H I m S T O I R E N A T U R E L L E
à-la surface par des trous plus ou moins sensibles, et
l’on en peut trouver une description très-détaillée et
très-bien faite dans le bel ouvrage du professeur Monro
sur les poissons '.
La couleur générale de la bâtis est, sur le côté supérieur,
d’un gris cendré, semé de taches noirâtres,
sinueuses, irrégulières, les unes grandes, les autres
petites, et toutes d’une teinte plus ou moins foible - le
côté inférieur est blanc, et présente plusieurs rangées
de points noirâtres.
Les bâtis, ainsi que toutes les raies, ont en général
leurs muscles beaucoup plus puissans que ceux des
autres poissons2 ; c’est surtout dans la partie antérieure
de leur corps que l’on peut observer cette supériorité
de forces musculaires, et voilà pourquoi elles ont la
faculté d’imprimer à leur museau différens mouvemens,
exécutés souvent avec beaucoup de promptitude.
Mais non seulement le museau de la bâtis est plus
mobile que celui de plusieurs poissons osseux ou cartilagineux,
il est encore le siège d’un sentiment assez
délicat. Nous avons vu que, dans les poissons, un rameau
1 P. 22, pl. 6 et y. i
* Voyez, dans le tome septième des Mémoires des savons étrangers} présentés
à l ’académie des sciences de Paris, ceux de Vicq cKAzyr, qu’une mort
prématurée a enlevé à l’anatomie et à l’histoire naturelle, pour la gloire et
les progrès desquelles il avoit commencé d’élever un des plus vastes monu-
mens que 1 esprit humain eut encore conçus, et à la mémoire duquel j ’aime
a rendre un hommage public d’estime et de regrets.
de la cinquième paire de nerfs étoit le véritable nerf
acoustique. Une petite branche de ce rameau pénètre
de chaque côté dans l’intérieur de la narine, et s’étend
ensuite jusqu’à l’extrémité du museau * *, qui, dès-lors,
doué d une plus grande sensibilité, et pouvant d’ailleurs
par sa mobilité s’appliquer, plus facilement que d’autres
membres de la bâtis, à la surface des corps dont elle-
s’approche, doit être pour cet animal un des principaux
sièges du sens du toucher. Aussi,.lorsque les bâtis
veulent reconnoître les objets avec plus de certitude,
et s’assurer de leur nature avec plus de précision, en
approchent-elles leur museau, non seulement parce
que sa partie inférieure contient l’organe de l’odorat,
mais encore parce qu’il est l’un des principaux et peut-
être le plus actif des organes du toucher.
Cependant une considération d’une plus haute importance
et d’une bien plus grande étendue dans ses
conséquences se présente ici à notre réflexion. Ce
toucher plus parfait dont la sensation est produite
dans la bâtis par une petite branche de la cinquième
paire de nerfs, cinquième paire dont à la vérité un
rameau est le nerf acoustique dès poissons, mais qui
dans l’homme et dans les quadrupèdes est destinée à
s’épanouir dans le siège du goût, ne pourroit-il pas
être regardé par ceux qui savent distinguer la véritable
* Consultez l’ouvrage de Scarpa sur les sens des animaux, et particulièrement
sur ceux des poissons.
TOME I. 8