Granits
veinés décidément
horizontaux.
f l D E F O R M A Z Z A
forme paraboloïde , qui s’exfolient en lames de la même forme ; mais-
pourtant d’une maniéré irrégulière. Tandis que mon intention étoit
concentrée à obferver, ces formes , un fingulier phénomène vint m’arracher
à cette contemplation. La Toccia, dont on'fuit les bords , fe
précipite tout d’un coup avec un bruit terrible dans un précipice le
long duquel on doit la fuivre. Dans ce moment, un nuagetrès-denfe
qui s’élevoit du fond de ce gouffre, cachoit le chemin que je devois
prendre , & fembloit être une vapeur fortant d’une immenfe chaudière,
dont la chute du torrent imitoit le bouillonnement. Un bois de fapin
noir & touffu, par lequel on pénétré dans cet abîme, en rendoit l’af-
peit encore plus effrayant. Ce font ces fpeitacles auffi nouveaux qu’extraordinaires
, ces accidents inattendus, qui donnent un charme inexprimable
aux voyages dans les hautes montagnes, & qui font que
ceux qui en ont joui ne peuvent plus fupporter la monotonie des
plaines. La feule chofe qui troublât le plaiiir que me donnoit ce fpec-
tacle, étoit la crainte que ce nuage ne me dérobât la vue des montagnes;
mais heureufement il continua de s’élever jufqu’au-deflus de
leurs, cimes.
§. 1 7 4 7 . D e pu is cet endroit, la ftruiture des montagnesn’eftabfo-
lument plus douteufe ; on voit fur la gauche , à l’Eft, des affifes horizontales
parfaitement décidées. Mais fidele à mon principe , de n©
regarder comme des couches, dans les montagnes fchifteufes, que des
divifions parallèles aux feuillets des fchiftes dont elles font compo-
fées, j’attendois impatiemment l’occalion de voir de près les roches
dont étaient formées ces affifes , qui fe jSrêfentoient comme des cou*- .
ches. Cette occafion ne tarda pas ; vers le bas de la defeente, au travers
du bois noir, dont j ’ai parlé, le pied de la montagne à gauche,
eft aifément abordable. Je vis-là, & je fondai même avec le marteau,
plufieurs bancs de granit veiné, fuperpofés les uns aux autres, dans
une fituation à très-peu près horizontale, & dont les veines étaient
à peu-près parallèles aux divifions de ces bancs, tandis que les cre-
vaffes accidentelles coupoient, les unes obliquement, les 'autres p*i>
A UX I SLES BOR ROMÉ E S , CUp. IX . y®«
pendiculairement, & les veines & les bancs de la pierre. J’obfervai cependant
des couches cunéiformes; les unes ne devoient cette forme qu’à des
fentes très-obliques, par lefquelles une couche vraiment parallelipipede,
étoit divifée en deux portions cunéiformes ; mais d’autres avoient
été réellement créées fous cette forme, puifqu’on voyoit les feuillets
où les veines du granit converger vers Je fommet du coin, Mais ce
font là des exceptions ; car en général ces couches font régulières &
parallélipipedes, & l’on voit auffi dans les montagnes calcaires d »
couches qui fe terminent en forme de coin.
§. 1748. U n autre fa it, dont je trouvai la folution en examinant ces IUîAî
«granits de près & avec attention, c’eft celui de ces exfoliations que des 8xf"*
j’avois obfervées dans la vallée fupérieure. C’eft un fait connu de tous Üations de?
les mjnéralogiftes , que la plupart des pierres font plus tendres dans Êtam s’
le fein des montagnes qu’à leur extérieur , & qu’elles acquièrent à l’air
un degré de dureté fenlible. 11 fuit delà, que la partie extérieure ou
le bord de la tranche verticale d’une grande aflife de granit doit fe
durcir par le contait de l’air, tandis que l’intérieur de la même affilé
conferve un certain degré de molleffe. Et tant que les affifes inférieures
demeurent un peu molles, le poids énorme de toutes celles qui repo-
ient fur elles, doit à la longue les comprimer. Mais les parties extérieures
, durcies par le contait de l’air, ne font pas fufceptibles de la
même compreffion. Elles doivent donc s’en féparer, & former ainfi
les exfoliatioris que l’on obferve.
C e t t e explication acquiert le plus haut degré de vraifemblance l
quand on voit quelques-uns de ces grands feuillets adhérents encore
par en haut & par en bas aux couches dont ils ont fait partie, & fépa-
rés feulement par le milieu, où ils forment une efpece d’arc convexe
du côté extérieur; & l’identité de la matière ; de même que le
parellolifme de leurs veines avec celles des rochers dont, ils fe fépa*
rent, démontrent qu’ils ont été anciennement unis aVec eux.