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fe rapprocher du Rhône. La route, tant qu’elle le côtoie, eft charmante
: fon courant fë divife, forme des isles fouvent cultivées, au
moins toujours boifées. On le quitte à regret pour ferpcnter entre
des cpllines de la même nature que les précédentes.
C ’e s t une chofe bien remarquable, que tant qu’on voyage entre
Collines ces collines, on ne voit que des débris calcaires de ces mêmes colli-
loux rouie"».nes > & P°‘nt de cailloux roulés qui leur foient étrangers. Cela prouve
bien que le torrent de la débâcle avoit beaucoup perdu de fa force
en fe dilatant dans les plaines, puifque non-feulement il ne charrioit
plus de grands blocs de roches primitives, dont on ne voit aucun
dans tout ce pays, mais qu’il ne pouvoit pas même foulever du gravier
par deffus des collines qui n’ont que j ou 4 cents pieds de hauteur.
Près des Alpes ,au contraire, on trouve jufqu’à 2 ou joo toiles
d’élévation, des blocs énormes charriés par cette débâcle.
En trois heures de route, depuis Beaucaire au hameau la Foux,
où eft la pofte de Remoulins , on rejoint la grande route de
Nîmes au St. Elprit. Ce hameau eft adoffé à un rocher atfez éleve'
& efcarpé, compolë d’une pierre calcaire grife, allez tendre, poreufe,
un peu fpathique, mêlée de beaucoup d’argille.
D e la Foux, on remonte le Gardon pendant un quart de Heue
pour arriver au pont du Gard. Dans cette route, 011 cotoie a fa gauche
des rochers calcaires efèarpés, qui font la continuation de ceux
de la Foux, & fur Lefquelles on voit des filions produits anciennement
par l’érofion des eaux, à une grande hauteur au-deilus du lit
aftuel du Gardon.
Pont du q n connoit le pont du Gard : pn fait que ce n’étoit point un pont,
mais trois rangées d’arcades polées les unes fur les autres, pour fou-
tenir en ligne droite au-deiïiis de la riviere & du ravin qu’elle a creuiè,
un aqueduc qui conduifoit des eaux à la ville de Nîmes.
C e ‘ monument me parut plus frappant par fa grandeur que par la
beauté de fes proportions ; les arches des arcades inférieures font d’une
belle étendue; & les pierres, dont elles font conftruites, font remarquables
par leur grandeur & la régularité de leur coupe. Mais le*
arcades du troifieme étage, quoique fort bien adaptées à leur defti-
nation, choquent l’oeii par leur petitéife, puifqu’elles n’ont que le
tiers de l’étendue & de l’élévation de celles qui les fupportent; La
pierre dont ce , pont eft conftruit, eft une pierre calcaire légère ,
poreufe , uniquement compofée de débris de coquillages marins, pref-
que tous bivalves, Ceux dont on reconnoît les fragments, font des
peignes ftriés. On y voit aufli des débris de coquilles Mes, blanches,
allez épailfes. J’ai cru enfin y diftinguer quelques morceaux de corail.
§. 1606. L e Gardon roule des cailloux détachés des montagnes des Cailloux
Cévennes où il a fa fource, des granits, des roches fchifteufes , &c. Le dn Gardon,
morceau le plus remarquable de ceux que j’y ramaiTai eft une efpece
de poudingue, dont la furface extérieure, ufée par le frottement, eft
d’un brun prefque noir, un peu luifante, aifez douce au toucher &
affez froide. On y voit des fragments tüus anguleux, les uns de quartz
blanc ou jaunâtre, les autres d’un fchifte compofé de feuillets alternatifs
de ce même quartz & de la pâte brune qui forme le fond
du poudingue. Cette pâte, dans ia caifure, paroît d’abord homogene ,
d’un brun tirant fur le gris, à très-petites écailles, & d’un éclat fcin-
tillant; mais quand on l’obferve avec une forte loupe, on voit qu’elle
eft compofée d’un mélange de grains, les uns blancs, brillants, lamel-
leux, les autres d’un brun foncé & fans éclat. Lorlque la pierre a été
chauffée, mais pourtant pas au point de couler, ces grains paroif-
fent encore plus diftincfs, ils font alors tous fondus, mais féparé-
ment, luifants & arrondis ; on reconnoît que les blancs font du feld-
fpath, &'les bruns de hornblende terreufe. Un coup de feu plus vif
confond tops ces grains, bourfouffle la pierre.. & la réduit en une
feorie brune, attirable à l’aimant. Cette pierre eft dure, donne beaucoup
d’étincelles, & une pointe d’acier y laiffe fa propre trace.
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