6 4 H I S T O I R E N A T U R E L L E
cavités, peut ensuite se répandre dans les vaisseaux et
les organes qui l’avoisinent, en suintant, pour ainsi
dire, par les petits pores dont sont criblées les memr
branes qui composent ces organes et ces vaisseaux ;
mais voilà tout ce que l’état actuel des observations
faites sur les raies, et particulièrement sur la bâtis, nous
permet de conjecturer relativement à l’usage de ces
trois cavités de l’abdomen, du péricarde et du crâne,
et de cette eau un peu salée qui imprègne presque tout
l’intérieur des poissons marins dont nous nous occupons,
de même que l’air pénètre dans presque toutes
les parties des oiseaux dont l’atmosphère est le vrai
séjour.
Nous ne devons pas répéter ce que nous avons déjà dit
sur la nature et la distribution des vaisseaux lymphatiques
des poissons, et particulièrement des raies; mais
nous devons ajouter à l’exposition des parties principales
de la bâtis, que les ovaires sont cylindriques dans
les femelles de cette espèce : les deux canaux par lesquels
les oeufs s’avancent vers l’anus à mesure qu’ils
grossissent, sont le plus souvent jaunes; et leur diamètre
est d’autant plus grand qu’il est plus voisin de l’ouverture
commune par laquelle les deux canaux communiquent
avec l’extrémité du rectum.
Ces oeufs ont une forme singulière très-différente de
celle de presque tous les autres oeufs connus, et particulièrement
des oeufs de presque tous les poissons osseux
ou cartilagineux. Us représentent des espèces de bourses
D E S P O I S S O N S . 6 5
ou de poches composées d’une membrane forte et demi-
transparente, quadrangulaires, presque carrées, assez
semblables à un coussin, ainsi que l’ont écrit Aristote
et plusieurs autres auteurs', un peu aplaties, et terminées
dans chacun de leurs quatre coins par un petit
appendice assez court que l’on pourroit comparer aux
cordons de la bourse. Ces petits appendices un peu cylindriques
et très-déliés sont souvent recourbés l’un vers
l’autre ; ceux d’un bout sont plus longs que ceux de
Tautre bout; et la poche à laquelle ils sont attachés, a
communément six ou neuf centimètres (deux ou trois
pouces ou environ) de largeur, sur une longueur à peu
près égale.
Il 11’est pas surprenant que ceux qui n’ont observé
que superficiellement des oeufs d’une forme aussi ex-
traordinâire, qui ne les ont pas ouverts , et qui n’ont
pas vu dans leur intérieur un foetus de raie, n’aient
pas regardé ces poches ou bourses comme des oeufs de
poissons, qu’ils les aient considérées comme des productions
marines particulières, qu’ils aient cru même
devoir les décrire comme une espèce d’animal. Et ce qui
prouve que cette opinion assez naturelle a été pendant
long-temps très-répandue, c’est que l’on a donné un
nom particulier à ces oeufs, et que plusieurs auteurs ont
appelé une poche ou coque de raie mus marinus, rat
marin \ *
* Rondelet, première partie, liv ■ 12 , p. 271.
’ Les Grecs modernes, les Turcs, et quelques autres Orientaux, regardent,
TOM E I . 9