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de fes rayons réfléchis par la nier , & celle que reverberent les collines
qui bordent cette plage du côté du Nord. Cette double réflexion
explique pourquoi cette côte produit des fruits propres à des pays plus
chauds que les plaines même des environs de Rome, qui font de plu.
iieurs degrés plus méridionales.
Culture La petite ville de Bordighera., où nous pailàmes après cette obferra-
miers.*1' îion, fuffiroit pour fournir la preuve de cette vérité , puifqu’on y cul-
tive une quantité de palmiers , dont on recueille les feuilles, que l’on
envoie à Rome pour les cérémonies de la femaine fainte.
Le cap de Bordighera, & le fond fur lequel eft bâti le village, font
d’un grès groffier en couches prefqu’horizontales. En defcendant la
pente rapide de cette ville, on a une vue très-étendue des bords de
la mer , que l’on découvre jufqu’a Anlibes,
O n traverfe enfuite la belle plaine de Nervi di J>onente. La riviere qui
l’arrofe ne charie que des grès & dqs pierres calcaires.
En approchant de Vintimille, on paffe fous des rochers efcarpés,
compofés de breches groffieres, mêlées de fable & peu cohérentes.
Vintimille; O n paflfe enfuite fur un pont à demi ruiné, la Roya, qui eft la plus
grande riviere que l’on rencontre entre Gênes & Nice , & qui pourtant
eft très-peu confidérable ; là , on a en face la vieille & pauvre
ville de Vintimille, bâtie fur la pente rapide d'une colline, dont les
derrières font des rocs nuds ou plutôt des falaifes terreufes, rongées
à leur pied par la mer. Nous montâmes au haut de la ville, où étoit h
chétive auberge où nous devions coucher ; je vifitai ces falaifes, dont
le haut eft de breches groffieres, & tout le bas d’argilles fableufes.
On compte dix mille de St. Remo à Vintimille.
§. IJ8°-
A N 1 C.E, Chap.XVl I . ' 18?
§, 1380.- E n fortant de la ville on chemine fur le penchant d’une DeVinti.
colline qui eft la continuation de celle fur laquelle la ville eft bâtie ; S jLSsmais
au bout d’une petite demi-heure , on rencontre des couches de Roffi.
grès folides & verticales, courant de l’Eft Sud-Eft à l’Oueft Nord-Oueft.
Un peu plus loin, la colline paroît compofée de calcaires argil-
ieufes, en couches minces, dont l’enfemble paroît rayé, & forme un
effet affez fingulier. Ces couches fe délitent & s’éboulent comme de
Pargille purç.j
On voit enfuite au fond d’un petit ravin, a fommité des tranches
de couches calcaires folides, verticales & dirigées exaétement comme
les grès que je viens de noter,
Pr.us loin on en rencontre encore ; puis des grès tendres toujours
dans la même fituation ; enforte que toutes les couches font verticales
pendant près de trois quarts de lieue.
C e tte partie de da route que nos muletiers nomment BauJfi-RoJJl, Baufli.
eft extrêmement fauvage ; elle patfe même pour être dangereufe, & Ro®-
le ferait réellement ü on la faifoit à cheval. Ce font des terres calcaires
& argilleufes, abfolument incohérentes & en pente rapide au-
deffus de la mer. Les eaux creufent dans ces terres tous les jours de
nouveaux ravins , écornent & même fouvent entraînent en entier le
fentier étroit & inégal qui porte ici le nom faftueux de grande route ;
& dans les endroits même où ce fentier n’eft pas emporté, les tournans
courts entre ces ravins, le rendent également dangereux pour les mulets ;
parce que comme cet animal, fuivant Ton habitude , fuit exadement
le bord extérieur du chemin ; la terre qui paroît folide manque fous
fes pieds, & s’il tombe il eft perdu ; il roule infailliblement dans la
mer, fans que rien puiffe le retenir. Ces accidens font affez fréquens,
il faut donc faire cette route à pied, & alors on ne court aucun
rifque.
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