprit de
dévastation dominent, etc.
Ici vient échouer tout ce que l’on peut avancer sur le cerveau, considéré
seulement quant à sa masse. Selon les physiologistes que j’ai cités
plus haut, et qui mesurent la masse cérébrale , soit considérée en elle-
même , soit comparativement aux autres parties du corps, il faut, à
masse égale du cerveau, s’attendre non-seulement aux mêmes facultés,
mais même, à-pen-près, au même degré de manifestation de ces facultés.
Cependant , l’expérience nous enseigne tout autre chose ; avec une
masse égale de cerveau, l’on trouve les différences les plus marquées,
tant pour le caractère moral, que pour le caractère intellectuel. Il
n’est pas ici question de nuances qui pourroient s’expliquer par la constitution
du corps, par l’éducation, etc. Il est question des différences
les plus essentielles, et qui sont manifestement l’ouvrage de la nature,
qui triomphe dans ces cas de toutes les influences extérieures. Malgré
tous les obstacles du dehors, l'un se livre aux mathématiques, l’autre
à la poésie ; un troisième se plonge dans les plaisirs, un autre encore
s’abandonne tout entier à de pieuses contemplations. Comment expliquer
cette variété de penchans et de facultés?
Toutes ces difficultés disparaissent pour celui qui a de justes idées
sur l’organisation du cerveau et sur les fonctions de ses différentes
parties. Que l’on considère la structure de la tête , tant des imbéciles
que des plus vastes;génies. Chacune de ces têtes a une forme différente;
donc, il existe dans chacune d’elles d’autres parties cérébrales, qui
ont acquis plus ou moins de développement-; et c’est précisément
là ce qui explique les diverses espèces, tant de l ’imbécillité
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que du génie. Chez tous ces hommes que j’ai cités plus haut qui
par leurs facultés éminentes sont devenus les bienfaiteurs du genre
humain , l’on trouve un front large et fortement bombé, parce
que, chez eux, les parties cérébrales placées contre le front sont
très-développées. Chez tous ceux au contraire, qui ne se sont fait remarquer
que par l’amour des conquêtes, par l’ambition de régner, par
l ’instinct de la destruction, par une vanité désordonnée, par la rage
des combats, pat la cruauté, par un penchant irrésistible pour les
plus sales plaisirs, etc., la partie supérieure antérieure de la tête est
peu proéminente; d’autres parties, au contraire, sont bombées d’une
manière très-marquée, et toujours par la raison que les parties cérébrales
placées sous ces proéminences du crâne, ont acquis un
grand développement. Lorsqu’il y a mélange des facultés nobles, et de
qualités d’un ordre inférieur, la forme du crâne est également mixte.
11 s’ensuit que ce n’est pas la masse absolue du cerveau, qui détermine
seule, ni tel caractère moral, ni tel génie ; mais que chaque
partie cérébrale, en particulier, en tant qu’elle a acquis un développement
plus ou moins favorable, peut modifier le degré de manifestation
de telle qualité morale, et de telle faculté intellectuelle
particulière.
Et quelle est la conséquence de tout ceci ? La conséquence nécessaire
est que les différentes parties cérébrales ont des fonctions
différentes à remplir; que la totalité du cerveau n’est point un organe
unique ; que chacune de ses parties intégrantes est un organe particulier,
et qu’il existe autant d’organes particuliers qu’il y a de fonctions
de l’ame essentiellement distinctes..
Mais cette idée, toute féconde qu’elle est pour le philosophe, pour
l’instituteur , pour le médecin, etc., trouve encore partout des contradicteurs.
11 faut donc que je la soumette à un examen détaillé. Je
contracte vis-à-vis de mes lecteurs, l’engagement d’établir si solidement
la doctrine de la pluralité des organes, qu’à l’avenir elle sera à
l’abri de toute objection.