. A u reste, il est à remarquer que ces genres, de même que la plupart de ceux
qui appartiennent en propre à une région quelconque, tels, par exemple, que les I
bradypes ou paresseux, les cochons d’Inde, les agoutis,les pacas, les lagothriches, I
pour l’Amérique, et les pangolins, les hyènes, les mégadermes, les orangs, les I
gibbons et une foule d’autres pour l’ancien monde , sont peu nombreux en I
espèces; tandis que les genres cosmopolites en renferment presque tous une mul- I
titude, comme ceux des vespertilions, des musaraignes, des chats, des chiens, I
des écureuils, des lièvres et des cerfs. Cependant le genre Tapir et le genre Laman- !
tin, qui existent à-la-fois dans les deux continens, ne comptent que deux ou trois I
espèces ; et réciproquement on trouve dans la seule Amérique une multitude I
d’atèles, de sajous, de phyliostomes, de didelphes, &c., de même que l’ancien I
monde possède beaucoup de semnopithèques et de guenons. Quelque chose I
d’analogue a également lieu dans l’Australasie, où l’on connoît déjà plus de douze I
kanguroos; nombre qui sera peut-être même porté au double, lorsqu’on aura visité I
l’intérieur de la Nouvelle-Hollande, contrée aussi vaste que l’Europe entière, et I
dont le littoral est à peine connu en quelques points. Il semble que la nature, en I
créant un si grand nombre d’animaux établis sur le même plan d’organisation, ait I
voulu nous montrer, dans son inépuisable richesse, combien de variations secon- I
daires peuvent se grouper sur un même type primitif
C e que nous venons de dire à l’égard des mammifères est également vrai de I
toutes les autres classes d’animaux. L ’Amérique, par exemple, possède en propre I
des genres d’oiseaux qui ne comptent que quelques espèces, tels que les genres I
H o c co , Pénélope, &c., et d’autres qui en renferment une multitude, tels que les I
tangaras, les manakins, les oiseaux-mouches et les carouges : mais ces genres sont, I
comme chez les mammifères, moins nombreux encore que ceux qui sont cosmo- I
polites, comme les pies-grièches, les merles, les fauvettes, les gobe-mouches, les I
moineaux, les pigeons, les pluviers, les hérons, les canards, et plusieurs autres I
groupes dont les espèces sont presque innombrables.
Enfin la même chose a également lieu parmi les reptiles de tous les ordres; et
le genre Couleuvre, celui de tous qui se trouve le plus généralement répandu sur
la surface du globe, est aussi celui de tous qui renferme le plus grand nombre
d’espèces. Après avoir séparé des véritables coluber, les vipères, les pythons, &c.,
Daudin a encore trouvé près de cent soixante-et-dix espèces dans ce groupe très-
naturel. A la vérité, plusieurs de celles indiquées dans l’Histoire des reptiles sont
purement nominales, et doivent être retranchées du Systema; mais aussi combien I
d’autres, seulement découvertes depuis le commencement de ce siècle, n’ont pu I
être indiquées dans l’ouvrage de Daudin, publié en 1802! et combien même,
parmi celles déjà connues dès cette époque, ont été omises par cet auteur!
Cinq couleuvres, très-différentes par leur taille, leurs proportions et leurs
couleurs, ont été figurées dans l’Atlas ; nous les décrirons successivement, en
commençant par celles que leurs formes plus sveltes et plus gracieuses éloignent
davantage de la plupart des vipères.
LA C O U L E U V R E O R E IL L A R D
( planche 8 , fig. 4 et 4* )•
Nous avons examiné deux individus de cette espèce : l’un d’eux avoit un pied
onze pouces du bout du museau à l’anus, et dix pouces trois quarts de fanus à
l’extrémité de la queue ; l’autre, un peu plus grand, avoit deux pieds deux pouces
et quelques lignes jusqu’à l’anus, sa queue mesurant un peu moins d’un pied. La
longueur totale du premier étoit donc de deux pieds néuf pouces trois quarts, et
celle du second, de trois pieds deux pouces. Le nombre dès plaques du dessous
du corps étoit presque exactement le même chez tous deux; le plus petit individu
en avoit cent soixante-une, et le plus grand, cent soixante-deux: quant aux caudales,
on en comptoit de chaque côté cent onze chez l’un et chez l’autre. Le dessus de la
tête présentoit neuf grandes plaques, dont la forme et la grandeur ont été parfaitement
rendues par la figure 4', et qu’il est par conséquent inutile de décrire ici : de
plus, les côtés de la face étoient couverts de larges écaillés irrégulièrement quadrilatères.
Celles de la mâchoire inférieure étoient généralement de même forme :
seulement on voyoit de chaque côté deux plaques longues et étroites placées l’une
à la suite de l’autre et distinctes de leurs congénères par un sillon correspondant
a la ligne médiane. La fin de ce sillon, aussi éloignée de la symphyse de la mâchoire
que de la première des plaques du dessous du corps, n’étoit séparée de celle-ci
que par trois écailles, dont deux sont plus longùes que larges, et dont la troisième,
à peu près carrée, commence à prendre la forme des plaques':
Dans cette espece , le corps et sur-tb'ùt la queué sont proportionnellement
très-grêles : le diamètre du corps surpasse à peine un demi-pouce dans l’endroit où
il est le plus considérable, c’est-à-dirë, vers la partie moyenne de l’animal ; et la
queue, qui n’a que neuf lignes de circonférence à'son origine,'èt cinq vers le milieu
de sa longueur, est encore beaucoup plus grêlé dans sa portion terminale.
La Couleuvre oreillard est très-remarquable pàr son système de coloration. Une
ligne longitudinale, blanche, très-fine et très-étroite, placée'sur la ligne médiane,
commence quelques pouces au-delade 1 occiput, et disparoît peu à peu vers l’origine
de la queue. Une autre, de même couleur, mais beaucoup plus large, occupe
la partie, supérieure des flancs : très-prononcée sur une grande partie de sa longueur,
elle 1 est beaucoup moins vers ses extrémités; ce qui n’empêche pas qu’on ne puisse
la suivre assez facilement en avant jusquauprès de l’occiput, et en arrière jusqu’à
la région moyenne de la queue : il est à ajouter que, dans la portion de son
trajet où elle est le plus large, elle est bornée à son bord supérieur par une petite
ligne noire qui contribue encore a la rendre plus distincte. Le reste du dos et des
flancs est couvert d écaillés verdâtres dont l’extrémité inférieure est noire; ce qui
forme sur le dos une multitude de petites taches noires irrégulières, et sur les
flancs trois séries de points noirs disposés en quinconce. Le dessus de la tête
est généralement brunâtre avec de petites lignes longitudinales dans la région