une autre v ille , dont celle-ci ne fut d’abord qne le faubourg : c’était
Séleucie, dont l’accroissement, sous les Grecs, fut si considérable,
que Babylone en souffrit. Séleucie devint la première ville de la
Contrée , et la résidence des rois ; elle était à dix-huit lieues au
nprd-nord-est de Babylone. Nous n’avons pas visité ses ruines ;
parce que nous ne pûmes traverser le fleuve faute de bateaux; mais
plusieurs Arabes, qui connaissaient bien ces lieux, nous dirent que
l ’on y voit encore les traces d’une très-grande ville : il y a , comme
à Ctésiphon, beaucoup de ruines, beaucoup de décombres : les: remparts
sont encore très-apparens, et bâtis en briques durcies au
soleil. Cès deux lieux sont désignés , par les Arabes, sous le nom
d’el-M édain ou les D e u x V ille s .
Il nous reste à jeter un Coup-d’oeil sur cette Babylone, qui fut un
moment peut-être la première ville dù Mondé, qui fut du moins
la plus fameuse ; de cette Babylone , la terreur des Israélites ; le
fléau des Tyriens, et qui finit par être la proie des Perses et des
GreCs. Le sol sur lequel elle fut assise, à vingt lièues au sud de
Bagdad, ne présente, au premier aspect, aucune trace dé ville : il
faut le parcourir en entier pour remarquer quelques buttes , quelques
légères élévations, pour voir que la terre a été presque partout
remuée. L à , des Arabes sont occupés, depuis plus dè douze siècles1)
à fouiller la terre et retirer les briques dont ils ont bâti en grande
partie Cufa, Bagdad, Mesched-Ali, Mesched-Hossein, He llé , et
presque toutes les villes qui se trouvent dans ces centrées. Mais cè
qui a contribué, autant que ces fouilles, à faire disparaître la presL
que totalité des ruines de Babylone , c’est que, bâtie sur un terrain
u n i, terreux, totalement privé de pierres , et dans une contrée où
le bois a toujours été rare , les habitans furent obligés d’avoir recours
à la terre que les fleuves ont déposée. Ils en formèrent des
briques qu’ils firent durcir au soleil, et qu’ils lièrent avec le roseau
qu’ils' avaient sous la main. C ’est par la même raison qu’ils employèrent
communément, dans là construction des édifices en briques
cuites , le bitume au lieu de chaux. On sent qu’un édifice
bâti avec des briques qui n’étaient pas cuites , a dû , lorsqu’il
a été détruit, ne laisser que de faibles traces de son existence -
les débris ont dû se confondre bientôt avec la terre environnante.
Cependant., malgré le tems et les Arabes , malgré le peu de
solidité des matériaux qui y furent employés, on découvre encore
quelques restes de très-grands édifices. On voit des murs très-épais,
que les Arabes démolissent jusqu’à leurs fondemens ; ils sont en
triques cuites. Mais ce qu’il y a de plus remarquable, ce qui paraît
être les restes du temple de Bélus , que Sémiramis fit b â tir , c’est
un monticule assez étendu, formé de terre à sa superficie, dans
lequel les Arabes retirent de grandes, briques cuites, et liées les
unes aux autres par le même bitume dont nous avons parle. Il y
a entre chaque couche de briques, un mince lit de roseaux et de
bitume. On a découvert dans ce monticule, dont la forme paraît
carrée, et dont le pourtour est de onze à douze cents pas ordinaires
, on a trou v é, dis-je , diverses cavités , mais qui n’ont
pas été assez déblayées pour les suivre dans toute leur étendue
et pour en deviner l’usage. Ce monticule est à une lieue au
nord de Hellé , à un quart de lieue de la rive orientale de l ’Eu-
phrate.
Le temple de Bélus, selon Hérodote, était carré , et avait deux
stades en tout sens : on y voyait au milieu une tour massive d’une
stade ; sur cette tour s’en élevait une autre ; sur celle-ci une troisième,
et ainsi de suite , jusqu’à huit. Daprès Ce rapport d’H éro-
dote, on est porté à croire que c’est ce temple et l’élévation prodigieuse
de ses tours qui ont donné lieu à la fable de la Confusion
des langues, dont le sens moral n’échappe pas à celui qui apprécie
les choses à leur juste valeur.
Entre ce monticule et le fleuve il y a beaucoup de décombres,
-beaucoup de fondemens de vieux murs. C’est là où l’on trouve
ordinairement les grandes briques sur lesquelles sont tracés des
caractères inconnus. J’en ai rapporté une bien différente des antres
: elle n’a que deux pouces et demi de long et deux pouces de
large'; elle èst convexe d’un côté et plate de l ’autre : sa plus grande
épaisseur est d’un pouce. On y voit sept rangées de lettres , avec
une interruption eiitre la troisième et la quatrième rangée. Ces