en entrant de l’air dans l’oeil des quadrupèdes ou des
oiseaux; car personne n’ignore que la réfraction de
la lumière, et la réunion ou l’image qui en dépend,
est proportionnée à la différence de densité entre l’oeil
et le fluide qui l’environne. Mais voici ce que l’on doit
répondre.
Le cristallin des poissons est beaucoup plus convexe
que celui des oiseaux, des quadrupèdes et de l’homme;
il est presque sphérique : les rayons émanés des objets
et qui tombent sur ce crystallin . forment donc avec sa
surface un angle plus aigu : ils sont donc, tout égal
d’ailleurs, plus détournés de leur route, plus réfractés,
plus réunis dans une image; car cette déviation, à laquelle
le nom de réfraction a été donné, est d’autant
plus grande que l’angle d’incidence est plus petit.
D’ailleurs le crystallin des poissons est, par sa nature,
plus dense que celui des animaux plus parfaits ; son
essence augmente donc la réfraction. De plus, on sait
maintenant que plus une substance transparente est
inflammable, et plus elle réfracte la lumière avec
force. Le crystallin des poissons, imprégné d’une matière
huileuse, est plus combustible que presque tous les
autres crystallins; il doit donc, par cela seul, accroître
la déviation de la lumière.
Ajoutons que, dans plusieurs espèces de poissons,
l’oeil peut être retiré à volonté dans le fond de 1 orbite,
caché même en partie sous le bord de l’ouverture par
laquelle on peut l’appercevoir, garanti dans cette circonstance
par cette sorte de paupière immobile; et ue
manquons pas àur-tout de faire remarquer que les
poissons, pouvant s’enfoncer avec promptitude jusques
dans les plus grandes profondeurs des mers et des
rivières, vont chercher dans l’épaisseur des eaux un
abri contre une lumière trop vive, et se réfugient,
quand ils le veulent, jusqu’à cette distance de la surface
des fleuves et de l’Océan où les rayons du soleil
ne peuvent pas pénétrer.
Nous devons avouer néanmoins qu’il est certaines
espèces, particulièrement parmi les poissons serpenti-
formes, dont les yeux sont constamment voilés par une
membrane immobile, assez épaisse pour que le sens
de la vue soit plus foible dans ces animaux que celui
de l’ouïe, et même que celui du toucher: mais, en général,
voici dans quel ordre la nature a donné aux
poissons les sources de leur sensibilité ; l’odorat, la
vue, l ’ouïe, le toucher, et le goût. Quatre de ces sources,
et sur-tout les deux premières, sont assez abondantes.
Cependant le jeu de l’organe respiratoire des poissons
leur communique trop peu de chaleur; celle qui leur
est propre est trop foible ; leurs muscles l’emportent
trop par leur force sur celle de leurs nerfs ; plusieurs
autres causes, que nous exposerons dans la suite, combattent,
par une puissance trop grande, les effets de
leurs sens, pour que leur sensibilité soit aussi vive
que l’on pourroit être tenté de le croire d’après la grandeur,
la dissémination, la division dë leur système