avec une force proportionnée à la longueur des clés,
qu’on ferre autant qu’on le juge à-propos. On copi-
prcnd facilement que ces grapins embraffant le piëu
au-deffous de la fettion de la fcie, donnent à la machine
toute la folidité néceffaire pour ne point fouf-
frir des ébranlemens préjudiciables. Comme la grande
hauteur des montanspourroit neanmoins occafion-
ner des vibrations trop fortes, on y remédie aifément
& de maniéré à rendre la machine immobile , en appliquant
fur les montans du derrière de grands leviers
qui preffent fur le chaflis aux piés defdits montans,
& font ferrés près des crics fur l’échafaud fupérieur
par des coins de bois.
Il pourroit auffi arriver au triangle du mouvement
quelques vibrations, fi l’on vouloit fcier à une grande
profondeur : on y remédiera fans peine par une potence
de fer qui fera fixée aux deux montans à une
hauteur convenable, 6c portera une couliffe qui affu-
jettira le triangle de mouvement.
Pour faire ufage de cette fcie, il faut fe rappeller
ce qu’on a dit des différens échafauds qui la composent.
Cela pofé, lorfqu’on voudra fcier un pieu, on
commencera par déterminer avec precifion la profondeur
à laquelle il faudra le fcier fous l’étiage ; on
placera en conféquence à l’autre extrémité de la pile
deux grandes mires fixes 6c invariables ; on fera faire
une grande verge ou fonde de fer de la longueur pre-
cife du point de mire à la feétion , pour pouvoir s’en
fervir fans inquiétude à chaque opération du fciage.-
On fera enfuite defcendre au moyen des crics dont
chaque dent ne hauffe ou baiffe que d une demi-ligne,
le chaflis portant la fcie , jufqu’à ce qu’en faifant re-
pofer la fonde fur la fcie elle-même ( ce dont on jugera
aifément par l’effet de fon élaflicite ]), le deffus
de ladite fonde fe trouve exactement de niveau avec
les deux mires dont on a parlé, ainfi que le deffus
des quatre montans ou de quatre points répétés fur
iceux, pour s’affurer du niveau du chaflis 6c de la
fcie.
Toutes Cés opérations faites avec la précifion re-
quife, on faiflra le pieu avec les grapins, on vérifiera
de nouveau avec la fonde le point de feftion de la
fcie ; & après s’en être afliiré, on ferrera les grapins
à demeure : le maître Serrurier prendra la conduite
du régulateur , 6c quatre ouvriers feront jouer la
fcie.
Le fuçcès de cette machine a été%l pendant deux
campagnes , qu’en recépant les pieux à 1z 6c 13 pies
fous la furface des eaux, on n’a éprouvé aucune différence
fenfible fur le niveau de leurs ferions ; qu’on
a conftamment fcié 15 & 20 pieux par jour,& que
huit hommes ont fervi à toutes les manoeuvres du
fciage.
Pour fonder avec encore plus de folidité, il fait-
droit fonder quelques piés plus bas que le lit de la rivière,
ce qui ne fe peut qu’en faifant ufage des caifles
pyramidales fans fond, au moyen defquelles,-comme
d’un bâtard-terre,' on pourroit pouflèr le draguage
beaucoup plus bas qu’on ne peut faire fans leur fe -
cours. Ces caifles formées par différens cours de charpente
, doivent être plus larges par le bas que par le
haut, 6c entourées de palplanches à onglets folide-
ment chevillées fur les divers cours de charpente qui
forment le circuit de la caiffe. La hauteur des pal-
planches doit être égale à la profondeur que l’on veut
donner à la fondation, à prendre du deflous du lit de
la riviere, 6c non du deflous de l’eau. Aux angles
d’épaule & le long des longs côtés de la caiffe , 6c à
l?avant-bec , doivent être fixés des poteaux montans
affemblés avec les cours.de charpente qui en-forment
le pourtour ; ces poteaux font placés à l’intérieur ,
car l’extérieur de la caiffe doit être, le plus liffe qu’il
fera poflîble. Les poteaux montans, dont la longueur
doit être de deux ou trois piés plus grande que la profondeur
dé l’eau, 6c celle de la fondation fous le lit
de la riviere prifes enfemble , doivent être réunis par
des chapeaux 6c entre-toifes, fur lefquels on établira
les appontemens néceflàires pour établir les machines
à draguer, &c les fonnettes pour battre les pieux,
ainfi que l’on a fait fur les ponts fédentaires dont il
eft parlé ci-deffus. On chargera les ponts avec une
quantité fuffifante de matériaux , pour faciliter, à
mefure que le draguage avancera , la defcente de la
caiffe fous le lit de la riviere. On continuera le draguage
jufqu’à ce que le haut des palplanches en affleure
le lit : on aura par ce moyen fait une excavation
d’environ deux toifes plus large, 6c de quatre
toifes plus longue que la largeur 6c la longueur
du caiflon dans lequel on doit fonder la pile. C’efl
dans ce vuide que l’on battra les pieux, après toutefois
y avoir defcendu une grille à claire-voie, dans les
cafés de laquelle on chaffera alternativement des
pieux placés en échiquier.’ On recépera les pieux de
niveau 6c l’affleurement de ce premier grillage j avec
la machine décrite ci-deffus, à laquelle on-fera les
changemens convenables ; on remplira enfuite les
cafés vuides de la grille, 6c les vuides qui pourroient
être au-deffous., avec des cailloux , de bon mortier ,
6c de la chaux vive ; on introduira toutes ces chofes
par un entonnoir quarre, dont lé bout inférieur entrera
de quelques pouces dans les cafés vuides de la
grille , où ces différentes matières fe confolideront
comme dans une eau ffagnânte, n’étant point expofés
au courant, à caufe de l’abri de la caiffe pyramidale
6c d’un vanage du côté d’amont, s’il eft befoin. C’efl:
fur cette grille où plate-forme que l’on affoiera le
caiflon, ainfi qu’il a été expliqué ci-devant.
Après avoir retiré les parois du caiflon, on comblera
l’intervalle d’une toife ou environ qui refte entre
la pile 6c le pourtour de la caiffe, avec une bonne
maçonnerie de pierres perdues , à laquelle on fournira
le mortier par des entonnoirs. Deffus cette maçonnerie
on formera un lit de cailloux ou de libages
fans mortier, dont la furface ne doit point furpaffer
de plus d’un pie. ou deux le bord fupérieur de la
caiffe , 6c par conféquent la furface du lit de la riviere.
On enlevera enfuite les ponts établis fur les poteaux
montans de la caiffe pyramidale, on les recépera au
niveau du terrein du lit de la riviere , oîi on les enlèvera
pour les faire fervir à une autre caiffe, fi on a
eu la précaution de les ajufter à couliffes : de cette
maniéré la caiffe reliant enfabléeelle garantira 6c
la maçonnerie qu^elle .contient, 6c la fondation de la
pile, de tous affbûillemens 6c autres accidens quelconques.
On pourroit de cette maniéré fonder jufqu’à
50 ou 60 piés fous l’étiage.
Si en faifant le draguage On rencontroit fous les
palplanches ou dans l’intérieur de la caiffe quelques
çartiers de rocher , il faudroit les mettre en pièces ,
foit en fe fervant d’une demoifelle de fer ou d’un
mouton avec lequel on chafferoit des pieux ferrés ,
6c en faire enfuite le déblai. Une attention effentielle
auffi, eft de ne point embarraffer lè pié de la pile par
une digue faillante au-deffus du lit de la riviere : ces
digues en retréciffant le paffage de l’eau, ne font propres
qu’à la forcer à paffer fous la fondation, où une
pareille voie d’eau eft fort dangereufe. L’eau qui eft
fous la fondation doit être auffi ftagnante que celle
qui eft au-deffous du lit de la riviere : c’eft l’avantage
que procure la maniéré de fonder dans les eaux courantes
que nous propofons, puifque la fondation descend
Beaucoup plus bas que le lit de la.riviere.
On devroit auffi obferver de faire la maçonnerie
des piles au-deffous de l’étiage principalement, toute
entière, de pierres d’appareil pofées alternativement
en carreaux 6c boutifiès dans le travers de la pile d?un
côté à l’autre , plutôt que de remplir l’interieur de
libages -, qui ne font prefque jamais liaifon avec lès
parpins. On pourroit, en opérant ainfi, donner au
corps quarré de la pile une moindre épaiffeur, fans
cependant diminuer l’empâtement, en faifant les retraites
à chaque affife plus grandes, ou en en faifant
un plus grand nombre
Récapitulation abrégée de la fcie de M. de Vauglie. La
fcie dont nous parlons eft un affemblage de plufieurs
pièces de fer + PL X X L repréfente dans le fond
d’une riviere, fufpendu par quatre barres de fax A ,
d’environ 15 à 18 piés de longueur, portant chacune
, dans prefque toute leur longueur, des efpeees
de broches appellées goujons, qui avec les pignons
B qui s’y engrainent, mus par une clé , 6c retenus
dans un petit chaflis de fer C , attaché de vis fur le
plancher, font monter 6c defcendre horifontalement
6c à la hauteur que l’on juge à propos l’affemblage + :
à ces pignons B font affemblees des petites roues Z>, ,
près desquelles font des cliquets E pour les retenir,
qui enfemble empêchent ce même affemblage de defcendre
de foi-même : à l’extrémité inférieure des quatre
barres A font des mouilles à patte , F partie à
vis 6c partie à demeure fur un chaflis de fer com-
pofé de plufieurs longrines 6c traverfines garnies des
deux côtés G 6c H de forte tôle ou fer applati, fur
lefquelles vont 6c viennent des roulettes I pour fou-
tenir la portée des branches K , qui d’un côté font
mouvoir le chaflis double L de la fcie M , avancé 6c
reculé,[félon le befoin, par une efpece de té à deux
branchés N , évuidées par un côté, 6c mues par un
tourne-à-gauche O, placé à l’extrémité fupérieure de
la tige P , d’une des deux roues dentées Q, 6c de l’aii-.
tre arrêtées par les crampons d’une couliffe R , dont
les vibrations fe font par la branche S , d’un té retenu
par fon tourillon à l’extrémité fupérieure d’un fup-
port à quatre branches T, les deux autres branches
V du te correfpondantes par le moyen des tringles
ou tirans ATaux leviers Y , dont les points d’âppui
font arrêtés à la mouffle d’un trépié Z , arrêté de vis
fur le plancher, fe meuvent alternativement de bas
en haut 6c de haut en bas, en fens oppofé l’un à
l’autre par le fecours des leviers Y ; a font deux autres
tourne-à-gauche, arrêtés folidement à l’extrémité
fupérieure de deux tiges de fer b qui defeen-
dent jufqii’enbas, embraffent par leur extrémité inférieure
c , en forme de croiffant, chacun des pieux
d que l’on veut fcier. Il faut obferver que pour faire
mouvoir tout cet équipage 6c le conduire dans tous
les endroits où il y a des pieux à fcier, il eft retenu,
comme nous l’avons vu, par quatre tiges de fer X ,
P L X X . 6c X X I . a un chaflis formé de chaflis c t &c
de plate - formes ƒ , allant & venant en largeur fur
des rouleaux g par le moyen des treuils h , fuivant
les directions de i en k 6c de k en i, pofés fur un autre
chaflis, mais plus grand, occupant toute l’efpace ;
entre les deux échafauds à demeure l in 6c roulant
deffus aidé de fes rouleaux «, fuivant les directions '
de l ëh m 6c de 'm en L
Les pieux dont nous avons parlé ci - deffus étant
coupés pair cette machine dans le fond de l’eau à
égale hauteur, refte à pofer maintenant un grillage
furmonté de la maçonnerie d’une pile ; pour y parvenir
on fait ce grillage à l’ordinairé 6c de même :
maniéré que celui que nous avons vû PL X IX . recouvert
de plate-formes ou madriers bien ajuftés
près l’un de l’aiitre &bien calfatés enfemble afin que
l’eau n’y puiffe paffer, ce qui fait le fond d’une ef- ;
pièce de bateau PL X X I I .. que l’on met en chantier
fur des Cales A pofées fur des pièces de bois B , appuyées
fur d’autres C pofées fur des pieux D placés
fur les bords de la riviere,.ce grillage eft bordé de
plufieurs fortes de pièces de bois Ë qui y font adhérantes
, entaillées par leurs extrémités moitié par
moitié, furmontées d’autant de çoftieres, compolees
chacune de forts Madriers F, de 5 à 6 pouces d’épaif-
feur fur 10 à 1 zpouces de hauteur, en plus ou moins
grande quantité, félon la profondeur des rivières,
affemblés les uns fur les autres .à rainure 6c languette
, dont les joints font bien calfatés 6c garnis de
lanières de cuir de vache détrempées ; ces madriers
font retenus à demeure de quatre en quatre, pour
la facilité de leur tranfport., par des pièces de bois
extérieures 6c intérieures G , 6c par des fortes vis
prifes dans leur épaiffeur, formant enfemble des cof-
tieres dont les joints font ferrés de haut en bas avec
de grands boulons à vis /ftraverfant leur épaiffeur,
6c dont l’enfemble eft retenu intérieurement 6c extérieurement
de pièces de bois I , arrêtées, haut 6c
bas à d’autres K 6c L , faifant l’office de moifes garnies
de calles M 6c vis A", les çoftieres des extrémités
ne pouvant être retenues de la même maniéré à
caufe de leur obliquité, les pièces de bois Z.font af-
femblées folidement par l’autre bout à une longue
pièce O , ou à plufieurs liées enfemble, allant d’un
bout à l’autre qui les retiennent enfemble; ceci fait,
il faut avoir grand foin de boucher exactement tous
les trous, 6c lorfque l’on eft prêt de lancer à l’eau,
On fupprime les calés À , après ÿ avoir fubftitué
par - deflous, & de diftance à autre des rouleaux, 6c
on le fait enfuite rouler dans la riviere, ou ce qui eft
beaucoup mieux, on le lance à l’eau comme on le
fait pour les vaiffeaux fur les bords de la mér. Foÿer
le traité de la Marine.
Ce bateau ainfi lancé à l’eaü, ôn le conduit bien
jufte fur les pieitx que l’on a plantés, 6c où l’on veut
conftruire la pile ; on bâtit dans le fond qui eft lé
grillagé jufqu’à ce que s’enfonçant à mefure qu’il fe
trouve chargé, il vienne fe pofer de foi même fur lès
pieux ; enfuite pofé 6c appuyé folidement Ôn defferre
les éeroux des boulons H , les vis Z/, on défait les
moifes K 6c L b les cales M, les pièces de bois / , 6c
on enleve les madriers pour les affembler dé nouveau
à un, grillage de charpente pour une autre pile.
Il faut rémarquer ici qu’il n’a pas été qiieftion jufqu’à
préfent de faire des çoftieres pour ces grillages
autrement qu’on n’a jamais eu côûtume de les faire
pour toute forte de bateaux, 6t qu’ainfi faites, elles
ne peuvent fervir qu’une fois ; dépenfe, que l’on
peut diminuer par cette machine à proportion de la
quantité des piles que l’on a à conftruire, car une
fois faite on peut s’en fervir à tous les grillages de
charpente, 6c par conféquent pour toutes les piles
que l’on a à bâtir.
Des moutons & de leur conflruclion. L’ufage des
moutons, vulgairement appellésjfo/z/zm«, parce que
leur manoeuvre eft à-peu-près femblable à celle des
cloches, eft d’enfoncer les pieux. Il en eft de différente
efpece -, 6c plus commodes les uns que les autres
, félon les occafions que l’on a de les employer.
Celui marqué * PL X X . eft compofé d’un billot
de bois E , appellé mouton ou bélier, parce qu’il eft
le principal objet de cet infiniment, fretté 6c armé
de fer attaché à un cable F roulant fur une poulie G ,
que plufieurs hommes tirent par l’autre bout üT, di-
vifé en plufieurs cordages , 6c laiffant retomber alternativement
de toute fa pefanteur fur les pieux D
pour les enfoncer ; cette poulie G qui porte tout le
fardeau de cette machine eft arrêtée fondement à un
boulon, dans une chappe ( ) appuyée d’un Côté fur
l’extrémité d’un fupport ou montant I entretenu de
contre-fiches. K , pofés fur le devant d’un affemblage
L , appellé fourchette, 6c d’un autre fupport en contre-
. fiche M, pofé fur le derrière de la fourchette L , fou-
. tenu dans fon milieu par une piece de bois, debout
N , dans l’intervalle de laquelle 6c du montant / eft
un treuil 0 avec Un cordage P pour remonter avec
. peu de force le mouton E , en cas de néceffité la partie
fupérieure de la poulie eft retenue au chapeau .^