V O Y A G E EN S Y R I E , etc.
manière positive, que Santorin en contenait de la meilleure qualité
, et surtout lorsqu’ils nous virent disposés à faire remplir, sous
Apanoméria , une vingtaine de sacs,pour les envoyer à Constanti-
nople, les primats s’assemblèrènt afin d’aviser aux moyens d’écarter
le coup qui semblait les menacer. Le résultat de leur délibération
fut de nous offrir de l ’argent si nous voulions écrire à la Porte que'
leur île ne contenait pas de pouzzolane, ou qu’elle en contenait de
mauvaise qualité; Leur offre était accompagnée du tableau des
vexations et de tous les malheurs auxquels ils allaient être exposés
ai la Porte envoyait chez eux des T u r c s , ou faisait exploiter cette-
substance par les habitans.
Nous rejetâmes l’offre des primats,, et nous les assurâmes que la
connaissance que nous avions du despotisme turc nous avait fait
prendre , avant to u t, les précautions que l ’humanité avait pu nous
suggérer. Les ministres nous avaient bien, promis que l’extraction
des pouzzolanes;ne serait faite que par des Grecs étrangers à l ’île ,
et payés k un prix raisonnable : les habitans devaient rester les
maîtres de cultiver leurs champs,.ou de travailler, pour le gouvernement:,.
qui les paierait. Cette promesse- avait été pareillement
faite : a l’envoyé de la-République, de sorte qu’on n’avaàt point à
craindre à Santorin la présence des Turcs,, ni tous les malheurs
dont-; on. venait de mettre le tableau sous nos; yeux.
Les? primats ne furent point rassurés, par ces promesses ; ils insistèrent
auprès de nous pendant quelques; jours., et enfin, voyant
que leurs; offres ne pouvaient nous, tenter, ils députèrent deux
d’entre eux à Çonstantinople.
Nous apprîmes, dans la suite, que ces députés:avaient été plus-
heureux auprès des personnes qui avaient une influence directe'
dans les entreprises qu’on avait projetées. On équipa, à la. hâte h u it
navires pour l’Italie , avec ordre d’acheter et de charger la pouzzolane
dont on avait besoin , et il ne fut plus question dès-lors de
celle de Santorin.
. Il ne fu t plus question non plus de; l ’indemnité qu’on nous avait
promise ,, quoique le cit. Verninac en. eût fa it faire plusieurs fois'
la demande par le premier drogman.de la légation. Nous devons
ajouter cependant que, deux ans après, à notre retour de la Perse,
nous fîmes rappfilerrà la P o rte , par l ’organe du cit. Carra-Saint-
C yr , et sa promesse; et service que nous lui avions rendu , service
dont il dépendait d’elle de tirer parti. Nous eûmes bien de M
peine à obtenir une réponse. Le-reys-effendi nous fit parvenir enfin
une lettre pour le ministre des relations extérieures, et pour nous.
bu présent de deux mille piastres. La lettre rendait Un bon témoignage
de notre conduite pendant notre séjour dans l ’Empire otho-
man. Quant au présent, nous fûmes sur le point de le -refuser : il
n’était point proportionné à nos peines, à nos dépenses., à l ’impor-
tance de la découverte, au sacrifice qu’on avait exigé de nous, et
surtout aux promesses qu’on nous avait faites .; mais nous réfléchîmes
qu’ün gouvernement si peu Susceptible de procédés honnêtes
ne sentirait pas le motif de notre refus, l’ignorerait même, et que
cet argent pourrait bien ne pas retourner à sa source.
■Dès que nous eûmes terminé nos observations âSarttorin, le vent
passa à l ’est. N ous en profitâmes pour aller mouiller au port deNio,
quoique le ciel fût brumeux et la mer très-agitée. L ’intention du
capitaine fut de- s’élever de plusieurs lieues , afin de pouvoir se
rendre avec facilité à Rhodes au retour .du vent de nord ou de
nord-est. Effectivement, le vent ayant passé de nouveau dans
cette partie, nous fîmes voile de Nio le 3 vendémiaire an 4 , et
nous arrivâmes le lendemain à Rhodes. Nous débarquâmes le
chiaoux, qui retourna à Çonstantinople avec la pouzzolane que
nous avions promise.
Depuis notre départ de Çonstantinople,, le vent avait été presque
toujours au nord et au nord-est ; le ciel avait été nébuleux par
intervalles., e t nous avions eu un pen de pluie à Santorin. Les chaleurs
de Tété avaient cessé pour ainsi dire subitement; et quoique
le soleil fût encore assez fort lorsqu’il se montrait , néanmoins on
pouvait -fort bien lé supporter. Le thermomètre de Réaumur ne
s’était pas élevé à bord, ou dans.une chambre dont les fenêtre®
étaient ouvertes.; à plus de 18 degrés : il était même descendu jus-;
qu’à 14 et i 5 degrés pendant le jour. Mais après notre arrivée à
Rhodes , le vent ayant passé à l ’ouest .; e t cette île d’ailleurs «étant;