hérissés d’épines, qu’on cueille les meilleurs fruits. L ’Égyptien s’est
montré cf abord peu sensible à l ’expulsion des Mameluks, parce que
l ’habitant des campagnes n’a vu dans les Français que des maîtres
nouveaux ; l’habitant des villes a craint pour safortune ; le Musulman
s’est cru humilié en obéissant à ceux qu’il méprisait auparavant ;
le Cophte n’a pu envisager qu’avec effroi le terme de ses déprédations;;
l ’Arab e , en un mot, devait s’opposer à-l’établissement de
ceux qui ne voulaient ni permettre ni tolérer ses brigandages (1).
Cependant, quoique les Français aient évacué ce poste important,
quoique le besoin de la paix les ait contraiuts à abandonner leur
conquête, leur expédition n’a pas moins appris combien il est aisé
de s’emparer de l’É gypte, et combien il serait facile de s’y maintenir
malgré les Turcs , les Arabes et les Mameluks, malgré les
Anglais même, si le reste de l’Europe toutefois voulait .y prendre
p a r t , s’il voulait se prêter à renouveler peu à peu la population
d’un pays que les préjugés des habitans aveuglent au point de méconnaître
leurs véritables intérêts.
Tontes les nations civilisées sentiront peut-être un jour combien
il serait important pour elles d’expulser de l ’Égypte une race d’hommes
qui la déshonore depuis bien des siècles, et dont l’instinct fut
toujours de paralyser ou de détruire. L ’humanité, autant que la
politique, doit les engager à établir sur cette terre aujourd’hui si
malheureuse, une nation nouvelle , indépendante, éclairée , qui
s’amalgame avec celle du pays, qui ouvre ses ports , permette le
libre passage de toutes les marchandises, et laisse à l’industrie humaine
tous les moyens de se déployer.
Mais un peuple commerçant, me dira-t-on, s’y opposera, parce
qu’il veut mettre des entraves à l’industrie des autres peuples , parce
qu’il ne veut pas permettre que d’autres vaisseaux que les siens parcourent
là vaste étendue des mers, parce qu’il ne veut pas que les
productions de l’Orient soient échangées avec celles de l’Occident
(i) Toutes les classes , frappées de la bonne discipline des Français et de la justice
dte leurs chefs, s’étaient accoutumées à leur gouvernement. Les avanies étaient
sévèrement défendues , les impâta exactement répartis, lee choses sacrées religieusement
respectées.
par tout autre que par lu i, parce qu’il prétend, eil un m o t q u e
l’empire des mers appartient à lui seul.
Que l’Egypte, en ce cas, reste plongée d'âriè la barbarie; què’M
ports d Alexandrie soient comblés ; qike les canaux Soient obstrués ;
que le sable des déserts frappe les terres de stérilité : ht route du
Cap de Bonne-Espérance reste ouvert», et les Anglais se chargent
seuls de la navigation du globe.
Mais non : l’intérêt de tous prévaudra têt ou tard sur lés intérêts
d un seul ; la route de l ’Inde par ia Mer-Rouge est si courte , la
navigation si peu périlleuse, lé'terme du voÿâge Si • certain , lès
points de repos Sont si bien situés, l’es-moussons si constàritès > si
régulières, qu il faudra bien un jour lui donner la préférence sur
1 autre. Quels avantages d’ailleurs ne présenterait pas l’Égypte pour
les provisions et les rafraîchissemens de toute espèce dont tout navire
a besoin après plusieurs jours de navigation ! Quels'avantagés
ne résulteraient pas d’un entrepôt commun, d’un marché général
situé au point le plus central de toutes les nations !
S il on voulait encore plus favoriser les communications cles deux
mers, économiser quelques frais sur les transports, se soustraire
aux infidélités des Arabes, éviter surtout le dangereux passage dit
Bôgas, on n ’aurait qu’à rendre le canal d’Alexandrie navigable
toute l ’année, eil ouvrir un antre, par le'Cairfe; du Nil à Su esîÿ
former un port dans le la c Menzâlé, et faire Communiquer directement,
par ce lac , la Méditerranée-avec la Mer-Rouge. Il faudrait
peupler les rives de ces canaux, et empêcher que les sables ne
vinssent les combler.
Quelques voyageurs ont fait craindre la différence du niveaU des
eaux dés deux mers , quelques-uns même ont porté à vingt-cinq
pieds cette différence. Mais ils n’ont pas fait attention que si là
Méditerranée était plus basse que l’Océan, il y aurait une pente au
détroit de Gibraltar, d’autant plus rapide, que le niveau des eau*
de la première serait plus bas. On les verrait se porter de l’une k
l’autre, comme on les v o it , sur le Bosphore et: l ’Hellespont, se
porter de la Mer-Noire à l ’Archipel. On remarque bien, il est vrai,
deux courans à ce détroit, l’un rentrant, qui suit la côte d’A frique,,
et l ’autre sortant, qui se fait remarquer sur la côté d’Europe; mais