ConGdé-
rations fur
la terre
végétale.
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mentales de toutes ces plaines ont été dépofées par des courans, dont
la force dans les premiers tems, fut atfez grande pour charier des cailloux
jufques à de grandes diftances des montagnes dont ils avoient
été détachés , mais qu’enfuite leur violence diminua graduellement,
en demeurant cependant toujours allez grande auprès, des montagnes
pour ne dépofer que des cailloux dans leur voifinage , & pour fou-
tenir pendant un long trajet, les argilles & les fables dont ils étoient
chargés.
§. 1316. C e t t e gradation n’eft cependant pas fenfible entre Turin
& St. Germano, quoique la diftance foit d’environ ia lieues ou de
y polies & un quart. Dans tout cet efpace, par-tout où des caufes locales
n’ont pas changé l’état naturel du terrein, on ne voit que peu ou point
de fable ou d’argille à fa furface, & la terre végétale repofe immédiatement
fur les cailloux roulés.
M a is la raifon de cette exception faute aux yeux. On voit que cette
plaine eft proprement une vallée ferrée entre les Alpes & les collines
duMont-Ferrat, & on comprend que ce refferrement a dû conferver
au courant une vîteffe fuffifante pour l’empêcher de dépofer du fable
& de l’argille. Mais au-delà de St. Germano, où les Alpes fuyant à
l’Eft, donnent à la plaine une largeur confidérable, les eaux ■ commencèrent
à abandonner les fables, & on commence effeâivement à
en voir des couches entre les cailloux & la terre végétale.
§. 1317. E n faifant cette route de Turin à St. Germano, où j’avois
prefque continuellement fous les yeux cette terre végétale, repofant
immédiatement fur les cailloux roulés, j’eus une belle occafion de
réfléchir fur les idées relatives à la théorie de notre globe, dont cette
efpece de terre a été le fujet.
C e qui donnoit là quelque importance à ces réflexions, c’eft qu’on
ne peut pas douter que cette belle & fertile vallée, contigue aux
plaines de la Lombardie , ne foit un des pays les plus anciennement
cultivés de l’Europe , & où par conséquent on doit voir le plus eu
grand les phénomènes qui font propres à cette terre. Ces cailloux qui lui
fervent de baie , étoient encore une circonitance précieufe pour l'ob-
fervateur. En effet, lorfque cette terre eft affife fur d’autres efpeces de
terre, fur du fable ou du menu gravier , il peut s’élever quelque doute ,
quelque difficulté fur la détermination précife de fon épaiifeur & de
fes limites, au lieu que ces gros cailloux la déterminent avec toute la
certitude que l’on peut Souhaiter.
§. 1318. C e fait feul, que la terre végétale repofe immédiatement
fur les cailloux , prouve déja , qu’au moins dans le Piémont, la terre
végétale fie fe convertit point en fable quartzeux. Un ehimifte très-
célebre, M. S a g e , regarde le quartz comme un fel dont les ingré-
diens , Savoir l’alkali fixe & l’acide vitriolique fe trouvent dans les végétaux
il conclut de là, que la décompofition Spontanée des végétaux
produit de petits cryftaux.de quartz ou des grains de fable; & en
conséquence, il croit que les fables qui fe trouvent fréquemment au-
deffous de la terre végétale, ceux de la 'Weftphalie, par exemple,
font l’ouvrage , ou plutôt le dernier réfultat de la végétation.! O r ,
entre Turin & St. Germano , on ne trouve point de fable au-deffous
de la terre végétale; & cependant les végétaux du Piémont font effen-
tiellement de la même nature que ceux de la 'Weftphalie. Et fi l’on
fuppofoit que le fable produit par les végétaux, a pu s’écouler entre
les intervalles des cailloux , j’objecterois une infinité d’endroits dans les
montagnes & même dans les plaines, où la terre vegetale repofe immédiatement
fur le roc, fans que la plus petite couche de fable fe trouve
interpofée entre le roc & la terre. Il femble donc que quand on trouve
ce fable au-deffous de la terre végétale , on doit lui attribuer une origine
différente.
§. 1319. L e peu dépaiffeur de la couche de terre végétale que l’on
voit dans ces plaines, me .femble auffi prouver que Ion ne peut pas
Elle ne
fe change
pas en
(able.
Limite
des as.
eroiiie