faire mourir pour obtenir leur pourpre ; aussi cette couleur ëtaitelle
excessivement chère , et réservée d’abord aux rois de Perse,
ensuite aux empereurs romains, aux sénateurs, aux plus riches
particuliers.
Pour obtenir cette couleur, les Tyriens opéraient de deux manières
différentes : ou ils ôtaient à chaque coquille le réservoir
à liqueur, en ouvrant l ’animal depuis la tête jusqu’au milieu du
corps, et c’était le moyen d’obtenir la couleur plus pure et plus
belle ; ou ils écrasaient un grand nombre de coquilles à la fois, dans
un très-grand mortier. En procédant ainsi, ils épargnaient la main-
d’oeuvre; mais la liqueur se trouvant mêlée avec la chair et les humeurs
de l ’animal, la pourpre qui en résultait, était un peu moins
belle et'un peu moins vive que l ’autre. Il paraît que c’était pour
la débarrasser de ces parties étrangères qu’on faisait bouillir pendant
dix jou r s , dans des chaudières d’étain, le mélange étendu
d’e a u , et qu’on y ajoutait une assez grande quantité de-sel. Au
reste, ces procédés ne nous sont que très-imparfaitement connus ;
et depuis qu’on a trouvé dans la cochenille une couleur aussi belle,
aussi durable-, et infiniment moins chère que la pourpre tyrienne,
la recherche de celle-ci ne peut désormais intéresser que les savans
et les curieux.
.La Syrie aujourd’hui manque de ports , parce que le rivage de
la mer est trop peu sinueux, parce que les montagnes , presque
toutes parallèles à la cô te, sont trop brusquement élevées. En
e ffe t, depuis l’embouchure de l’Oronte jusqu’à Gaze , on ne voit
que quelques rades peu profondes, peu sûres, et quelques petits
bassins que l ’art produisit ou améliora, mais que le tems a comblés.
Celui de Latakie , le plus grand de tous , ne reçoit plus
aujourd’hui qu’un très-petit nombre de navires de médiocre grandeur
: il faudrait le creuser et l ’entretenir pour qu’il pût suffire
au commerce de la ville et des environs. Le port d’Aradus , construit
à l’embouchure de l’Éleuthère., a disparu depuis long-tems.
Oh ne voit aucune trace de celui d’Orthosie. T r ip o li, JBarut et
Acre n’ont que des rades où il est dangereuxde mouiller en hiver,
parce qu’elles sont .exposées aux vents d’ouest et de n o rd , trèsimpétueux
sur la côte dans cette saison. Avec une dépense exorbitante
et des travaux considérables, on aurait de la peine à y créer
des ports d’une certaine étendue.
Le golfe d’Alexandrette , situé à la partie la plus septentrionale
de la- Syrie , offre un bon mouillage ; mais outre qu’on y éprouve
des coups de vents subits qui souffleht des montagnes voisines,
et qui obligent quelquefois à mettre promptement à la v o ile , les
exhalaisons pestilentielles qui s’élèvent d’un sol bas, marécageux,
s’opposeront encore long-tems à ce que Alexandrette occupe- le
rang que son heureuse position lui promettait.
£ T y r est le seul endroit, en S y rie , où la Nature ait esquissé un
port capable de contenir en même tems une grande marine marchande
et une grande marine militaire. Deux rangées dé rochers,
parallèles à la cô te , et qui partent des deux extrémités avancées
de la presqu’île , l’une au n o rd , l’autre au sud, permettraient de
construire , avec peu de dépense, deux jetées qui formeraient deux
vastes p o rts , un peu moins grands , mais aussi sûrs que ceux
d’A lexandrie d’Égypte. Il faudrait peut - être prolonger à. l ’est la
jetée de la grande rade afin de rétrécir son ouverture, trop exposée
à la tramontane. On ouvrirait, entre ces deux p o r ts , un
canal de- communication , afin qu’un vaisseau de la plus grande
force pût aller de l ’uh à l ’autre , et faire voile vers le nord ou le
su d , suivant que le vent soufflerait de l’un de, ces deux points.
On sortirait de même avec lè vent d’ouest ou le vent traversier,
le plus fréquent de tous. De sorte qu’au moyen de ce canal , qu’il
serait très-aisé de creuser vers le milieu de l ’isthmé, aucun vent nq
pourrait retenir un vaisseau lorsqu’on aurait jugé convenable de
mettre à la voilfe. Tous les établissemens militaires pourraient être
sur l’île. La ville se développerait le long du rivage sur l ’un et
l’autre pb r t, et s’étendrait jusqu'aux environs du monticule isolé,
arrondi, sur lequel nous croyons que l’ancierme T y r fut bâtie, et
qui semble placé là pour sa défense.
La rade du sud est moins profonde , moins fréquentée que celle
du nord : elle offre néanmoins, comme l ’autre', un asyle assez sûr
aux vaisseaux qui s’y réfugient. En sondant ces deux rades, on