ils dégagent également d’une foule de combinaisons possibles la seule qui convienne
à leur position ; il leur arrive a 1 un comme a 1 autre d imaginer la ineuve
ruse , de tendre les mêmes pièges, de prendre confiance dans les détails et le
mérite d’une même embuscade. Cependant opposeroit - on que 1 aptitude du
système sensitif explique suffisamment cette rencontre des mêmes effets! Nous
venons tout-à-l’heure de remarquer que ces systèmes ne sauroient différer davantage.
Seroit-ce que divers arrangemens puissent fortuitement amener le même
résultat! Mais ceci est trop vague et vraiment ne dénoue point la difficulté. Cherchons
donc ailleurs. La portion du monde extérieur accessible à nos sens pourroit-
elle être considérée comme suffisamment inspiratrice ! C est sans doute trop lui
accorder, bien qu’elle soit pour beaucoup dans les elemens de nos déterminations,
et quoique véritablement nous ne puissions etre excites que pai les choses qui
sont en dehors de nous, et lorsqu’elles arrivent à notre connoissance. Mais cela
même seroit, qu’il resteroit toujours évident qu’il n’y a point d application à en
faire à nos deux animaux, puisque leur propre monde extérieur offre chacun le
contraste le plus frappant, étant formé en tres-grande partie de deux milieux
différens, l’un de ces animaux vivant dans le milieu atmosphérique, et l’autre ne
s’abandonnant aux allures de la vie active que dans le milieu aquatique.
Je me trouve donc encore ici acculé sur les difficultés ( i ) que ja i signalées
plus haut, lorsque je m’occupois du cerveau du crocodile. Sans qu alors j aie voulu
présenter ma distinction des systèmes intra-cranien et extra-cranien comme donnant
très-certainement un élément de solution dans des questions aussi compliquées
, je suis ramené sur les mêmes réflexions par le retour des memes difficultés.
Cependant ne faudroit-il qu’étendre tout ce qui a ete dit d une partie au corps
entier, lui reporter les explications produites pour le crâne ! Devrois-je effectivement
placer tout le système sensitif sous la meme distinction, celle d un système
profond et d’un système superficiel, celui-là étant intra-rachidien, et celui-ci extérieur
au rachis. et rejeté dans le derme !
Les poissons, comme présentant des conditions moyennes, sont en pareil cas
utilement consultés. Leur système intra-rachidien est dans un degré intermédiaire
de développement ; mais, en revanche, le système sensitif répandu dans le derme
en est sensiblement augmenté. Le nerf de la quatrième paire, ou le pathétique,
ne se montre qu’en eux l’une des essentielles parties de l’organisation,, se répandant
au loin et abondant dans le derme. La ligne latérale ést un autre exemple
de la richesse de ce système. Les anatomistes, n’ayant guère considéré la quatrième
paire que dans l’homme , et 1 ayant trouvée dans un état de minimum,
n’y ont aperçu qu’une utilité partielle, et à l’égard d’un muscle de l’oeil ; utilité
(i) Les difficultés de ce sujet s’étoient déjà présentées
aux pères Jésuites occupés en 1686 de missions dans
l’Inde. Ces religieux étoient en même temps commissionnés
par l’Académie des sciences. Ils décrivirent le
crocodile de Siam, qu’ils eurent toute faculté d examiner
vivant et après sa mort. Riches de faits, ils en cherchèrent
dès cette époque les plus importantes conséquences : la
petitesse du cerveau les ayoit frappés. « Cette petitesse,
» ont-ils éc r it, dans un animal dont on a toujours vantt
»la ruse, confirme ce qu’on a déjà remarqué, que le
„ défaut de cervelle est moins une marque de peu des-
» prit que de beaucoup de férocité. » ( Observations physiques,
¿7 c., page 45» in-8.°; 1688.
qu’ils auroient à to rt placée soüs l’influence d ’une donnée générale de l’organisation.
Enfin on trouve de p lu s , quand on descend les degrés de l’échelle an im a le ,
d’autres espèces, comme les crustacés et les insectes, chez lesquelles le système
sensitif consiste dans un appareil u n iq u e , 1 externe : le rachis manque chez eux.
Suit-il de ce qui p ré cèd e, que je me flatte d ’avoir résolu les questions que je
viens de soulever ! N o n , certes ; je n’ai pensé qu’à m o n tre r le rap p o rt de plusieurs
de ces faits, qü’à les p ré sen te r’comme dans une sorte d’éq u atio n , ainsi que fo n t
les géomètres occupés de problèmes compliqués : voilà seulement ce que je me
suis proposé, et tel est le p o in t où j’arrête ces considérations.
Mais sur-tout je n’ai point voulu en faire un sujet de critique à l’égard des dernières
recherches sur les fonctions du système nerveux. Ce qui a paru vrai touchant
l’influence de plus ou de moins de renflement de quelques parties cérébrales
peut être légitimement acquis à la science , dans les limites où se sont tenus les
observateurs. Ils ont examiné et comparé les espèces d’un genre naturel ; par
conséquent, opérant sur des sujets dans lesquels le système sensitif superficiel
restoit le même, ils ont bien pu et ils ont dû trouver des différences d’habitudes
sous la dépendance de quelques différences dans les régions cérébrales.
Ceci n empecheroit pas que le système superficiel fournissant au système profond
ce qui lui manque, et vice versa, i 1 y eût, par des structures en apparence
très-différentes, de mêmes effets produits. O r c’est où reportent les singulières
conformités de moeurs qui ont donné lieu à cette digression. Le lion et le crocodile,
devenus vieux et ayant perdu de leur agilité, n’avoient plus qu’à succomber
sous les inconvéniens d’un pouvoir sans bornes. Leur taille gigantesque et leurs
habituelles cruautés en ont-ils fait un objet d’épouvante et d’horreur, tous les
animaux les fuient. Pourront-ils résister au malheur de cet affreux isolement, au
danger imminent de périr de faim ! Nous allons apprendre que cette situation n’est
point encore désespérée. Il leur reste quelques ressources, celles des êtres impuis-
sans et malheureux : ils pourront tromper ; et en effet, l’un et l’autre prennent
aussitôt leurs mesures pour demeurer inaperçus. S’il n’est qu’une bonne ruse, ils
la découvrent; quun plan excellent d’embuscade, il est mis aussitôt en pratique.
Or cette suite de vues est également inspirée à des animaux autant différens que
le lion et le crocodile.
Je reviens a 1 herisseal : je me suis étendu sur sa structure ; mais je ne l’ai considéré
qu’en lui-même.
La langue, l’hyoïde et le larynx vont aboutir sur le bord postérieur de l’héris-
séal, «reçoivent de sa disposition, sous la forme d’un large plateau, des conditions
d essence et d’activité. La membrane qui tapisse la voûte palatine ne s’étend
Peu et antérieurement sur les hérisséaux. Par-delà, conservant son extrémité
libre, elle devient un vaste réseau : c’est le voile du palais, dont l'étendue ést
remarquable. Pour le surplus, les hérisséaux semblent à nu ; 'car il n’est plus au-delà
qu un périoste mince et transparent qui les préserve d’exfoliation. Les arrière-
narines, qui sont à leur partie médiane et terminale, s’ouvrent dans une petite