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gaine à la base, et garnis d’épines sur les bords. Le sommet de chaque pétiole se I
termine inégalement sur les côtés, pour donner attache a la lame demi-circulaire et I
plissée qui résulte de l’union des folioles : celles-ci sont reunies dans leur moitié I
inférieure, et représentent un grand éventail ouvert; elles sont libres à leurs som- ï
mets, où elles se rétrécissent, et sont séparées par des filamens roulés en spirale I
qui se détachent d’entre elles.
Les fleurs sont mâles ou femelles sur des pieds différens. De longues grappes I
les produisent au-dehors de spathes dans les aisselles des feuilles. Ces spathes, I
formés d’une seule pièce, s’ouvrent sur le co te , et sont petits en comparaison I
de ceux du Dattier; ils contiennent les gaines ou spathes partiels propres aux I
rameaux des grappes. Chacun-de^ces rameaux se termine par plusieurs epis ou I
chatons couverts d’écailles imbriquées, que des faisceaux de soies séparent, et du I
milieu desquels sortent des fleurs solitaires fort petites;
Les fleurs mâles ont un calice à six divisions, dont trois extérieures, étroites, I
sont redressées contre un pédicelle qui soutient les trois intérieures plus larges. I
Ces dernières divisions sont ouvertes et écartées. Le pédicelle sur lequel elles I
naissent, porte aussi les étamines, qui sont au nombre de six, et dont les. filets, I
réunis par leur base au centre des divisions, sont tellement disposes, que trois I
alternent avec ces divisions, tandis que les trois autres leur sont opposés. Une I
anthère ovoïde termine chaque filet.
Le'calice des fleurs femelles est plus grand que celui des mâles, et se divise en I
six portions presque égales : il est placé au-dessous d’un ovaire à trois lobes. Cet ■
ovaire grossit d’une manière irrégulière. Un seul des lobes se développé commune- 1
ment pour former le fruit, à la base duquel on remarque souvent deux tubercules I
qui remplacent les lobes avortés : mais lorsque deux ou trois lobes se développent I
ensemble, ils produisent autant de fruits soudés par la base, sur lesquels une I
même écorce passe de l’un à l’autre, et dans chacun desquels se trouve une I
semence, parfaite.
Le fruit est un drupe sec, jaunâtre, ovoïde, couvert d’une écorce fine, lisse et I
friable, qui cache un tissu particulier de fibres. Une pulpe dune saveur mielleuse I
et aromatique est logée entre les fibres, qui, extérieurement, sont lâches et r e - 1
dressées : elles naissent d’une couche très-serrée à 1 inférieur, et qui forme une I
enveloppe ligneuse. Le tissu dense de cette enveloppe ne se continue pas ega- 1
lement de toutes parts pour former la paroi d’une loge complète ;- il est inter-1
rompu dans un point à la partie supérieure, qui se perce aisément. Cette enve- 1
loppe. contient une amande ou semence de forme conique, quelquefois presque H
ovoïde, et élargie par une de ses extrémités qui lui sert de base. Cette semence I
est un peu tronquée au sommet, où l’embryon se trouve logé dans une petite ■
cavité ; elle est composée d’une substance blanche et cornée, qui laisse un vide ■
dans le centre. Sa surface est recouverte d’une pellicule brune et écailleuse.
■ Le bois du Doum est plus solide que celui du Dattier. On en taille des I
planches dont- on fait des portes dans plusieurs villages du Sa’yd. Les fibres ■
de ce bois sont noires; et la moelle qui les- unit est un peu jaune. Le bois I
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des branches est mou, léger, et n’a point de couleur. Les feuilles sont employées
à faire des tapis, des sacs et des paniers fort commodes et d’un usage très-
répandu. Les fruits ont une pulpe pleine de fibres ; ce qui n’empêche pas les
paysans du Sa’yd d’en manger quelquefois. On en apporte beaucoup au Kaire, où
on les vend à bas prix. On les regarde plutôt comme un médicament utile que
comme un fruit agréable; ils plaisent cependant aux enfàns, qui en sucent la
pulpe, dont la saveur est exactement celle du pain d’épice. On en fait par infusion
un sorbet qui ressemble à celui que l’on prépare avec la racine de réglisse ou avec
la pulpe des gousses de caroubier. Cette liqueur est douce, et passe pour salutaire.
Le Doum fleurit tous les ans au mois d’avril. Il n’est pas besoin d’aider la
fécondation en portant des fleurs mâles sur les grappes femelles; la poussière des
étamines, en volant dans l’a ir , imprègne suffisamment les ovaires. Les paysans
du Sa’yd assurent qu’un Doum mâle peut féconder plusieurs pieds femelles éloignés.
Quoiqu’il avorte beaucoup de fruits sur les grappes, ils y sont fort serrés;
s’ils nouoient tous, ils manqueraient d’espace pour se développer : une grappe
en produit environ trente ou quarante. Ils sont très-pesans avant leur maturité.
Ils se colorent et se recouvrent d’une poussière glauque, comme des prunes
fraîches.
La semence ou l’amande de ces fruits est d’abord cartilagineuse et remplie d’une
eau claire sans saveur : dans les fruits mûrs, elle se durcit assez pour que l’on puisse
en tourner des anneaux et des grains de chapelet faciles à polir.
Pococke a donné, dans ses Voyages, un dessin et une description du Doum, qu’il
nomme Palma Thebaica, et qu’il regarde comme le Cucifera de Théophraste.
L ’Ecluse et les Bauhin en avoient aussi parlé, mais trè l- brièvement. Gærtner a
décrit et figuré le même fruit : il en a formé un genre particulier, Hyphoene, à
cause de la position de l’embryon au sommet de la graine. Deux espèces de ce
genre sont décrites dans l’ouvrage de Gærtner : l’une, Hyphoene crinita (1), est la
même que le Doum ; l’autre, Hyphoene coriacea (2), diffère par son fruit élargi au
sommet : ces fruits se ressemblent d’ailleurs beaucoup. On découvre dans les deux
espèces le même tissu de fibres, lorsque la pulpe et l’écorce fine des fruits commencent
à se détruire; mais ces fibres, par une grande vétusté, se séparent plus
facilement de l’Hyphoene coriacea que de l’Hyphoene crinita.
M. de Jussieu m’a fait voir un fruit <ïHyphoene coriacea qui est dans l’état où
1 a figure Gærtner, c’est-à-dire, privé de ses fibres extérieures et réduit à l’enveloppe
coriace de la semence. Il suffit de lire la description de Gærtner pour se convaincre
que ce fruit est tres-fibreux dans son état naturel ; et lorsque Grew l’a décrit sous
le nom de nucidactylus, il en a comparé les fibres aux crins d’une brosse. On ne
peut assigner, entre les deux Hyphoene, d’autre différence qui paroisse constante,
que celle de la forme des fruits. L ’arbre qui produit 1 Hyphoene coriacea, n’est pas
encore connu.
La figure de ce fruit ou nucidactylus de Grew (3) mérite d’être citée pour
1 exactitude du genre. Elle représente très-bien les deux tubercules formés par les
(1) Gærtner, tom. I I , p. ¡ p tab. 82. [2) Ibid, tom. I , p. 28, tab. 10. (3) Mus. tab, 16, n.° 1.