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point encore la le haut du paffage, il faut encore monter pendant
une heure pour y parvenir, mais il n’auroit été gueres poflîble de
trouver plus haut une fituation habitable- Celle qu’occupe PHofpice
eft déjà prodigieufement fauvage ; c’eft le fond d’un vallon, ou plutôt
d un baffin entouré de cimes nues & dégradées, auprès d’un lac,
dont les eaux paroiflènt noires, à côté des neiges qui l’entourentr
& dont le nom eft aufli trifte que l’afpeâ ; on l’appelle Todten
feelen, ou le lac des morts, parce qu’on y jette les corps de ceux
qui meurent en paflànt la montagne. L’Hofpîce eft une auberge où
les gens aifés payent leur dépenfe, mais où les pauvres font reçus
gratuitement ; en partie aux dépends du pays d’Hasli, & en partie
du produit d’une collede que l’on fait à Berne, à Geneve, & dans
les pays voifins. On y eft mal logé, mais point mal nourri; j’y ai
féjourné dans mes deux derniers voyages, & j ’ai été enchanté de la
bonhomie & de la prévenance de mes hôtes, qui M'oient les plus
grands efforts pour que je fuffe chez eux le moins mal poflîble. La
moyenne, entre 4 obfervations, m’a donné 938 toifes pour l’élévation
de cet Hofpice.
fuMa°ftra I^ 1, C’s s t - lI que fe terminent les granits proprement dits \
tification3" 1,on rencontre fur ce paffage. Le haut du Grimfel, que nous
de ces gra- pailerons en continuant ce voyage, n’eft plus que des roches gra-
nitoides feuilletees ou des gneifs. Avant donc de terminer ce chapitre,
je dois réfumer les obfervations qu’il renferme.
Je fuis perfuadé, qu’un obfervateur exempt de préventions, qui
fera accoutumé à voir des couches dans une iîtuation verticale, ou
du moins très-inclinée, & qui faura que les couches des roches primitives
font fujettes à de grandes irrégularités, reconnoitra que la
très-grande partie, je dirois même les fept huitièmes des rochers de
granit, ! que l’on voit fur cette route, font décidément divifés par
couches. La direélion dès plans de ces couches, n’eft pas par-tout
la même, mais au moins eft-elle la même, fans interruption dans de
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très - grands efpaces; & ce qu’il y a de remarquable, prefque toujours
tranfverfale à la vallée. Quant à cette huitième, dont on ne
diftingue pas les couches, je dirai, que même dans les montagnes
calcaires, lorfqu’elles ont fubi des bouleverfements, on voit fouvent
de grands rochers, où on ne les diftingue pas, que jamais on ne les
diftingue, lorfqu’en étant verticales, elles préfentent leur face à l’obfer-
vateur, & qu’enfin il n’y aurait rien d’abfurde à fuppofer des couches
de deux ou trois cents pieds d’épaiffeur. Mais un homme prévenu
contre la ftratification des granits, les épluchera minutieüfement, &
ne verra que leurs irrégularités. De même fi l’on obfervoit avec un fort
microfeope un tapis velouté de la Savonnerie, on n’y verroit que des
forêts de poils -de différentes couleurs, ici par paquets, là mélangés
fans ordre; mais en le regardant à une diftahce convenable , on y
reconnoîtra le deflin le plus régulier.