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de cette espèce d’armure défensive et complète, ils ont
encore, pour protéger leur vie, des mojens puissans
de faire lâcher prise aux ennemis qui les attaquent.
Des aiguillons, à la vérité très petits, mais très-durs,
hérissent souvent une partie de leur queue; et comme
ils sont recourbés vers la tête, ils auraient bientôt ensanglanté
la gueule des gros poissons qui voudraient
saisir et retenir un baliste par la queue.
Les cartilagineux du genre dont nous traitons ont
d’ailleurs deux nageoires dorsales ; et la première de
ces nageoires présente toujours un rayon très-fort,
très-gros , très-long, et souvent garni de pointes, qui,
couché dans une fossette placée sur le dos, et se relevant
avec vitesse à la volonté de l’animal, pénètre très-
avant dans le palais de ceux de leurs ennemis qui les
attaquent par la partie supérieure de leur corps, et les
contraint bientôt à s’enfuir, ou leur donne quelquefois
la mort par une suite de blessures multipliées qu’il
peut faire, en s’abaissant et se redressant plusieurs
fois *.
Les nageoires inférieures, ou, pour mieux dire, la
nageoire thorachique, et improprement appelée ventrale,
présente dans les balistes une conformation que
l’on n’a encore observée dans aucun genre de poissons.
* La manière rapide dont les balistes redressent le rayon long et épineux
de leur première nageoire dorsale, a été comparée à celle avec laquelle
se débandoient autrefois certaines parties d’instrumens de guerre
propres à lancer des dards 5 et voilà d’où vient le nom de ces animaux.
Non seulement les nageoires dites ventrales sont ici
rapprochées de très-près , comme sur le mâle du squale
roussette; non seulement elles sont réunies, comme
nous le verrons, sur les cycloptères parmi les cartilagineux,
et sur les gobies parmi les poissons osseux; mais
encore elles sont confondues l’une dans l’autre, réduites
à une seule, et même quelquefois composées d’un seul
rayon.
Ce rayon, soit isolé, soit accompagné d’autres rayons
plus ou moins nombreux, est presque toujours caché
en grande partie sous la peau; et cependant il est assez
gros, assez fort, et souvent assez hérissé de petites
aiguilles, pour faire de la nageoire thorachique une
arme presque aussi redoutable que la première nageoire
dorsale, et mettre le dessous du corps de l’animal
à couvert d’une dent ennemie.
Cqt isolement , dans certains balistes, du rayon très-
alongé que l’on voit à la première nageoire dorsale et
à l’inférieure , et sa réunion avec d’autres rayons moins
puissans, dans d’autres animaux de la même famille,
sont les caractères dont nous nous sommes servis pour
répandre quelque clarté dans la description des diverses
espèces de ce genre, et pour en faire retenir les attributs
avec plus de facilité. C’est par le moyen de ces
caractères que nous avons établi quatre sous-genres,
dans lesquels nous avons distribué les balistes connus.
Nous avons placé dans le premier ceux de ces poissons
qui ont plus d’un rayon à la première nageoire