
tous les ans à d’aufli grandes fommes qu’ il en fan droit
pour maintenir fur pié une armée de quarante mille
nommes. > #
Il n’y a point de pays en pareille etendue a celui-,
c i , où l’on voye un fi grand nombre de belles villes,
de bourgs 6c de villages , ni une fi grande quantité
d’habitans , que la liberté 6c le commerce y attirent.
On peut dire aufli que la liberté y fait fleurir les arts
& les fciences ; c’efi dans cette vue que l’on entretient
plufieurs univerfités, 6c un nombre infini d’écoles
dans les v ille s, 6c jufque dans les moindres
villages, où les habitans ont grand foin de faire.infi
truire leurs enfans.
La religion proteftante eft la dominante dans les
Provinces-unies, mais toutes les autres y font tolé-.
rées 6c protégées. Les Catholiques ont leurs chapelles
aufli libres que lgs églifes des réformés > 6c du
refte , ils jouiffçnt des mêmes prérogatives que les
proteftans par rapport à la juftice, au commerce,
& aux impôts. Ils peuvent parvenir à tous les emplois
militaires, excepte celui de velt-marechal ; il
faut bien qu’ils foient contens de la douceur du gouvernement
à leur égard, puifqu’on eftiipe qu’ils font
plus du quart des habitans. ^
Il n’y a.point encore de. pays au monde où les
impôts foient plus confidérables, que dans les Pro-
vinccs-unies ; car on compte qu’ils font le tiers du prix
qu’on paye du pain, du v in , de la bie re , &c. cependant
ils fe lèvent d’une maniéré que le petit peuple
ne s’en apnerçoit point, parce qu accoutume de tout
tems à voir le prix des denrees fur ce pie-là, il n y
trouve rien qui l ’effarôuche ; on nomme cçs impôts
a ccifes, 6c perfonne n’en eft exempt.
On leve en outre plufieurs autres taxes , comme
fur le f e l , le favon , le caffé , le thé , le tabac, 6c
enfin fur toutes les denrées quife confomment dans
le pays. Il y a une taxe annuelle fur chaque domefti-
que ; fur les chevaux, les carroffes, les çhaifes &
autres voitures, 6c fur les bêtes à cornes,
Une autre taxe confidérable eft celle qu’on appel*
le verponding, o u la taille fur les maifons 6c fur les
terres. Dans des befoins preffans, on double ou tri
pie çe verponding. Dans ces mêmes c a s , on leve le
centième 6c le deuxcentieme deniers de la valeur de
tous les biens des habitans , tant en fonds de terre
qu’ en obligation fur l’état. On leve aufli une taxe fur
toutes les terres enfemencées , on la nomme bi{aay-
geld; mais elle n’a lieu que dans les pays de la géné-
néralité , 6c dans les provinces qui produifept du
grain.
Le quarantième denier qu’on tire de la vente de
tous les biens en fonds de terre, des vaiffeaux 6c des
fucceffions collatérales , eft un revenu confidérable,
aufli-bien que le papier timbré. Les droits d’entrée
& de fortie font fort tolérables ; ils font perçus par
les cinq colleges de l’amirauté, qui çn ont fait un
fonds pour l’entretien de la marine.
Les revenus ordinaires de la république , confiftent
en ce qui fe leve dans les pays de la généralité
, dont le çonfeil d’état a feule l’adminiftration ;
ou bien dans les fommes ordinaires 6c extraordinaires
, que les fept Provinces 6c le pays de Drenthe
fourniffent tous les ans, fuivant leur contingent, fur
la pétition ou la demande que le confeil d’état en fait
aux états généraux , pour la dépenfe qu’il juge que
la république fera obligée de faire l’année fuivante.
Les forces de l’état confiftent en cinquante mille
hommes de troupes réglées, 6c en trente à qùa-r
rante vaiffeaux de guerre qu’entretient l’amirauté.
La fource du commerce des Provinces-unies eft la pêche
du .hareng, les manufactures qui occupent beaucoup
de monde ; 6c enfin le commerce de l’Orient,
jque fait la compagnie de ce nom.
Les états-généraux repréfentent les fept Provincesunies,
mais ils n’en font point les fouverains, com*
me la plupart des étrangers fe l’imaginent ; 6c. leur
aflemblée a quelque rapport à la diette de Ratisbon-.
ne, qui reprefente tout le corps Germanique. Quoiqu’ils
paroiflent revêtus du pouvoir fouverain, ils ne
font que les députés, ou plénipotentiaires de chaque
province , chargés des ordres des çtats leurs principaux
; 6c ils ne peuvent prendre de réfolution fur
aucune affaire importante, fans avoir eu leur avis 6c
leur confentement. D ’ailleurs , on peut confidérèr
l’union des fept Provinces, comme celle de plufieurs
princes qui fe liguent pour leur fureté commune,
fans perdre leur louveraineté ni leurs droits en entrant
dans cette confédération. Ces provinces forment
enfemble un même corps ; ils n’y en a pas une
feule qui ne foit fouveraine 6c indépendante des atir
très, 6c qui ne puiffe faire de nouvelles lois pour fa
confervation, mais fans pouvoir en impofer aux au-*
très.
L’affemblée des états ? généraux eft compofée de
députés des fept Provinces ; on leur donne le titre de
hauts & puijfans fcigrieurs , à la tête des lettres qui
leur font écrites , des mémoires 6c des requêtes qui
leur font préfentés , 6c on les qualifie dans ces mêmes
écrits de leurs hautes puijfances ; tous les fouve-i
rains leur donnent aujourd’hui ce titre.
Le nombre des députés n’eft ni fix é , ni égal ; chaque
province en envoyé autant qu’elle juge à-p ropos
, 6c fe charge de les payer. On ne compte pas.
les fùffrages des députés, mais ceux des Provinces ;
de forte qu’il n’y a que fept v o ix q u o iq u e le nombre
des députés de toutes les Provinces, préfens ou
abfens, monte à environ cinquante perfonnes, dont
il y en a entr’autres dix-huit de Gueldre,
Chaque province préfide à fon tour , & fa préfi-
dence dure une femaine entière, depuis le Dimanche
à minuit jufcju’à la. même heure de la femaine
fuivante. Tous les députés font afîis, fuivant le rang
de leur province autour d’une longue table , au milieu
de laquelle eft le fauteuil du prefident. A fa droite
font aflis les députés de Gueldre , à fa gauche ceux
de Hollande , 6c ainfi des autres fuivant le rang des
Provinces qui eft tel. Gueldre, Utrecht, Hollande,
Frife, Zélande, Overiffel, Groningue.
Tous ceux qui poffedent des charges militaires,
ne peuvent prendre féance dans l’affemblée des états-
généraux; le capitaine général n’eft pas même exempt
de cette loi, il peut feulement entrer dans l’aflemblée
pour y faire des propofitipns, & il eft obligé de fe
retirer, lorfqu’il s’agit de délibérer fur ce qu’il a pro-
pofé. Quelqiie grand que foit le nombre des députés
, il n’y a que fix cnaifës pour chaque province.,
6c tous les furnuméraires font obligés de fe tenir debout,
La plupart des députés ne font que pour trois, ou
fix ans dans l’affemblée des états-généraux, à-moins
que leur commifîion ne foit renouvellée. Il en faut
excepter la province de Hollande, qui y députe un
membre de fes nobles pour toute la vie , 6c celle
d’Utreçhtqui envoyéun député du corps eccléfiafti-
q u e , 6c un autre .du corps de la noblefle qui y font
aufli à vie. Il en eft encore de même des députés de
Zélande qui font .ordinairement au nombre de quatre.
Outre les députés .ordinaires , tous ceux qui font
çhargés d’une ambaffa.de, ou de quelque négociation
importante dans les -pays étrangers , ont une com-
milfion pour entrer dans l’affemblée des états-généraux.
Le confeiller - penfionnaire de Hollande , aflifte.
tous les jours à cette aflemblée,, en qualité de député
ordinaire , 6c c’eft lui qui y fait les propofitions
eje la part de cette province. Il eft le feul avec le
députe de la noblefle d’Hollande, qui ait l’avantage
de paroître tous les jours dans ce fénat. Tous les au--
très députés dé cette province font obligés par Üiîe
réfolution de l’an 16 5 3 , d’avoir une commiflion pour
y aflifter ; deux conseillers députés de Hollande y
prennent aufli féance tous les jours tour-à-tour. ^
La charge de greffier où fecrétaire des états-générau
x , eft une des plus importantes 6c des plüs one-
reufes de l’état. Il eft obligé d’aflifter tous les jours
à l’affemblée des états-géneraux, d’ecrire toutes les
réfolutions qu’ils prennent, toutes les lettres 6c les
inftru&ions qu’on adreffe aux miniftres de l’état dans
les pays étrangers. Il aflifte aufli aux conferéiicés
qu’on tient avec les miniftres étrangers, 6c y don*
ne fa vo ix ; c’eft lui qui expédie 6c fceile toutes les
commiflions des officiers généraux, des gouverneurs
6c commandans des places, les placards, les ordonnances
des états - généraux , & autres aétes. Il eft
nommé à cette charge par les états-généraux ; il a
fous lui un premier commis, & deux premiers clercs
u’on nomme aufli commis, avec un grand nombre
è clercs ou d’écrivains qui travaillent tous les jours
au greffe, qui eftjproprement ce qu’on appelle dans
d’autres pays là fecrétairerie d'état.
Il y a des députés des états-généraux qui font envoyés
en commiflion pour changer ou renouveller
les magiftrats , ou pour quelqu’autre affaire. Ils ont
dix florins par jour pendant, tout le tems de leurs
commiflions , outre les frais de leurs voyages. Les
états-généraux envoyent aufli tous les deux ou trois
ans deux députés à Maftricht, avec le titre de com-
mijfaires décifeurs , pour terminer avec les commif-
faires du prince de Liege, les procès 6c les autres
affaires, 6c leur jugement eft fans appel.
Le confeil d’état a fon tour pour nommer les com-
miffaires décifeurs, qui font aufli chargés du renouvellement
des magiftrats de la ville de Maftricht 6c
des juges des environs. En tems de guerre, les états-
généraux envoyent deux députés a l’armée , 6c le
confeil d’état en envoie un autre ; ils ont chacun 70
florins par jour. Le général en chef ne peut livrer
bataille, ni former un fiege, ni faire aucune entre-
prife d’éclat, fans leur avis 6c confentement.
Comme par l’union d’Utrecht, les fept Provinces
fe font refervé l’autorité fouveraine, leurs députés
, qui forment l’âffemblée des états-généraux, ne
peuvent rien conclure dans les affaires importantes ;
ils ne peuvent faire la guerre ou la paix fans un confentement
unanime de toutes les Provinces, que l’on
confulte auparavant. Le même confentement eft né-
ceflaire pour levér des troupes ; leurs lois doivent
être approuvées par les Provinces : ils ne peuvent révoquer
les anciens réglemens, ni élire un ftadhou-
der ; & chaque province a la même difpofitiôn de
tous les régimens, 6c des officiers de fon reffort.
Outre l’aflemblée ordinaire des états-généraux, il
s’en eft tenu quelquefois une extraordinaire , qu’on
nomme la grande ajfemblée, parce qu’elle eft compofée
d’un plus grand nombre de députés de toutes les
Provinces , que la première. Cette aflemblée n’eft
jamais convoquée que du confentement unanime de
toutes les Provinces, pour délibérer fur des affaires
de la derniere importance pour la république ; elle
eft fupérieure à celle des états-généraux. Cependant
les députés qui la compofent ne peuvent rien conclure
, fans l’avis 6c le confentement de leurs Provinces.
.
Le confeil d’état ne fe mêle que des affaires militaires
& de l’adminiftration des finances. Il eft com-
pofé de douze confeillers ou députés des Provinces,
qui font un de Gueldre, trois de Hollande, deux de
Zélande», un d’Utrecht, deux de F rife, un d’Ove-
rifîe l, & deux de Groningue 6c des Ommelandes.
D e ces douze députés, il n’y en a que trois qui foient
à vie ; favoir, celui qui eft nommé par le corps des
nobles d’Hollande, 6c les deux de Zélande. Les au-
Tome X I I I .
tres n4y font ordinairement que pour trois ans; Après
avoir été nommes par leurs Provinces, ils prêtent le
ferment aux états-généraux, 6c ils reçoivent leurs
commiflions de leurs hautes-püiflances.
Il n’en eft pas de mêmé dü confeil d’étàt que de
l’aflemblée des états-généraUx, ear on y compte les
fùffrages des députés , 6c non ceux des provinces, 6c
la prefi.denee , qui eft d’une femaine , roule tour-à-
four eftïre les douze députés fuivant leiir rang. Outre
ces députés, le tréforier-général a le titré de confeil-
1er d'état. C ’ eft un officier a vie , 6c il a féance au coh-
féil d’état. Il eft en quelque manière lé contrôleur
général des finances : il a l’infpeéliôn fur là conduite
du confeil d’état, mais plus particulièrement fur l’àd-
miniftration du receveur-géneral, 6c des autres recë-
veursfiibalternesde la généralité. Il ne peut s’âbfenter
de laHaië farts là permiflion des états-généraux.
La chambré des comptés de la généralité fut établie
en 1607 du confentement des fept Provinces ,
pour foulager le confeil d’état dans la direction des
finances. Cette chambre eft compofée de deux députés
de chaque province , qui font le nombre de quatorze,
6c qui ordinairement changent de trois en trois
ans, fuivant le bon plaifir des provinces. Les fondions
de ce college confiftent à examiner 6c arrêter les
comptes du receveur-général des autres receveurs
de la généralité 6c de tous les comptables. On donne
aux députés qui compofent cette chambre les titres
de nobles & puijfansJeigneurs.
La chambre des finances de la généralité a été établie
avant celle des Comptes, 6c eft compofée de quatre
commis 6c d’un fecrétaire, qui font nommés par
les états-généraux. Il y a un clerc ou écrivain. Cette
chambre eft chargée de régler tous les comptés qui
regardent les frais de l’armée , de tous les hauts &
bas officiers, de ceux de l’artilleriè, des bateaux, des
chariots, des chevaux, &c. comme aufli de ceux qur
ont foin des munitions, des vivres de l’armée , 6c de
tout ce qui fert à fon entretien & à fa fubfiftance.
Toutes les provinces, en s’uniflantpour former en-
tr’elles une feule république, fe font réfervé le droit
de battre monnoie., comme une marque eflentielle
de leur fouveraineté particuliere, mais elles font convenues
en même tems que la monnoie de chaque province
, qui auroit cours dans toute l’étendue de la république
, feroit d’une même valeur intrinfeque. Pour
î’obfervation d’un fi jufte réglement, on établit à la
Haye une chambre des monnoies de la généralité,
compofée de trois confeillers infjie&eurs généraux,
d’un fecrétaire 6c d’un effayeur général. Cette chambre
a une infpe&ion génerale nir toute la monnoie
frappée au nom des états-généraux ou des états des
provinces particulières , de même que fur toutes les
efpeces étrangères.
Parle réglement des états-généraux en 1597 , l’amirauté
des Provinces-Unies a été partagée en cinq colleges
; favoir trois en Hollande, qui font ceux de
Rotterdam, d’Amfterdam, Horn & Enkhuifen alternativement
, un à Middelbourg en Zélande , un à
Harlingue en Frife ; 6c les droits d’entrée 6c de fortie
font levés au profit du corps entier de la république
pour l’entretien des vaiffeaux de guerre, 6c autres
frais de la marine. Chacun de ces colleges eft compo-
fé de plufieurs députés, tirés partie des provinces où
les colleges font établis , 6c partie des provinces voi-
fines. Il n’y a point d’appel de leurs fentences pour
ce qui concerne les fraudes des droits d’entrée 6c de
fortie , & les différends fur les prifes faites par mer,
aufli-bien que dans les caufes criminelles ; mais dans
les caufes civiles où il s’agit d’une fomme au-delà de
fix cens florins , on peut demander revifion de la fen-
tence aux états-géneraux.
Lorfque les etats-généraux , de l’avis du confeil
d’état, ont réfolu de faire un armement naval, 6C
Y v y