un temps calme; et sur-quelques rivages, comme, par
exemple, sur ceux d’Islande“, on attend les nuits les
plus longues et les plus obscures. On prépare un hameçon
garni ordinairement d’une pièce de lard, et
attaché à une chaîne de fer longue et forte. Si le requin
n’est pas très-affamé , il s’approche de l’appât, tourne
autour, l’examine, pour ainsi dire, s’en éloigne, revient,
commence de l’engloutir, et en détache sa gueule
déjà ensanglantée. Si alors on feint de retirer l’appât
hors de l’eau, ses appétits se réveillent, son avidité se
ranime, il se jette sur l’appât, l’avale goulûment, et
veut se replonger dans les abymes de l’Océan. Mais
comme il se sent retenu, par la chaîne, il la tire avec
violence, pour l’arracher et l’entraîner : ne pouvant
vaincre la résistance qu’il éprouve, il s’élance, il bondit,
il devient furieux; et, suivant plusieurs relations’ , il
s’efforce de vomir touï ce qu’il a pris, et de retourner,
en quelque sorte, son estomac. Lorsqu’il s’est débattu
pendant long-temps et que ses forces commencent à
être épuisées, on tire assez la chaîne de fer vers la côte
ou le vaisseau pêcheur, pour que la tête du squale
paroisse hors de l’eau ; on approche, des cordes avec des
noeuds coulans, dans lesquels on engage son corps,
nue l’on serre étroitement, sur-tout vers l’origine de la
.queue ; et après l’avoir ainsi entouré de liens, on l’enlève 1
1 Anderson, Histoire naturelle du Groenland^ de VIslande3 etc,
-, .;Labat, Voyage en Afrique et en Amérique•
et on lè transporte sur le bâtiment ou sur le rivage, où
l’on n’achève de lé mettre à mort qu’en prenant les plus
grandes précautions contre sa terrible morsure et les
coups que sa queue peut encore donner. Au reste, ce
n’est que difficilement qu’on lui ôte la vie; il résiste-
saps périr à de larges blessures; et lorsqu’il a expiré,,
on voit encore pendant long-temps les différentes parties
de son corps donner tous les signes d’une grande
irritabilité-
La chair du requin est dure, coriace, de mauvais-
goût, et difficile à digérer. Les nègres de Guinée,,
et particulièrement ceux de la côte d’Or, s’en nourrissent
cependant , et ôtentà cet aliment presque toute -
sa dureté en le gardant très-lông-temps. O11 mange
aussi sur plusieurs côtes de la Méditerranée les très-
petits requins que l’on trouve dans le ventre de leur
mère, et près de venir à la lumière; et l’on n’y dédaigne
pas quelquefois le dessous du ventre des grands requins ,
auquel on fait subir diverses préparations pour lui ôter
sa qualité coriace et son goût désagréable. Cette même
chair du bas ventre est plus recherchée dans plusieurs
contrées septentrionales, telles que la Norwège et l’Islande,
où on là fait sécher avec soin, en la tenant suspendue
à l’air pendant plus d’une année. Les Islandois
font d’ailleurs un grand usage de la graisse du requin:
comme elle a la propriété de se conserver long-temps
et de se durcir en se séchant, ils s’en servent à la place
du lard de cochon, ou la font bouillir pour en tirer.dee