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d’un grand nombre de poissons, mais qui est analogue
à celui des serpens, elles se contentent aisément dé
chair morte.
Dénuées de fortes mâchoires , de dents meurtrières,
d’aiguillons acérés, n’étant garanties ni par des écailles
dures, ni par des tubercules solides, ni par une croûte
osseuse, elles n’ont point d’armes pour attaquer, et ne
peuvent, opposer aux ennemis qui les poursuivent que
les ressourcés des foibles, une retraite quelquefois assez
constante dans des asjles plus ou moins ignorés, l’agilité
des mouvemens, et la vitesse de la fuite. Aussi sont-
elles fréquemment la proie de grands poissons, tels que
l ’ésoee brochet, et le silure mal, de quadrupèdes tels
que la loutre et le chien barbet, et de l’homme, qui les
pêche non seulement avec les instrumens connus sous
les noms de nasse ' et de louve % mais encore avec les
grands filets.
Au reste, ce qui conserve un grand nombre de lam-
■ On nomme ainsi une espèce de panier d’osier ou de jonc, et fait a
claire - voie, de manière à laisser passer l’eau et à retenir le poisson. La
fiasse a un ou plusieurs goulets composés de brins d’osier que l’on attache
en dedans de telle sorte qu’ils soient inclinés les uns vers les autres. Ce»
brins d’osier sont assez flexibles pour être écartés par le poisson, qui pénètre
ainsi dans la nasse; mais lorsqu’il veut en sortir, les osiers présentent leurs
pointes réunies qui lui ferment le passage.
* On appelle louve ou lou", une espèce de filet en nappe, dont le milieu
forme une poche, et que l’on tend verticalement sur trois perches, dont deux
soutiennent les extrémités du filet, et dont la troisième plus reculée maintient
le milieu de cet instrument. On oppose le filet au courant de la marée;
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proies malgré les ennemis dont elles sont environnées,
c’est que des blessures graves, et même mortelles pour
la plupart des poissons,; ne. sont point dangereuses
pour les pétromyzôns; et même, par une conformité
remarquable d’organisation et de facultés avec les serpens,
et particulièrement avec la vipère, ils peuvent
perdre de très-grandes portions de-leur corps sans être
à l’instant privés de la vie , et l’on a vu des lamproies à
qui il ne restoit plus que la tête et la partie antérieure
du corps, coller encore leur bouche avec force, et pendant
plusieurs heures, à des substances dures qu’on
leur présentait.
Elles sont d’autant plus recherchées par lés pêcheurs
quelles parviennent à une grandeur assez considérable. '
On en a pris qui pesoient trois kilogrammes (six livrer
ou environ) 5 et lorsqu’elles pèsent quinze hectogrammes
( trois livres ou environ), elles ont déjà un mètre (trois
pieds ou à peu près) de longueur *. D’ailleurs leur
et lorsque le poisson y est engagé, on enlève du sol dèux dès trois perches ,
et on amène le filet dans le bateau pêcheur.
Quelquefois on attache le filet sur deux perches par les extrémités.
Deux hommes tenant chacun une de ces perches s^avancent au milieu des
eaux de la mer en présentant à la marée montante l'ouverture de leur filet,
auquel l’effort de l ’eau donne une courbure semblable à celle d’une voile
enflée par lè vent. Quand il y a des poissons pris dans le filet, ils achèvent de
les y envelopper en rapprochant les deux perches l’une de l ’autre.
* Il est inutile de réfuter l’opinion de Rondelet et de quelques autres
auteurs, qui ont écrit que là lamproie ne viyoit que deux ans.