deux rangées les plus voisines sont situées un peu sur
les côtés de l’esturgeon, et les deux les plus extérieures
bordent d’un bout à l’autre le dessous du corps de
ce cartilagineux. Ces cinq séries de petits boucliers
sont assez élevées pour faire paroître l'ensemble de
l’animal comme une sorte de prisme à cinq faces, et
par conséquent à cinq arêtes.
Le nombre de ces plaques varie dans chaque rang;
il est quelquefois de onze ou douze dans la rangée du
dos, et il n’est pas rare de voir la plus grande de ces
pièces avec un diamètre de quatre ou cinq pouces, sur
des esturgeons déjà parvenus à la longueur de dix ou
onze pieds. L’épaisseur des boucliers répondant à leur
volume, et leur dureté étant très-grande, les cinq rangées
qu’ils composent seroient donc une excellente
défense pour l’esturgeon, et le rendroient un des mieux
cuirassés des poissons, si ces rangées n’étoient pas séparées
l’une de l’autre par de grands intervalles.
La nageoire dorsale commence par un rayon très-
gros et très-fort, et est située plus loin de la tête que
les nageoires ventrales ; celle de l’anus est plus éloignée
encore du museau; et le lobe inférieur de la nageoire
caudale est en forme de faux,‘ plus long et surtout
plus large que le supérieur.
L’esturgeon a une conformité de plus avec les raies,
par deux trous garnis chacun d’une valvule mobile
à volonté, et qui, placés dïtns le rectum, très-près de
l’anus, l’un à droite, et l’autre à gauche, font coinmuniquer
cet intestin avec la cavité de- l’abdomen.
Leau de la mer, ou celle des rivières, pénètre dans
cette cavité par ces deux ouvertures; elle s’y mêle avec
celle que les vaisseaux sanguins y déposent, ou que
d autres parties du corps peuvent y laisser filtrer, et
parvient ensuite jusques dans la vessie.
La couleur de l’esturgeon est bleuâtre, avec de petites
taches brunes sur le dos, et noires sur la partie inférieure
du corps. Sa grandeur est très-considérable,
.ainsi que nous l’avons déjà annoncé; et lorsqu’il a
atteint tout son développement, il a plus de 'dix-huit
pieds, ou de six mètres, dé longueur.
Cet énorme cartilagineux habite non seulement dans
1 Océan, mais encore dans la Méditerranée, dans la
mer Rouge, dans le Pont-Euxin, dans la mer Caspienne.
Mais, au lieu de passer toute sa vie au milieu des eaux
salées , comme les raies, les;squales, les lophies, les
balistes et les chimères, il recherche les eaux douces
comme le pétromyzon lamproie, lorsque le printemps
arrive, qu une chaleur nouvelle se fait sentir jusqu’au
milieu des ondes, y ranime le sentiment le .plus actif,'
et que le besoin de pondre ou de féconder ses oeufs le
presse et 1 aiguillonne. Il s’engage alors dans presque
tous les grands fleuves. Il remonte particulièrement
dans le Volga, le Tanaïs, le Danube, le Pô, la Garonne,
la Loire, le Rhin, l’Elbe, l’Oder. On ne le voit même
le plus souvent que dans les fleuves larges et profonds,
soit qu’il y trouve avec plus de facilité l’aliment qu’il
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