II y a encore vingt métiers pour les dimittes rayées de bleu. Elles
se consomment en Égypte : il en passe fort peu en Barbarie.
Il y a cinquante métiers pour les toiles de lin , dites mctugre-
bines. On en fait des chemises, des cousinières, des rideaux. Elles
passent en Barbarie et dans tout le Levant. On en fait aussi de
fines, rayées de bien ou de rouge , plus particulièrement destinées
à des rideaux et à des cousinières.
Il y a trente métiers pour des toiles de coton, larges et grossières,
employées à la doublure d’habillemens orientaux. On en teint
quelques-unes en rouge. Elles se consomment en Égypte.
On fabrique des serviettes unies en lin, dites fo u te s : elles sont
courtes et étroites, et se consomment dans le pays.
Le coton-employé aux fabriques vient de Chypre, de Syrie et
de Damanhour. On apporté de cette dernière ville une grande quantité
de coton filé, dont une partie est employée aux étoffes fines,
et l’autre est envoyée à Marseille et à Livourne. Le coton filé grossier
est apporté par lés fellahs des villages voisins. Il n’y a a Rosette,
dans ce moment, que huit filatures.
On apporte aussi de ces villages, des fagots de lin pour les faire
nétoyer, et les rendre propres à être emballés. I l y a douze magasins
qui emploient chacun à cet objet environ trente ouvriers.
Ce lin passe à Alexandrie , d’où il est transporté à Livourne, à
Constantinople et en Barbarie.
Il y a douze fabriques où l’on extrait l'huile de lin , et quatre
où l ’on extrait l’huile de sésame : ces deux huiles sont consommées
dans le pays. Les fellahs n’en connaissent pas d’antre, tant pour
manger que pour brûler. Il n’y a que les riches qui mangent l’huile
d’olive, qu’on apporte de Tunis et d’A lger. Le marG des huiles de
lin et de sésame sert à la nourriture des boeufs, des buffles., des
moutons et des chèvres. On mêle l’huile de lin avec la poix que l’on
tire de Mételin et de la Caramanie, pour en faire une sorte de
goudron.
Il y a cinquante fabriques occupées à nétoyer le riz que l’on
récolte dans le territoire de Rosette : trente se servent dé boeufs ou
de buffles pour tourner les roues ; les vingt autres emploient des
hommes.
hommes. Dans celles-ci le riz n’est pas si bien nétoyé, et n’acquiert
pas la blancheur qu’on parvient à lui donner dans les autres. On
est ici dans l’usage d’ajouter au riz environ un sixième de sel marin.
On évalue à cent cinquante mille ardebs (1) la quantité de riz
que Rosette fournit annuellement, et à cinq cents ardebs la quantité
d’abélasis qu’on y récolte. Le premier passe presque tout à
Constantinople ; le second se répand dans l’intérieur de l’Égypte :
on en porte une très-petite quantité en Syrie et à Constanti-
nople. Il sort également une très-grande quantité de dattes et de
citrons.
Parmi les objets d’histoire naturelle que nous avons eu occasion
de remarquer à Rosette, l’ichneumon (2) doit tenir le premier
rang. Il est connu sous le nom de rat d e P hara on> et vénéré pour
ainsi dire comme un être bienfaisant. Il fréquente les jardins, les
prés et les rizières ; mais il se tapit plus volontiers parmi les j oncs
et les roseaux, d’où il s’élance sur les poules d’e au , les hérons,
les canards, et sur tous les oiseaux aquatiques. Il se nourrit aussi
de grenouilles, de lézards et de serpens. Il nage avec facilité au
moyen de ses- pieds un peu palmés, entre dans les canaris, et y
attrape souvent des poissons, dont il est très-friand. Il se glisse
quelquefois dans les poulaillers, y mange les poules et leurs oeufs!
Aussi adroit et peut-être aussi patient que le c liaf, il diminue le
nombre des rats, qui se multiplient beaucoup en Égypte. On nous
a assuré que, dans le Saïd, l ’ichneumon était gardé dans les maisons
pour y détruire ces animaux incommodes et malfaisans. Nous
avons appris aussi d’un capitaine de navire, qu’unichneumon mis
à son bord avait dans peu de joins détruit tous les rats qui s’y
étaient extraordinairement multipliés.
Quel que soit le merveilleux que les Grecs ont répandu sur l ’his-
toiré de l’ichneumon, il est bien certain qu’il ne fait point d’autre
mal au crocodile, si ce n’est de dévorer ses oeufs. C’est peut-être
(1) L’ardeb de riz pèse de quatre cent soixante-dix à quatre cent quatre-vingts
livres t poids de Marseille.
(2) Viverra ichneumon. Linn. Grande mangouste deBuffon.
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