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rapporter ici les observations faites par M. Sauvages, habile
médecin de Montpellier, sur les effets d’un foie
de roussette pris intérieurement *. Un savetier de Bias,
auprès d’Agde, nommé Gervais, mangea d’un foie de
ce squale, avec sa femme et deux enfans,dont l’un étoit
âgé de quinze ans, et 1 autre de dix. En moins d’une
demi-heure, ils tombèrent tous les quatre dans un
grand assoupissement, se jetèrent sur de la paille, et
ce ne fut que le. troisième jour qu’ils revinrent à eux
assez parfaitement pour eonnoître leur état. Ils furent
alors plus ou moins réveillés, suivant qu’ils avoient pris
une quantité moins grande ou plus considérable de
foie. La femme, qui en avoit mangé le plus, fut cependant
la première rétablie. Elle eut, en sortant de son
sommeil, le visage très-rouge; et elle ressentit le lendemain
une démangeaison universelle qui ne passa que
lorsque tout son épiderme se fut séparé du corps en
lames plus ou moins grandes,.excepté sur la tête, où
cette exfoliation eut lieu par petites parties et n’entraîna
pas la chute des cheveux. Son mari et ses enfans éprouvèrent
les mêmes effets.
La roussette est très-féconde ; elle s’accouple plusieurs
fois; elle a plusieurs portées chaque année, et, suivant
la plupart des observateurs, chaque portée est de neuf
à treize petits; on a même écrit, qu’il y avoit quelque-
* Dissertation sur les animaux venimeux, couronnée par l’académie de
Rouen , en 1 745.
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fois des portées de dix-neuf jeunes squales: mais peut-
être a-t-on appliqué faussement à la roussette ce qui
paroît vrai du rochièr, avec lequel elle a de très-grands
rapports, et auquel le nom de roussette a été aussi
donné.
Les oeufs qui éclosent dans'le ventre delà mère, au
moins le plus souvent, sont semblables à ceux du
requin : on les a également comparés' à» des sortes de
coussins, de poches, de bourses;, et ces coques membraneuses
sont'également terminées, dans leurs quatre
angles, par un filament délié, et treize ou quatorze fois
plus long que l’oeuf proprement dit. Plusieurs auteurs
anciens ont cru, d’après Aristote, que ces filamens si
alongés étoient creux et formoient de petits tujaux;
mais dans'quelque état, qu’on observe ces sortes de cordons
, o h les trouve toujours sans aucune espèce de
cavité *.
Lorsque lès roussettes mâles sont accouplées avec leurs
femelles, elles les retiennent avec des crochets ou des
appendices mobiles placés auprès de lanus^ comme les
mâles des autres squales et des raies se tiennent collés
contre leurs femelles : mais l’organisation intérieure de
ces appendices est plus simple que celle des parties analogues
de la bâtis ; on n’j voit que trois cartilages, dont
deux ont une très-grande dureté.
La roussette étant répandue dans toutes les mers , sa
Voyez Rondelet, à l ’endroit déjà.cité*