que celle des murs. On a employé des briques durcies au soleil, et
liées les unes aux antres au moyen d’une terre broyée avec de la
paille hachée. Un chaume très-serré couvre ces briques, et les
met à l ’abri de l ’intempérie de l’air.
Le 8 ventôse, après cinq heures de marche, nous arrivâmes aux
grottes de C harmelik. A u milieu d elà route, nous vîmes, à gauche,
un village nommé Turcmen-Keuil, village de Turcomans ; nous
laissâmes, demi-heure après, à droite, un autre petit village nommé
Choba n~ Begui.
Il n’y a-point d’eau aux environs des grottes : on va la prendre
au petit village de CharmeUk, situé à un quart de lieue à gauche.
T ou t le terrain est calcaire, en plaine : il y a au dessus des grottes
un coteau peu élevé. Avant d’arriver, nous avons marché pendant
un quart d heure sur un terrain tout parsemé de pierres volcaniques
, solides, noires, de différentes grosseurs.
Nous voyions de tems en tems des huppes et des hirondelles,
qui sont ic i, comme en Europe, des indices certains du retour du
printems.
Le y , après neuf heures de marche, nous vînmes coucher au
petit Mizier. Nous traversâmes un ruisseau, ensuite une petite
rivière que les pluies grossissent quelquefois au point que les voyageurs
sont obligés d’attendre, pendant un jour ou deux, que les
eaux se soient écoulées. On les nomme K u chu c et Ëuyuc Sajour
(le petit et le grand Sajour). On en dérivé les eaux pour arroser
quelques champs : ils vont tous deux se jeter dans l’Euphrate.
Une lieue avant d’arriver à M iz ie r , nous vîmes à gauche, sur '
une petite hauteur, un village nommé Ourrel. Le terrain ici devient
inégal et crayeux ; il baisse insensiblement jusqü’à l ’Eu-
phrate : depuis A le p , au contraire , il est en plaine, et nous a
paru s’élever.
A u bas de Miz ier coule un ruisseau qui arrose un petit vallon.
Les environs sont plantés d’oliviers un peu moins grands que ceux
de la partie orientale de la Provence : on voit aussi quelques arbres
fruitiers.
Le 10, après six heures de marche , nous arrivâmes à l’Euphrate,
vis-a-vis Birt ou. Biridgek. A deux lieues du fleuve, nous laissâmes
à gauche le grand M iz ie r : nous vîmes, tout autour de ce
village, beaucoup d’oliviers : ils y étaient plus élevés et plus vigoureux
qu’au petit Mizier.
Nous passâmes le fleuve sur un bac que l’on dirigeait par le moyen
d’un gouvernail et d’une longue perche. Il était mal construit et
entièrement ouvert en avant. Toute la caravane voulut passer à la
fo is , de sorte qu’il se trouva tellement plein d’ânés, de chevaux,
d’hommes et de bagage, que l’eau entrait par intervalles. Héureu-
sement il faisait calme, et le passage fut prompt. Si nous étions
restes deux minutes de plus , nous aurions certainement coulé
bas.
L ’Euphrate, à B ir t , peut être comparé au Rhône par la quantité
de ses eaux et leur rapidité. Il grossit considérablement au commencement
du printems, parce qu’il pleut beaucoup dans cette
saison, et que les neiges de l ’Arménie fondent presque subitement.
Il grossit aussi en automne lorsque les pluies tombent en abondance
dans l ’Arménie inférieure.
Le B ir t , nommé par les Turcs Biridgek ,. et par lés Anciens
Birtha, est une petite ville, dont la population peut être évaluée
à trois ou quatre mille habitans : elle est située en pente, sur une
colline crétacée, et est entourée d’un mur en assez mauvais état»
On voit au bas de la ville, sur des rochers, un château qui tombe
en ruiné, et qui ne semble avoir été bâti là que pour einpêelier
ou protéger le passage du fleuve. Nos armes, nos effets, nos personnes
, excitaient beaucoup la curiosité des habitans de cette
ville. Les commis de la douane admirèrent surtout un fusil à deux
coups , que nous eûmes de la peine à retirer de leurs mains. Nous
avions caché nos pistolets à deux coups, sur l ’avis de notre montre
, de crainte que le douanier ne les trouvât de son goût et ne
voulût s’en emparer.
Le caravanserai dans lequel nous vînmes lo g e r , est hors de la
ville ,-à sa partie supérieure : il est taillé dans la roche calcaire, et
est assez vaste pour recevoir deux caravanes. Il y à auprès de là
diverses grottes qui servent également de réfuge aux voyageurs.