Dans le mâle, les vaisseaux spermatiques, ou la laite,
sont divisés en deux portions, et ont une longueur
égale au tiers de celle de l’animal considéré dans son
entier. Le requin mâle a d’ailleurs, entre chaque nageoire
de l’anus et cette dernière O ouverture , un appendice
douze fois plus long que large, égalant dans sa
plus grande dimension le douzième de la longueur
totale du squale, organisé a l’intérieur comme les appendices
des mâles des raies bâtis, contenant cependant
ordinairement un nombre moins grand de parties dures
et solides, mais se recourbant également par le bout,
et servant de même à saisir le corps de la femelle, et
à la retenir avec force lors de l’accouplement.
Chacun des deux ovaires de la femelle du requin est
à peu près égal en grandeur à l’une des deux portions
des vaisseaux spermatiques du mâle.
Le temps où le mâle et la femelle se recherchent et
s’unissent, varie suivant les climats ; mais c’est presque
toujours lorsque la saison chaude de l’année, a commencé
de se faire sentir, qu’ils éprouvent le besoin
impérieux de se débarrasser, l’une des oeufs quelle
porte, et l’autre de la liqueur destinée à les féconder.
Ils s’avancent alors vers les rivages;.ils se rapprochent;
et souvent, lorsque le mâle a soutenu contre un rival
un combat dangereux et sanglant, ils s’appliquent l’un
.contre l’autre , de manière à faire toucher leurs anus.1
Maintenus dans cette position par les appendices crochus
-du mâle, par leurs efforts mutuels, et par une sorte
de croisement de plusieurs nageoires et des extrémités
de leur queue, ils voguent dans cette situation contrainte,
mais qui doit être peur eux pleine de charmes,
jusqu’à ce que la liqueur vivifiante du mâle ait animé
les oeufs, déjà parvenus au degré de développement
susceptible de recevoir la vie. Et telle est la puissance
de cette flamme si active , qui s’allume même au milieu
des eaux , et dont la chaleur pénètre jusqu’au plu3
profond des abymes de la mer, que ce mâle et cette
femelle, qui dans d’autres saisons seroient si redoutables
l’un pour l’autre, et ne chercheroient qu’à se
dévorer mutuellement s’ils étoient pressés par une
faim violente, radoucis maintenant, et cédant à des
affections bien différentes d’un sentiment destructeur;
mêlent sans crainte leurs armes meurtrières, rapprochent
leurs gueules énormes et leurs queues terribles ,
et, bien loin de se donner la mort, s’exposeroient à la
recevoir plutôt que de se séparer, et ne cesseroient de
défendre avec fureur l’objet de leurs vives jouissances«
Cet accouplement, plus ou moins prolongé, est aussi
répété plus ou moins fréquemment pendant le temps
des chaleurs, soit que lé hasard ramène le même mâle
auprès de la même femelle, ou qu’il les unisse avec de
nouveaux individus. Dans cette espèce sanguinaire, le
mouvement qui entraîne le mâle vers sa femelle n’a en
effet aucune constance; il passe avec le besoin qui l’a
produit; et le requin, rendu bientôt à ses affreux appétits,
moins susceptible e-ncore de tendresse que le tigre