
 
        
         
		la giunte.  Ces  eerït vin^t places font remplies par des  
 nobles  d’un  âge  avance,  6c de la première nobleffe.  
 Tousles membres du college, ceux du conferl des d ix ,  
 •les  quarante juges  de la  quarantic criminelle , 6c  les  
 procurateurs de faint Marc  entrent auffi  au  prégadi  ;   
 •de  forte que-l’affemblée du fénat eft  d’environ  deux  
 cens quatre-vingt nobles, dontune partie a vo ix  délibérative  
 , 6c le refte n’y  eft que pour écouter &  pour  
 fe  former auxaffaires,  Le doge,  les conseillers de  la  
 Seigneurie  -&-1 es Juges grands , Sont les Seuls dont les  
 ^avis peuvent être balotés  , pour  éviter  la confiifion  
 qui naîtroit de la diverlité des  Sentimens  dans aine  fi  
 ^grande affemblée-oii les avis ne peuvent paffer, qu’ils  
 •n’ayent la moitié des^ voix.-Cependant ceux qui n’ont  
 pas  le droit du fuffrage , peuvent haranguer pour approuver  
 ou  pour  contredire  les  opinions que  l’on  
 propofe ; mais leurs harangues ne changent guere les  
 ■ réfolutions du lénat. 
 11 réfulte de  ce détaïl-que le prégadi repréfente une  
 parfaite ariftocratie, avec un pouvoir abfolu dans les  
 plus importantes  affaires  de  l ’état  ;  de forte  que le  
 même corps de magiftrature a , comme exécuteur des  
 lo is , toute la puiffance qu’il s’eft donnée comme  lé-  
 giflateur. Il peut ravager l’état par fes volontés générales  
 ; &  comme il a  encore  la puiffance  de  juger  ,  
 il peut détruire chaque citoyen par fes volontés particulières. 
   En un mot, toute  la puiffance y  eft une ;   
 6c quoiqu’il n’y  ait point de pompe extérieure qui découvre  
 un prince  defpotiqûe ,  on le  fent  à  chaque  
 inftant. On dira peut  -  être que les tribunaux de  Ve-  
 nile fe temperentlesuns les autres ; que le grand conseil  
 a la légiflation ; le p rég a d i,  l’exécution ; les quara  
 mies ,  le pouvoir de juger  : mais  je  réponds  avec  
 l’auteur  de VEfprit  des lois ,  que ces  tribunaux diffé-  
 rens  font  formés par des magiftrats du même corps,  
 ce qui cooféquemment  ne  fait guere  qu’une même  
 puiffance.  (L e  Chevalier DE J  AUCOURT.}' 
 PRÉGATON , f. m. terme  de Tireur d 'o r , c’ eft la filière  
 dans laquelle l’avanceur paffe le fil d’or pour  la  
 première  fois,  en fortant des  mains du  dégroffeur :  
 le demi prégaton eft la  filiere oii il le paffe pour la fécondé  
 fois. 
 P R EG E L ,  ( Géogr. mod.)  riviere  du  royaume de  
 Pruffe dont elle arrofe  la  plus  grande  partie,  étant  
 compofée de diverfes branches  qui  ont  des  fources  
 différentes, 6c  fe  réunifient  enfin dans  un foui lit à  
 quelques lieues au-deffus de Conisberg. Elle fe jette  
 près de cette ville dans le Frifch-haf. 
 PR EG E L L ,  (Géogr.  mod.)  communauté chez  les  
 Grifons, dans la ligue de la Caddée. Après avoir tra-  
 verfé le mont  Septimer, on entre dans  une  grande  
 vallée  qui  s’étend en long de  l’orient  à  l’occident ;  
 c ’eft cette vallée qui fait le pays àeProegell, ou plutôt  
 comme nous l’avons écrit Pregell, en  latin Proegallia,  
 •ainfi  appellée  par les anciens, parce  qu’il  étoit  aux  
 frontières de la gaule  cifalpine.  Quelques-uns néanmoins  
 veulent que le  nom latin foit Proejulia, &  qu’il  
 lui ait été donné  parce que le pays eft fitué aux piés  
 •des alpes juliennes.  Ce canton a été  de  tems immémorial  
 regardé pour un pays libre de l’Empire, auffi  
 fait-il une communauté  générale, qui a  le feptieme  
 rang  entre  celles de  la ligue.  Il eft affez  fertile &  fe  
 reffent beaucoup de la douceur du climat d’Italie. 
 PREGN IT Z,  (Géogr. mod.) ou  Priegrùt{ ,   comté  
 d’Allemagne, &  une des cinq parties de  la marche de  
 JBrandebourg, au-delàde l’Elbe fur  les frontières du  
 Aleckelbourg. 
 C’eft  dans  ce comté qu’eft né au commencement  
 du  xv.  fiecle,  D onngk  ou  plutôt  Thoringk  (Matthias) 
  , très-peu connu des bibliothécaires. Il parvint  
 au  généralat  de  l’ordre de  S. François, &  compofa  
 quelques  ouvrages  fur  l ’Ecriture 6c  l’Hiftoire.  Ses  
 écrits fur la Théologie font tombés dans l’oubli, parce  
 «pielafcience de la critique étoit entièrement incon- 
 •nue de fou'teins.  On  ne  fait guere plus de cas de fa  
 chronique  hiftorique ;  cependant  elle  eft parfemée  
 de traits affez curieux.  Il y  cenfure avec autant d’har-  
 dieffe  que d’aigreur , les vices des plus grands de fon  
 •tems , comme des  électeurs  eccléfiaftiques, des cardinaux, 
  des papes même.  Il ne  fait aucun  quartier à  
 l’ignorance de la plupart des évêques de ce tems-là ,   
 -non  plus  qu’aux  jubilés &  aux indulgences, dont il  
 rejette les défordres furl’avidité infatiable de la cour  
 de Rome.  Enfin,  ce  qui paraîtra  peut-être  encore  
 plus étonnant, vû l’attachement des moines à la gloire  
 de tous ceux qui  compofent  leur  ordre ,   il traite  
 •avec le dernier mépris, Jean de Cafpeftran fon confrère, 
  que l’ordre a fait canonifer depuis.  On ne fait  
 point  l’année de  la  mort  de  Thoringk ; mais  il eft  
 vraiffemblable que c’eft peu de tems  après l’an 1464- BBHHi I  .  .  11 PR É JUD IC E ,  f. m. (Ju n fp ru d .}  fignifiequelquefois  
 tort,  g r ie f,  dommage,  comme quand on dit que  
 quelqu’un fouffre un préjudice notable par le fait d’autrui. 
 Ce même  terme fert auffi  quelquefois à exprimer  
 une réferve de quelque chofe, comme quand on met  
 à   la  fuite  d’une  claufe,que  c’eft  fans  préjudice de  
 quelque autre droit ou airion. 
 PR ÉJUDICIAUX ,  frais,  (Jurifprud.')  font des  
 frais  de  contumace, que  -le  défaillant  eft  obligé de  
 rembourfer  avant  d’être  admis  à  pourfijivre fur  le  
 fond.  ( A } 
 PRÉJUDICIELLE ,   queflion,  terme  de  p a la is   ,  eft  
 celle qui pourra jetter de la lumière fur une autre, Si  
 qui par conféquent doit  être jugée avant  celle-là. S i,  
 par exemple, dans une queftion fur la part que quelqu’un  
 doit  avoir dans une fucceffion, on lui contefte  
 la qualité de parent,la queftion d’état  eft  une queftion  
 préjudicielle, qu’il faut vuider avant de pouvoir  
 décider  quelle  part  appartient  au  foi-dilant  parent. 
 PR É JU G É ,  f. m,  (L o g iq u e .}  faux  jugement  que  
 l’ame porte de  la nature  des chofes,  après un  exercice  
 infuffifant  des  facultés  intellectuelles ; ce  finit  
 malheureux  de  l’ignorance prévient l’efprit, l’aveugle  
 6c le  captive. 
 Les préjugés,  dit Bacon,  l’homme  du monde qui  
 a le plus  médité fur ce fujet, font autant de fpeftres  
 &  de phantomes  qu’un mauvais génie, envoya fur la  
 terre pour  tourmenter les hommes ;  mais  c’eft  une  
 efpece  de contagion,  qui -,  comme toutes les maladies  
 épidémiques,  s’attache  fur -  tout aux peuples ,   
 aux femmes, aux  enfans,  aux vieillards, &  qui  ne  
 cede qu’à la force  de l’âge &  de  la  raifon. 
 Le préjugé n’eft pas toujours une  furprife  du jugement, 
  invefti  de  ténèbres, ou féduit par de  faunes  
 lueurs ; il  naît  auffi  de  cette malheureùfe  pente dé  
 l’ame  vers  l’égarement, qui la plonge  dans  l’erreur  
 malgré  fa  refiftance ;  car  l’efprit  humain,  loin  de  
 reffembler à  ce cryftal  fidele,  dont la furface égale  
 reçoit  les  rayons &  les tranfmet fans altération , eft  
 bien plutôt une efpece de miroir magique, qui défigure  
 les  objets, & n e  préfente que  des  ombres  ou  
 des monftres. 
 Les préjugés, ces idoles de l’ame, viennent encore  
 ou  de  la  nature  de  l’entendement  qui donne à tous  
 une  exiftence  intellectuelle, ou  de la préocupatfon  
 du  jugement, qui tire  fon origine,  tantôt de l’obf-  
 curité des idées , tantôt  de  la diverfité  des  impref-  
 fions ,  fondée fur la difpofition des  feus ,  &   tantôt  
 de l’influence  des pallions toujours mobiles &   changeantes. 
 Il y  a des préjugés univerfels, &  pour -  ainfi -  dire  
 héréditaires  à l’humanité,  telle  eft cette prévention  
 pour les raifons affirmatives. Un homme voit un fait  
 de la nature,  il  l’attribue  à  telle  caufe ,  parce  qu’ il  
 aime mieux fe  tromper que  douter ;   l’expérience  a 
 beau  démentir fes  conjectures, la première, opinion  
 prévaut.  C ’eft  cette  maladie  de  l’entendement  qui  
 favorife  la fiiperftition &  mille  erreurs  populaires.  
 Un paffager échappe du naufrage après un voeu barbare  
 , tous les autres ont péri dans la même tempête,  
 malgré des promeffes les  plus  légitimes ; n’importe,  
 c ’eft un miracle,  comme fi la nature  ne  devoit pas  
 changer  de  cours  pour  confervér  tant  de  victimes  
 dignes  de  fa  pitié,  plutôt  qu’en  faveur  d’une  tête  
 coupable.  La  Providence  ne  veilleroit  donc  guere  
 aux intérêts  du genre humain!, . .  Mais les noms de  
 quelques heureux font  gravés  dans les  temples,  dirait  
 Diagoras,  &  la  mer  tient  dans  fes  abymes  les  
 prières perdues.  Les tombeaux couvrent  les  fautes  
 du médecin, tandis que les convalefcens publient fes  
 guérifons  prétendues.  C’eft ainfi que  l’énumération  
 des faits qui décident pour l’affirmative, nous  détermine  
 à la conclufion, avant d’examiner les faits  négatifs  
 , qui détruifent ou diminuent la force des preuves  
 pofitives. D e -là  les  erreurs  fondamentales  qui  
 ont corrompu la maffe des fciences, 6c qui femblent  
 avoir fermé pour  jamais à l’efprit humain  les  voies  
 de la vérité. 
 Autre foibleffe de l’entendement, fa précipitation  
 vers les extrêmes. Tout  eft  uniforme  dans  le  cours  
 de  la  nature ;  voilà  le  principe :  les  aftres.  roulent  
 donc  tous  fur des  cercles  parfaits ;  plus  d’ovales,  
 plus  d’ellipfes ,  conclud  le préjugé.  La nature  agit  
 toujours par les  voies  les plus fimples ;  c’eft  la  maxime  
 generale, le préjugé l’applique à tous  les faits  
 particuliers, 6c veut foumettre tous les phénomènes  
 à   cette loi.  Les  Chimiftes font tellement entêtés de  
 leurs élémens, qu’ils-11e voyent par-tout que de l’eau  
 &   du feu ; femblables à ces fanatiques agités  par  les  
 fureurs de Cyb e le , qui trou voient  à chaque pas .des  
 fleuves, des rochers, des forêts embrafés; 
 Il y  a  des  préjugés  particuliers ,  ou  de  tempérament, 
   qui  varient dans l’homme,  félon  le  changement  
 de  la  conftitution  des  humeurs,  la  force  de  
 l ’habitude, &  les révolutions de l’âge.  Si un homme  
 renfermé, depuis fa naifîânce jufqu’à la maturité  de  
 l ’âge, dans  une  caverne  fouterreine, paffoit  tout-à-  
 coup au  grand jour, quelle  foule. d’impreffions  fin-  
 gulieres exciteroit en lui cette multitude d’objets qui  
 viendraient  affaillir toutes  les avenues  de fon  ame !  
 Cet  emblème  que  Platon  imagina cache une vérité  
 bien  remarquable. En  effet, l’efprit  de l’homme  eft  
 comme  emprifonné  dans les  fens, 6c tandis que  les  
 yeux fe repaiffent du fpeCtacle de la nature, il fe  forme  
 mille préjugés dans l’imagination qui brifent quelquefois  
 leurs  chaînes, &  tiennent à leur tour la raifon  
 dans l’efclavage. 
 Il y   a  des préjugés publics  ou de convention,  qui  
 font comme î’apothéofe de l’erreur ; tel eft le préjugé  
 des  ufages  toujours  anciens,  de  la mode  toujours  
 nouvelle, 6c du langage. Un efprit pénétrant ne peut  
 développer  fes  idées faute  d’expreffions affez  énergiques. 
   Les  définitions  ne  font ni la  véritable  idée  
 des chofes, ni la véritable maniéré de les. concevoir.  
 Les objets exiftent d’un façon, nous les appercevons  
 d’une autre, &  nous ne les rendons ni tels qu’ils font,  
 ni tels  que nous les: voyons. Nos idées  font de fauf-  
 fes  images,  &   nos  expreffions  des  lignes  équivoques. 
  Il  y   a  des mots dont  l’application  eft  fi  arbi-  
 •traire, qu’ils deviennent  inintelligibles.  A-t-on une  
 âdée précife de  la fortune, de la vertu, de la vérité?  
 Quand eft-ce qu’on  fera un traité de convention fur  
 la lignification idéale des termes ? Mais ert quelle langue  
 feroit-il écrit pour être entendu de tous les hommes  
 dans le même fens ? Il faut attendre que la nature  
 ait fabriqué tous les efprits à la même trempe. 
 Enfin il y  a des préjugés d’école ou de parti., fondés  
 fur de mauvaifes  notions, ou  fur de  faux  principes  
 de xaifonnement. On peut mettre dans ce rang  cerlaines  
 impoffibilitcs que  le  tems  femble  avoir  pref-  
 crit ;  la quadrature du  cercle &  le mouvement  perpétuel, 
  chimères à trouver. L’art peut faire des mixtions  
 ,  mais  non  pas  des  générations ; ces  arrange-  
 mens imperturbables  de  la nature déconcertent  les  
 projets &  les tentatives des hommes. 
 Les  axiomes  claffiques  déroutent  les  efprits:  la  
 plupart  des  hommes  ne  favent pas voir  autrement  
 que  les  autres,  &   s’ils  l’ofoient,  que d’obftacles  à  
 vaincre  pour  abréger  les  moyens  d’inftruire?  Ne  
 fût -ce que la jaloufie  defpotiqûe  d’un corps qui traitera  
 comme un  faâleux &  un  ennemi, celui  qui ne  
 combattroit pas pour les intérêts de fa doélrine, fous  
 fes  erifeignes  &  avec  fes  armes! C ’eft  cet  efprit de  
 zélotypie  qui arrêta  long-tems,  &   qui  arrête  toujours  
 le  progrès  des  connoiffances  humaines.  Les  
 Théologiens donnant  à  Ariftote  une  efpece  de  fu-  
 prématie dans l’école, s’arrogèrent  le  droit  exclufif  
 de l’entendre &  de l’interpréter, &  firent  un afforti-  
 ment profane  des  vérités  révélées  avec les  vérités  
 naturelles ,  en  les  affujettiffantàlamême  méthode.  
 L ’appui foible &   ruineux  que fe prêtèrent  alors  la  
 raifon &  la fo i,  en s’expliquant l’une par l’autre, fit  
 confondre  les  limites  de  chaque  genre  de  notions :  
 de-là  naquit  cette  guerre  inteftine, entre les Philo-  
 fophes &  les Théologiens, qui durera peut r être  jufqu’à 
   ce :que l’ignorance  &  la barbarie viennent une  
 fécondé fois des antres du Nord, pour enfeveür toutes  
 les querelles des favans  dans la ruine des empires. 
 Les fources des préjugés font encore dans  les paf-  
 fions ; l’entendement ne  voit rien d’un oeil fec &  indiffèrent, 
   tant  l’intérêt  lui enimpofe.  Ce  qui  nous  
 plaît eft toujours v rai,. jufte, utile, folide  &   raifon-  
 nable. Ce qui eft difficile eft  regardé comme  inutile  
 pour ménager la vanité, ou  comme impoffible  pour  
 flatter la pareffe. L’impatience craint  les lenteurs dé  
 l’examen ; l’ambition ne peut fe contenter d’une  ex  
 périence  modérée,  ni  d’un  fuccès médiocre ;  l’orgueil  
 dédaigne  les  détails  de  l’expérience, 6c  veut  
 franchir d’un faut  l’intervalle  qui.fépare  les  vérités  
 moyennes des vérités fommaires ; le refpeft humain  
 fait éviter la difcuffion de certaines queftions problématiques  
 ;  enfin  l’entendement eft  fans  ceffe  arrêté  
 dans fa marche, ou troublé dans fes  jugemens. 
 Les fens nous en impofent, fi nous ne jugeons que  
 d’après l’impreffion des objets, qui varie avec les difi  
 pofitions  de nos organes. Les  objets  plus  importans  
 ne font fouvenî que de légères impreffions, &  pour  
 notre malheur, le méchanifme de tout le mouvement  
 dépend  de  ces refforts délicats  qui  nous échappent. 
 Chacun  bâtit dans  fon  cerveau un  petit univers  
 dont il  eft  le centre ,  autour  duquel roulent  toutes  
 les opinions qui  fe croifent, s’éclipfent, s’éloignent,  
 &   fe  rapprochent au gré  du  grand mobile,  qui  eft  
 l’amour-propre. L a  vérité brille  quelquefois  parmi  
 ces notions confufes qui s’entre-choquent ; mais elle  
 ne fait que paffer un inftant, comme lefoleilaupoint  
 du midi, de forte qu’on la voit fans  pouvoir la faifir  
 ni fuivre fon cours. 
 Un des préjugés de l’amour-propre, c’eft de croire  
 que  l’homme  eft  le  fils uniquement  chéri de  la  nature  
 ,  comme le modèle de fes opérations. On  fup-  
 pofe qu’ elle ne pouvoit faire un plus  bel  animal, ni  
 rien de plus merveilleux que les produirions de l’art,  
 de-là cette  plaifante hérefie des  antropomorphites,  
 ces  pieux  folitaires,  qui  fans  doute  exterminoient  
 leur  face ,  ne croyant  pas  affez  honorer Dieu  s’ils  
 ne lui prêtoient une figure humaine. 
 Que  l’homme  donc  dépofe  fes  préjugés, &  qu’il  
 approche de-la nature avec des yeux &  des fentimens  
 purs, tels qu’une vierge modefte a le don  d’en infpi-  
 re r , il la  contemplera dans toute fa beauté, &  il méritera  
 de jouir du détail de fes charmes.  ( D .  ƒ , )