
de la création, des lois de la nature et de notre organisation, remplit
toutes les conditions que l’on peut attendre d’un être fini, mais
raisonnable. Elle rend responsable non - seulement ceux qui guident
l’homme, mais aussi chaque individu pour ses actions ; c’est la seule
liberté qui puisse être utile dans la vie, et, comme dit Locke | , la seule
qui soit supposée dans toutes les institutions humaines ; tandis qu’en
admettant une liberté illimitée et absolue, tous les efforts qui tendent à
guider l’homme seroient insensés.
A présent que nous savons que l’homme possède non-seulement la
faculté d’être déterminé par des motifs intérieurs et extérieurs, mais
aussi la faculté de se déterminer d’après l’examen des motifs et d’après
son jugement, on voit combien sont utiles les institutions sociales, et
tout démontre que l’éducation, la morale, les lois, la religion sont des
auxiliaires indispensables pour assurer le bonheur de l’homme, puisque
ces institutions lui fournissent les motifs les plus nombreux, les plus
puissans et les plus nobles qui puissent le porter à bien agir. Nous rangerons
aussi au nombre des motifs la force de l’exemple, les marques
d’honneur ou d’infamie, les peines , les récompenses, l’attrait des arts et
des sciences, la perspective de l’avenir, les exhortations, les sermons,
les promesses, les peintures aimables de la vertu, les tableaux hideux du
vice. Quand les philosophes affirment qu’on doit pratiquer le bien et la
justice pour la vertu même, loin de détruire la nécessité des motifs, ils
nous présentent le bien et la justice comme les motifs les plus sublimes
et les plus dignes de nous faire agir. Tout prouve donc que, dans tous
les états de la société humaine, l’on n’a supposé, jusqu’à présent, d’autre
liberté morale que celle d’être déterminé par des motifs, et de se déterminer
d’après eux.
De la nécessité et de l’irrésistibilité de nos actions.
Notre doctrine sur la liberté morale prouve suffisamment combien
nous sommes éloignés de soutenir l’irrésistibilité des actions, et combien
ceux qui veulent déduire de nos leçons une semblable absurdité, se sont
peu familiarisés avec l’esprit de nos principes, et en général avec les discussions
scientifiques. Comme cette ignorance dans plusieurs de nos
critiques se joint à des intentions et à des passions qui devroient être
étrangères aux sciences, nous ne répondrons qu’à ceux de nos adversaires
que nous jugerons dignes de notre attention, soit à cause de la confiance
que le public a en eux, soit à cause de leur mérite réel. Mais nous les laisserons
parler eux-mêmes, afin qu’ils ne puissent pas nous accuser d’avoir
présenté peu fidèlement leurs objections et leurs idées. Cette méthode
paroitra peut-être fastidieuse ; elle est pourtant la seule qui puisse faire
bien connoître la foiblesse des argumens, et la vacillation perpétuelle des
idées de nos adversaires.
M. le professeur Ackermann, de Heidelberg, que nos adversaires en
Allemagne ont élu pour leur chef, et dont les objections, sous ce rapport,
s’accordent avec toutes celles que l’on nous a faites dans notre pays et
ailleurs, s’est élevé avec la plus grande animosité contre l’innéité des
dispositions morales et intellectuelles, et contre leurs organes. Si les dispositions
sont innées, dit-il, et s’il y a des organes pour chacune d’elles,
c’en est fait de la liberté morale, nos actions sont inévitables, les malfaiteurs
de tous les genres ont gain de cause, etc. Voici comme il prouve
cette conséquence dans les paragraphes suivans :
Objection.
“ §. 69. Un organe est la représentation réelle de la faculté elle-
meme. L’organe posé, son action l’est également. Un muscle qui se
contracte, est un autre muscle que celui qui est étendu, et toute orga