D £ M A R S E I L L E
C H A P I T R E X X V I .
D E M A R S E I L L E A A I X .
«X ,. E k fortant de Marfeille, on traverfe des bancs de grès
Pin, inclinés & defcendant au Nord. Enfuite le chemin pafle, tantôt fur
des couches calcaires, tantôt fur des poudingues grofliers & peu
durs, où les roues des énormes rouliers de Provence avoient creufé
des ornieres, qui en 1787. rendoient ce chemin un des plus pénibles
& des plus dangereux de la France. On étoit étonné de voir une des
villes les plus ''commerçantes de l’Europe, annoncer fes approches
d’une maniéré fi peu favorable au commerce.
A une lieue de la ville, on a dû haut d’une colline, dans un endroit
nommé la Fifie, une très-belle vue de Marfeille, de fon port & de
fes environs,
v' D ans mon premier voyage, avec M. P i c t e t , une fecouffe violente
qu’imprima à notre voiture la chute d’une de fes roues dans une de
ces horribles ornieres, la froifla tellement, qu’à peine pût-on la conduire
jufqu’au village de Notre-Dame, fitué à une lieue de la pofte
du Pin.
I l fallut envoyer à Marfeille chercher une autre roue, & comme
il étoit nuit & que la roue ne pouvoit revenir que le lendemain, le
curé de Notre-Dame, M, M o u t t e , nous offrit très obligeamment des
lits, que nous acceptâmes avec beaucoup de reconnoiffance.
A une lieue de Notre-Dame, on traverfe de belles couches d’une
pierre
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pierre calcaire compaite ; je dis belles, parce qu’elles font planes, fermes,
bien fu iv ie s& parallèles entr’elles. Les premières montent au
Nord-Oueft, celles qui fuivent montent plus directement au Nord.
De-là, en trois-quarts d’heure , on vient à la porte du Pin, après
avoir traverfé encore une,chaîne calcaire qui -s’étend allez loin à PEU,
où elle montre quelques efcarpements relevés contre le Nord. Cette
chaîne renferme quelques cimes hautes & efcarpées, comme le Filon
du Roi. Elle fe prolonge aulfi à l’Oueft de la grande route, mais en
selargiffant beaucoup.
§. 1519. A une petite demi lieue de la pofte, auprès du6e. mille, Pin »
on traverfe des bancs de poudingues peu cohérents, compofés de fragments
arrondis de pierres calcaires, de grès & de pétrofilex repo-
fant fur des argilles, ici rougeâtres, là blanchâtres.
On defcend enfuite, en traverfant des couches calcaires inclinées
en fens contraire du terrein; celui-ci defcend au Nord, tandis que les
couches y montent.
On pafle enfuite devant le château d’Albertas, decore de belles
plantations. Nous le vîmes au mois d’avril, prefenter un heureux
mélange d’arbres chargés de fleurs, des lilas, des maronniers , des
guainiers.
DÊs-LOES, & même dès le Pin, le pays s’ouvre, & ne préfente plus
du côté du Couchant aucune montagne élevée. Les collines mêmes
font aiïez baflès pour que toute l’étendue que l’on découvre de ce
côté-là mérite le nom de plaine. C’eft cette plaine ou cette grande
vallée, qui fépare la chaîne des Alpes de celle des Cevennes.
La ville d’Aix fe montre de loin aflïfe lur la pente douce & méridionale
d une petite colline. On voit au Levant de la ville la montagne
de Ste. Victoire, qui fe prolonge de l’Eft a l’Oueft, en prefen-
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