
arbres. La ponte est de quatre oeufs. Les uns quittent le nid après leur naissance,
les autres seulement quand ils se sentent en état de voler. Ce ne sont point,
comme le disent plusieurs auteurs anciens, des destructeurs de serpens; ils n’y
touchent même jamais.
La mue n’a lieu qu’une fois par an. L e plumage des jeunes est différent de celui
des adultes; les sexes, chez ces derniers, sont difficiles à distinguer entre eux.
Les opinions fabuleuses des auteurs anciens, tels qu’Hérodote, Cicéron, Pom-
pdriius Mêla, Solin, Elien, Ammien Marcellin, & c ., sur les moeurs des Ibis blanc
et noir [Ibis religiosa et Ibis falcinellus), àvoient rendu tellement obscure l’histoire
de ces oiseaux, que pendant plusieurs siècles ils ont été méconnus, et que la plupart
des naturalistes les ont rapportés à des espèces de formes et d’habitudes tout-
à-fait différentes. Ce n’est que depuis le voyage qu’entreprit Bruce en 1768 pour
découvrir les sources du Nil, que les idées ont commencé à se fixer. Dans ce
voyage, et durant son séjour dans la basse Ethiopie, Bruce fut à portée d’observer
des oiseaux dont les formes lui rappelèrent celles des ibis, telles que les monumens
Egyptiens les lui avoient présentées ; il reconnut que ces oiseaux étoient en effet
les véritables Ibis blanc et noir. L ’opinion et les observations de Bruce furent confirmées
dans ces derniers temps par MM. Geoffroy et Savigny, qui, pendant l’expédition
des Français en Égypte, purent se procurer Un grand nombre d’oiseaux
absolument semblables. Le dernier de ces savans sur tout contribua puissamment,
ainsi que M. Cu vie r, à éclaircir plusieurs points de l’histoire des ibis, couverte
d’obscurité depuis bien des siècles : M. Savigny fit connoître ses observations dans
un ouvrage ayant pour titre Histoire naturelle et mythologique de l ’ibis ( 1 ) , et
M. Cuvier, dans un Mémoire sur l ’ibis des anciens Egyptiens, imprimé dans les
Annales du Muséum d ’histoire naturelle de Paris, tome IV, page 116 ( t 8o4 ) ; en
sorte qu’il ne reste plus aujourd’hui de doutes sur l’identité des espèces d’ibis
connues des peuples de l’antiquité avec celles qui sont connues des naturalistes
modernes. Les auteurs anciens attribuoient la vénération des Égyptiens pour les
ibis, qu’ils plaçoient dans leurs temples, aux prétendus services que ces oiseaux leur
rendoient en les délivrant des serpens ailés qui les menaçoient chaque année d’une
ruine inévitable. Les serpens venoient des marais de l’Arabie ou des déserts de la
Libye, et les ibis alloient, disoit-on, au-devant d’eux, les attaquoient et les détrui-
soient entièrement. L ’inspection anatomique démontre clairement que les organes
de ces oiseaux ne sont point appropriés aux habitudes qu’on leur supposoit. Leur
bec, par exemple, long, grêle, très-arqué, à bords émoussés et à pointe dilatée
et arrondie, n’auroit pu ni diviser les serpens ni les percer. La conformation de
cet organe de manducation indique pour toutes les espèces où elle se rencontre
une grande sensibilité, qui leur permet seulement de fouiller dans les terrains
mous ou dans la vase pour y choisir les alimens qui leur conviennent. Si les ibis se
nourrissoient de serpens et trouvoient un attrait à leur livrer des combats, pourquoi
, au lieu de les empêcher de pénétrer dans le pays où eux-mêmes devoient
( 1 ) V oy ez , à la fin d e c e t t e E x p li c a t io n , l’ e x t r a it q u e p u b lié en 1805 ( 1 v o l. in -8 .° ) , q u i e st peu c on n u des
nous a v o n s cru d e v o i r fa ire d e c e t im po rtan t o u v r a g e , n a tura listes et assez rare au jo u rd ’ hui.
passer une partie de l’année , ne pas les suivre dans leur retraite ! et quelle étoit
leur nourriture après l’entière destruction des serpens! II est plus naturel de voir
dans les récits que les anciens font des moeurs et des habitudes des ibis, des fictions
imaginées pour exprimer les heureux effets du phénomène qui, chaque année,
triomphe de toutes les sources de corruption, et qui vient en même temps assurer
la fertilité du sol. La presence constante de ces oiseaux aux époques de l’inondation
a pu faire supposer des rapports surnaturels entre leur séjour et l’accroissement
des eaux du Nil. M. Cuvier a annoncé avoir trouvé dans une momie d’ibis
des débris non encore digérés de peau et d’écailles de serpent, et en a conclu que
ces.oiseaux ont pu être ophiophages. Ce fait, qui est le seul cité par M. Cuvier,
est contradictoire avec les observations faites en Égypte par M. Savigny sur un
grand nombre d’individus vivans qu’il a ouverts, et dans le gésier desquels il a
constamment trouvé des coquillages univalves et fluviátiles, la plupart des genres
cyelostome, ampullaire et planorbe, et toujours entiers quand les animaux n’en
avoient pas ete digères. Le fait cite par M. Cuvier peut aisément s’expliquer par
1 usage dans lequel etoient les Égyptiens d embaumer tous les animaux sacrés, qu’ils
fussent entiers, ou qu’il n’y eût qu’une partie de leur corps. D’ailleurs plusieurs
espèces de serpens étoient comptées parmi les animaux sacrés, et, ne l’eussent-elles
pas ete, on les embaumoit tout aussi bien que les ibis. C’est peut-être là l’origine
de cette association. M. Savigny dit que dans les puits des Oiseaux, aux plaines de
Saqqarah, on trouve des momies dibis dans 1 intérieur desquelles se voient, parmi
des coquilles d oeufs d ibis, de petits quadrupèdes d’espèces diverses, les uns entiers,
les autres incomplets, et dont on n’avoit évidemment recueilli que les débris.
Les ibis ne nichent point en Égypte, et, suivant le rapport des habitans, ils
arrivent dès que le Nil commence à croître : leur nombre semble s’augmenter
avec les eaux du fleuve, pour diminuer ensuite avec elles ; et, lorsque l’inondation
est passée, ils ont tous disparu. Leur apparition en Égypte a lieu vers la fin de
juin, et ils y séjournent environ sept mois, c’est-à-dire, à peu près jusqu’au i 5 de
janvier.
Les Égyptiens et les Arabes estiment la chair des ibis : ils en tuent peu au fusil ;
mais ils en prennent beaucoup au filet de l’une et de l’autre espèce, e t, dans l’automne,
on en trouve une grande quantité dans les marchés de la basse Égypte : on
est dans l’usage de leur couper la tête avant de les vendre.
E S P È C E S .
L'IBIS B L ANC , IBIS R E L I G I OS A
( planche 7, fig. j ).
I. a lb a ; c a p ite c o llo q u e s u p e r io r e fu s c is ; d o r s o p o s tic o r em ig ib u s q u e n ig r is ; ro s tro
s u p r à v i r i d i , s u b tù s n ig r o ; p e d ib u s a tr is .
SïNONYM. Tantalus Æthiopicus. L a t h . Ind. Ornith. pag. 3 0 5 , n.° 12.
th is sacré, Ibis religiosa, C u v . Règne animal, tom. I , pag. 483 ; et Annales du Muséum,
tóm. IV , planche 5 y.