brumes épaisses reposant silencieusement sur des monts
de glace flottans au milieu des longues nuits hyperbo-
réennes: tantôt la mer tranquille, doublant le nombre
des étoiles pendant des nuits plus douces et sous un
ciel plus serein; tantôt des nuages amoncelés, précédés
par de noires ténèbres, précipités par la tempête,
et lançant leurs foudres redoublés contre les énormes
montagnes d’eau soulevées par les vents : plus loin , et
sur les continens, des torrens furieux roulant de cataractes
en cataractes; ou l’eau limpide d’une rivière
argentée, amenée mollement, le long d’un rivage fleuri,
vers un lac paisible que la lune éclaire de sa lumière
blanchâtre. Sur les mers, grandeur, puissance, beauté
sublime, tout annonce la nature créatrice, tout la
montre manifestant sa gloire et sa magnificence : sur
les bords enchanteurs des lacs et des rivières, la nature
créée se faii'sentir avec ses charmes les plus doux;
lame s’émeut; lespérance l’échauffe; lé souvenir l’anime
par de tendres regrets, et la livre â cette affection
si touchante, toujours si favorable aux heureuses
inspirations. Ah! au milieu de ce que le1 sentiment a dé
plus puissant, et de ce que le génie peut découvrir de
plus grand et de plus sublimé, comment n’être pas
pénétré de cette force intérieure, de cet ardent amour
de la science, que les obstacles, les distances et le temps,
accroissent, au lieu de le diminuer?
Ge domaine, dont les bornes sont si reculées, n’a été
cependant accordé qu’aux poissons considérés comme
ne formant qu’une seule classe. Si on les examine
grouppe par grouppe, on verra que presque toutes les
familles parmi ces animaux paroissent préférée chacune
un espace particulier plus ou moins étendu. Au
premier coup d’oeil, on ne voit pas aisément comment
les eaux peuvent présenter assez de diversité, pour
que les différens genres, et même quelquefois les différentes
espèces de poissons, soient retenus par une
sorte d’attrait particulier dans une plage plutôt que
dans une autre. Que l’on considère, cependant, que
l’eau des mers , quoique bien moins inégalement
échauffée aux différentes latitudes que l’air de l’atmosphère,
offre des températures très-variées, sur-tout
auprès des-rivages qui la bordent, et dont les uns,
brûlés par un soleil très-voisin , réfléchissent une chaleur
ardente, pendant que d’autres sont couverts de
neiges, de frimas et de glaces ; que l’on se souvienne
que les lacs, les fleuves et les rivières, sont soumis à
de bien plus grandes inégalités de chaleur et de froid;
que l’on apprenne qu’il est de vastes réservoirs naturels
auprès des sommets des plus hautes montagnes, et à
plus de deux mille mètres au dessus du niveau de la
mer, où des poissons remontent par les rivières qui en
découlent, et où ces mêmes animaux vivent, se multiplient,
et prospèrent*; que l’on pense que les eaux de
jjg Note adressée de Eagnières, le i3 nivôse de l’an 5, au citoyen la
Cepède, par le citoyen Ramoné, membre associé de l ’Institut national,