C H A P I T R E I I I .
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D E G U T T A N N E N - A L ’ H O S P I C E D U G R I M S E L ,
Paffage §. 1679. J e partis de Guttannen, le 10 de juillet, avec l’intention
aux gra-'S d’obferver avec foin & de décrire en détail la belle montagne de
nie«. granit que j’avojs à traverfer. Mes deux précédents voyages m’avoient
fait connoître l’importance des obfervationsj dont cette montagne
peut être l’objet.
D ’a b o r d , à un petit quart de lieue de Guttannen, dans un petit
bois que l’on traverfe avant d’arriver au premier pont de l’Aar, on
retrouve les roches feuilletées ou gneifs bruns femblables à ceux que
l’on voit au-deifous de Guttannen, §. 1616. Un peu plus loin, le
roc eft un vrai granit en maife fans aucun indice de feuillets. Mal-
heureufement, il fe trouve un vuide entre les deux rochers, & ils
ne fe touchent nulle part, du moins hors de terré. On ne voit donc
point la tranfition. Cependant la roche fchifteufe paroît devenir plus
Couches d u r e & pius compacte en s’approchant du granit ; & réciproquement
nits.5 8 o n v°h dans le granit, fi ce n’eft des feuillets, au moins de grandes
couches parallèles entr’elle s,& dirigées'du Nord au Sud, exaélement
co'tnme les feuillets de la roche fchifteufe. Vers le pont, qui eft à
une bonne demi-lieue de Guttannen, ces tranches deviennent plus
diftinétes, plus fréquentes, & préfentent l’idée de couches parfaitement
décidées, toutes parallèles entr’elles, & toujours dirigées comme
les roches, feuilletées. Ces couches ne font pas tout-à-fait verticales,
elles s’appuyent un peu contre le Nord-Eft, ou comme à Chamouni,
contre le dehors de la montagne. Il eft bien vrai que quand on va
ini pied des rochers , examiner de près ces couches, on y reConnoît
quelques irrégularités ; quelques-unes, au lieu d’être parallélépipèdes,
font cunéiformes ; ailleurs deux couches diftinétes dans Une partie de
leur cours fe réunifient pour n’en former qu’une feule. Mais ces irrégularités
ne m’empêchent point de les regarder comme des couches ,
parce qu’on en voit de femblables dans des pierres calcaires, dans
des albâtres, dans des fchiftes micacés & dans des gneifs, dont la
ftratification eft indubitable.
C es granits font compofés de quartz gris demi - tranfparent, de tur(f ur “ **
feldfpath blanc prefqu’opaque & de mica noirâtre. Les grains font
allez petits dans les premiers que l’on rencontre, mais ils deviennent
plus gros à mefure que l’on s’élève fur la montagne. Ils fe divifent
fpontanément en grands fragments, dont les faces prefque toujours
planes, paroilfent enduites d’une efpece dp vernis grifâtre ou verdâtre,
très-doux au toucher. Ce vernis paroît compofé de cette terre douce
micacée, que l’on trouve dans les creux où fe forment les cryftaux,
& que M. "W e r n e r a nommée ehlorite. On apperqoit même quelquefois
les grains intérieurs du granit légèrement enduits de ce
même vernis. Sur les furfaces expofées aux injures de l’air, ou au
frottement, 011 voit que les cryftaux de feldfpath réfiftent mieux à
leur aétion que les autres parties du granit. Il arrive delà, que ces
cryftaux forment fouvent comme des clous à la furface de la pierre.
§. 1680. Je trouvai d’abord là, & enfuite fréquemment dans cette Quarte
montagne, des morceaux de ce quartz, plus ou moins tranfparent, lamelleux,
divifé en lames tantôt d’une ou deux lignes d’épaiffeur, & tantôt
beaucoup plus minces, que l’on a nommé quartz lamelleux. Ce
quartz, par fon tiflu lamelleux & par les iris qui fe forment çà &
là entre fes lames, paroît avoir quelque reffemblance avec l’adu-
laire ; cependant on ne doit point le regarder comme une efpëce
intermédiaire entre ces deux fubftances; c’eft un vrai quartz, qui ne
différé.que par fa forme du cryftal de roche, & qui n’a ni la fufi-
fcilité, ni la cryftallifation rhomboïdale de l’adulaire.M
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