Vue du
haut de la
montagne
Kotre-
iDame,
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Ces fages mefures ont été couronnées du fuccès qu’elles méritoient;
dès-lors l’églife n’a plus été frappée par le tonnerre , au moins c’eft
ce que j’apprends par une lettre de Gênes, en date du 9 août 1794.
§. 1341. L a vue que l’on a du haut de cette montagne eft fort
étendue, mais peu intéreifante. Cette partie des Apennins ne préfente
ni les afpeâs majeftueux & terribles, ni les vallées riantes de nos Alpes.
Leurs fommets font arides & pelés, mais fans formes hardies & décidées
, fans beaux rochers, & fans efcarpemens bien prononcés.
O n ne peut point déterminer la forme ni la direction générale des
vallées & des montagnes qu’on découvre de là ; on en voit qui courent
du Midi au Nord; d’autres, du Levant au Couchant; d’autres
fuivent des directions intermédiaires : mais quant à l’élévation, on
voit que Notre-Dame de la Garde eft lituée fur la plus haute partie
de cette chaîne des Apennins ; car les montagnes s’abaiffent graduellement
, foit au Midi du côté de la mer, foit au Nord du côté des
terres. D’après l’obfervation de M. P ic t e t , le fol de l’églife eft élevé
de 422 toifes au-deifus de la mer. On croiroit auflï pouvoir prononcer,
que ces montagnes ont été dans l’origine une maife pleine &
continue, & que les vallées qui les divifent actuellement font l’ouvrage
des eaux pluviales ; en effet, on ne voit, comme je l’ai d it, aucune
de ces vallées fuivre régulièrement la direction générale de la chaîne
des Apennins , toutes ont la forme d’un entonnoir renverfé , étroit
vers -le haut & s’élargiffant vers le bas.
Ce qu’on voit de ces vallées ne paraît peuplé & cultivé que du
côté du Nord ; vers le Col de la Bouquette, & au Sud-Eft le long
de la Polcevera , autour de St. Pier dArena & du Fanal ; car la ville
même de Gênes eft cachée par les montagnes qui forment fon enceinte.
La nier qui préfente un afpect fuperbe, lorfqu’on la voit au-delà d’un
pays riant & fertile, paroît infiniment trifte & fauvage lorfqu’elle termine
comme ici un pays ftérile & défert.
§. m u
D E L A G A R D E . Chap. X V. 14$
'§. 1342. L e fomrnet de la montagne eft compofé d’une pierre de la . Nat^rc--
■claffe des magnéfiennes', qui, je crois, n’a pas été décrite, & que je de fa cime,
nommerai ferpentme grenue. A l’air elle eft matte & de couleur dé 5^ * ^ 1,6
rouille, niais dans fes divifions fpontanées, elle prend une couleur
d’un brun noirâtre , irifé & quelquefois brillant. Intérieurement , les
morceaux qui n’ont point fouffert de la déconipofition font d’un vcrd
gris foncé. Caffure inégale , fans éclat ,• terreufe & groffiè-re, ou plutôt
■grenue, paroiffant à une forte loupe un peu écailleufe, ou plutôt compofée
de parties détachées; les unes en grains, les autres de formes
irrégulières d’un verd clair & translucide. La pierre en maffe n’eil tranf-
lucide que fur fes fins bords ; elle fe raye en gris blanchâtre ; elle eft
tendre, a l’odeur argilleufe & fe fond aifénient au chalumeau, à raifon
de la quantité de fer qu’dle contient. Le verre qu’elle donne eft noir,
luifant & conipaâe. Ce même fer eft caufe que la pierre prend à Pair
une couleur de rouille qui la pénétré peu à peu, au point que ce n’eft
que dans l’intérieur des morceaux d’un certain volume qu’on retrouve
la couleur verte, naturelle à la pierre. Ces mêmes parties vertes agif-
fent fur l’aiguille aimantée, tandis que celles qui font complettement
rouillées n’exercent fur elle qu’une action très-foible- Enfin, les progrès
de cette rouille vont au point de déconipofer cette pierre & de
la réduire en une efpèce de terre.
C e t t e ferpentine fe divife d’elle-même en fragmens polyèdres irréguliers
; la forme rhomboïdale eft cependant celle que l’on reconnoît
le plus fréquemment. Cette difpofition à fe divifer, a oblitéré les traces
des couches, qui ont dû exifter originairement dans cette pierre : les
granits argilleux font fiijets à ce même accident, comme je l’aiobfervé
ailleurs.
§• 134.3. Àu-deffous de ces ferpentines décompofées, on trouve un Ardolfes
banc d’ardoifes luifantes non effervefcentes. Expofées à la flamme du rouScs*
■chalumeau, elles fe gonflent d’abord, niais fe fondent enfuite avec
peine en un verre d’un gris obfcur. Ce banc court de l’Eft Sud-Eft à
l’Oueft Nord-Queft en fe relevant du côté du Sud.
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