rerture de sa bouche. Il l’est d’ailleurs de l’esturgeon
et du huso par la petitesse de sa taille : il ne parvient
guère à la longueur de trois pieds ; et ce n’est que
très-rarement qu’on le voit atteindre à celle de quatre
pieds et quelques pouces.
Il a sur le dos cinq rangs de boucliers, comme l’esturgeon
et le huso. La rangée du milieu est composée
ordinairement de quinze pièces assez grandes ; les deux
qui viennent ensuite en comprennent chacune cinquante
neuf ou soixante , qui, par conséquent , ont
un diamètre très-peu étendu; et les deux rangs qui
bordent le ventre sont formés de plaques plus petites
encore, et qui, au lieu d’être très-relevées dans leur
centre comme celles des trois rangées intérieures, sont
presque entièrement plates.
On trouve cet acipensère dans la mer Caspienne ,
ainsi que dansle Volga et dans l’Oural, qui y ont leur
embouchure; on le voit aussi, mais rarement, dans la
Baltique ; et telles sont les habitations qu’il a reçues
de la nature. Mais l’art de l’homme, qui sait si bien
détourner, combiner, accroître, modifier , domter
même les forces de la nature, l’a transporté dans des
lacs où l’on est parvenu, avec très-peu de précautions,
à le faire prospérer et multiplier : Frédéric premier,'
roi de Suède, lra introduit avec succès dans le lac
Mæler et dans d’autres lacs de la Suède; et ce roi de
Prussé, qui, philosophe et homme de lettres sur le
trône, a su créer par son génie, et les états qu’il devoit
régir, et l’art de la guerre qui devoit les défendre,
et l’art d’administrer plus rare encore, qui devoit leur
donner l’abondance et le bonheur, a répandu le stre-
let dans un très-grand nombre d’endroits de la Poméranie
et de la Marche de Brandebourg.
Voilà deux preuves remarquables de la facilité avec
laquelle on peut donner à une contrée les espèces de
poissons les plus utiles. Ces deux faits importans seront
réunis à un grand nombre d’autres, dans le discours
que l’on trouvera dans cette histoire, sur les usages
économiques des poissons, et sur les divers moyens d’en
acclimater, d’en perfectionner, d’en multiplier les
espèces et les individus.
Et que l’on ne soit pas étonné d’apprendre les soins
que se sont donnés les chefs de deux grandes nations
pour procurer à leur pays l’acipensère strelet. Cette
espèce est très-féconde : elle ne montre jamais, à la
vérité, une très-grande taille ; mais sa chair est plus
tendre et plus délicate que celle des autres cartilagineux
de sa famille. Elle est d’ailleurs facile à nourrir ;
elle se contente de très - petits individus, et même
d’oeufs de poissons dont les espèces sont très - communes
; et elle peut n’avoir d’autre aliment que les vers
qu’elle trouve dans le limon des mers, des fleuves,
ou des lacs qu’elle fréquente.
C’est vers la fin du printemps que le strelet remonte
dans les grandes rivières ; et comme le temps de la
ponte et de la fécondation de ses oeufs n’est pas très