Montagnes
fertiles.
Col &
& dent de
Jaman.
%■ 1658. A trois quarts de lieues au-deiïus de'Cherlé on fort’des
bois, & on entre dans des prairies dont on commençoit alors à recueillir
les foins. Ces prairies font parfemées de granges qu’on n’habite qu’en
été. Elles font extrêmement fertiles, on ne voit le roc preique nulle
part; par-tout des bois ou des pâturages; les pentes même rapides^dës
ravins font couvertes de bois ; diveries fommités, en pyramides aiguës
font boifées jufqu’à leurs cimes. Peut-être l’air fixe ou acide carbonique,
contribue-t-il a cette fertilité; du moins la quantité de tuf calcaire
que dépofent les fources que l’on rencontre à chaque pas, prouve-
t-elle qu’il fe dégage de leurs eaux une quantité confidérable de ce gas.
§• >659. E n deux heures & demie , depuis Cherlé on vient au haut
dupafiàge de la prèmiere chaîne de ces montagnes. Cepaiïàgefe nomme
le Jaman. J1 eft au pied d’une haute cime pyramidale triangulaire que
l ’on découvre de très-loin, & qui fe nomme la Dent de Jamctn. Je
montai iur cette cime le 6 d’aout 1770. il faut près- d’une heure pour
y parvenir depuis le col. La pente eft fort rapide, on la monte cependant
fans crainte; mais, quand on regarde en arriéré, elle paraît très-
èifrayante. Un miniftre du Pays-de-Vaud, qui avoit voulu m’acçom-
pagner,, & qui étoit monté d’aiTez bon courage , ne pouvait pas fe
réfoudre à redefcendre ; nous fûmes obligés de le prendre, les uns par
les pieds, les autres par les épaules, & de le porter comme s’il eût été
mort.
L a vue qu’on a de cette cime fur le lac & fur le Valíais, eft vraiment
très-belle ; on eft cependant dominé par des. cimes plus élevées.
Je n’ai point mefuré la hauteur “de la cime, mais j’ai mefuré ceüe du
çol ou du paJfage qui eft au-deffous, <& je l’ai trouvé de 775- toifes au-
deiïus du lac, &ainfi de 762 toifes au-deflusde la mer. 1 1 )
-( 1 ) Les obfeivations du baromètre fé- . fi fon baromètre avoit été iitué au niveau
dentaire, eorrefpondantes à .ce lle s que je ( du toc: de Geneve ^ elles ont enfuite été
fa it is fur les montagnes pendant ce voyage
, ont été faites avec le plus grand foin,
à Gartigny , près de Geneve , par. M. le
Profeffeur Pi c t e t , qui tes a enfuite ré-’
duites à la hauteur qu’ elles auroient eu e s ,
calculées par ma fille', Mdme. N s Ck EK »
fuivant la formule de M. de L u e ,.p a r c e
que.la formule & le mémoire.de ¡if. TifBM-
b l f y n’avaient pas encore été publiés.
A U L A C D - E T H U N , Chap. L. 444
§. 1660. Du haut du col je defcendis dans une heure J au village Alierés ,
d’Alieres, qui dépend du canton de.Fribourg. Ce village eft élevé de & “ ’ 3
j-o; toifes au-deiïus de la mer.
À une lieue d’Alieres , on traverfe des bancs d’une pierre calcaire ,
argilleufe , mêlée de verd & de rouge; ces bancs courent à peu-près
dans la direction de l’aiguille aimantée. Une lieue plus loin, on voit
au-deiïus delà riviere des bancs encore verticaux, d’un fchifte argil-
leux, noir, mêlé de parties calcaires, qui le rendent effervefcent. Cette
riviere qui fe nomme Sane ou Sarine, & en Allemand Sanen, paife à
Fribourg & va enfuite fe jeter dans l’Aar. Delà, en demi - heure, on
vient à la Tine , par un chemin coupé dans le roc, en corniche au-
deiïus de la Sane , qui coule à ufie grande profondeur entre des bancs
calcaires qu’elle a excavés. Ces rochers préfentent des bancs de marbre
noir , les uns verticaux, les autres en défordre.
J e couchai dans une maifon ifolée de ce village, au fond d’un vallon,
entre des montagnes couvertes de forêts. L’élévation de cette auberge
eft de 417 toifes au-deiïus de la mer.
§. 1661. L e y, en partant de la Tine, je remontai d’abord la Sane, ^Pe ’*
en cheminant du côté de l’Eft. Cette riviere s’eft creufé là un lit pro- Geffenay»
fond , en coupant obliquement des bancs calcaires dirigés du Nord
Nord-Eft au Sud Sud-Oueft. Le chemin même, taillé dans le roc, pafle
fur les tranches découvertes de ces mêmes couches qui lui fervent de
pavé.
A 20 minutes de la Tine, on perd de vue ces couches, & la vallée
s’élargit. Cependant on paife encore une gorge, niais enfuite la vallée
devient toujours plus ouverte, & on y voit encore quelques roches
calcaires, dont les couches verticale* ont la même diredion que les
précédentes. •
A une heure trois quarts de la Tine, on pafle au château d’O ex,
village confidérable, dont l’églife, fituée fur une éminence en pain 8a
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