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riences sur'la raie dont nous écrivons l’histoire, ajoute:
« La même impression se renouveloit toutes les fois que
» je m’obstinois à toucher de nouveau la torpille. Il est
» vrai que la douleur et le tremblement diminuèrent
» à mesure que la mort de la torpille approchoit. Sou-
» vent même je n’éprouvois plus aucune sensation
» semblable aux premières; et lorsque la torpille fut
» décidément morte, ce qui arriva dans l’espace de trois
».heures, je pouvois la manier en sûreté,et sans r-èssen-
» tir aucune impression fâcheuse. D’après cette obser-
» vation, je 11e suis pas surpris qu’il y ait des gens qui
» révoquent cet effet en doute, et regardent l’expérience
» de la torpille comme fabuleuse, apparemment parce
» qu’ils ne l’ont jamais faite que sur une torpille morte
» ou près de mourir-».
Mais co n’est pas seulement lorsque la torpille est
très-affoiblie et près d’expirer, qu’elle ne fait plus
ressentir de commotion électrique; il arrive assez souvent
quelle ne donne aucun signe de sa puissance
invisible, quoiqu’elle jouisse de toute la plénitude de
ses forces. Je l’ai éprouvé à la Rochelle, en 1.777, avec
trois ou quatre raies de cette espèce, qui n’avoiènt été
pêchées que depuis très-peu de temps , qui étoient
pleines de vie dans de grands baquets remplis d’eau,
et qui ne me firent ressentir aucun coup que près de
deux heures après que j’eus commencé de les toucher
et de les manier en différens sens. Réaumur rapporte
même, dans les Mémoires que je viens de citer, qu’il
toucha impunément et à plusieurs reprises des torpilles
qui éfoient encore dans la mer, et qu’elles ne lui firent
éprouver leur vertu engourdissante que lorsqu’elles
furent fatiguées en quelque sorte de ses attouchemens
réitérés. Mais revenons à la;narration de Redi, et à l’exposition
des premiers phénomènes relatifs à.la torpille,
et bien observés par les physiciens modernes.
«•■Quant à l’opinion de ceux qui prétendent que la
» vertu de la torpille agit de loin, a écrit encore Redi,
» je ne-puis*prononcer.ni pour ni contre avec la même
» confiance. Tous les pêçlieurs affirment constamment
» que cette vertu se communique du corps de la torpille
» à la main et au- bras de celui qui la pêche,.par l’in-
» termède de la corde du filet,.et du bâton auquel il
»■ •est suspendu. L’un d’eux m’assura même qu’ayant mis
» une torpille dans un grand vase, et étant, sur le point
»•de remplir ce vase, avec de l’eau de mer qu’il avoit
»■ mise dans un second bassin, il s’étoitsenti les mains
» engourdies, quoique légèrement. Quoi qu’il en soit,
» je n’oserois nier le fait; je suis même porté à le croire.
» Tout ce que je puis assurer, c’est qu’en approchant
».la main de la torpille sans la toucher, ou en plon-
» géant mes mains dans l ’eau, où elle, étoit, je 11’ai res-
»■ senti aucune impression. Il peut se faire, que la tor-
» pille, lorsqu’elle est encore pleine de vigueur dans la
»mer, et que sa vertu n’a .éprouvé aucune dissipation,
» produise tous les effets rapportés par les pêcheurs.»
Redi observa, de plus, que la vertu de la torpille n’est