deux extrémités : il présente, du côté de l’est, une fêlure assez considérable,
à l’endroit par où il pose sur sa base. L ’inscription qu’il
y avait sur la face occidentale est si effacée, qu’il est impossible
d ’y lire un seul mot, et même d’en distinguer les lettres.
Ce superbe monument était autrefois dans l ’enceinte d’Alexandrie
: il se trouve aujourd’hui à quatre ou cinq cents toises de l’enceinte
arabe, du côté du sud. Comme il est placé sur le sol le plus
élevé de l’ancienne v ille , rien ne le domine et n’en dérobe la vue :
il sert de reconnaissance aux marins; et lorsqu’on arrive par mer,
quoiqu’il se trouve à plus d’un mille au-delà dé la ville moderne,
les minarets des mosquées paraissent grêles et écrasés, tant il s’élève
au dessus d’eux.
Une observation peu importante sans doute, mais que nous ne
croyons pas devoir ojnettre, c ’est que le terrain sur lequel cette colonne
a été élevée, est plus bas d’environ quatre pieds et demi que
la base du piédestal ; ce qui suppose qu’il y avait cinq à six marches
tout autour, ou que les vents et les pluies ont peu à peu entraîné
les terres de ce sol élevé.
Les A ra b e s , soupçonnant des trésors sous un monument qui
excite la curiosité des voyageurs, n ’ont pas manqué de faire des
efforts pour se les approprier : ils ont découvert une grande partie
de la face occidentale du piédestal, et ont pénétré aussi avant qu’ils
ont pu. Mais quel dut être leur étonnement quand ils s’apperçurent
que leur avidité semblait avoir été prévue par l ’obstacle invincible
que l’habile architecte y avait opposé ? Cette colonne, d’un poids
énorme, pose sur un bloc de poudingue siliceux, grisâtre, de la
plus grande dureté, qui n’a pas plus du tiers de la largeur du piédestal
, de sorte que toutes les pierres qui l ’entourent, ne semblent
lui servir que de revêtement, et ne concourir en rien à son afïer-
missement.
Quand on examine avec attention le piédestal, ces pierres formées
de gros quartiers de marbre blanc, sur lesquelles on apper-
çoit des hiéroglyphes ; ces blocs de granit rose, semblables à des
tronçons de grosses colonnes, mal rapprochés les uns des autres,
inclinés en divers sens, l ’un d’eux cassé , ' et présentant un des
morceaux plus élevé que l ’autre de quelques pouces, on est porté
à croire que ce piédestal a été démoli en grande partie par les
Arabes, ensuite reconstruit avec les mêmes matériaux, de la manière
que nous le voyons aujourd’hui ; car pourrait-on se persuader
que le même génie qui a présidé à la cou pe, au transport
et à l’érection de ce monument, eût négligé de surveiller cette partie
essentielle de l ’ouvrage, qui devait-concourir à en assurer la durée
, et contribuer si puissamment à le transmettre à la postérité
la plus reculée ?
Quoi qu’il en soit, il n’est pas moins certain que la colonne n ’est
soutenue que par le bloc de poudingue siliceux qui occupe le centre,
et qui n’a guère plus de la moitié de son diamètre (1). Ce bloc-
présente des hiéroglyphes sur la face que l ’on a découverte. Des
voyageurs ont remarqué, avant nous, que ces caractères sont renversés
, et que par conséquent ce bloc avait appartenu à quelque
monument plus ancien.
Après avoir payé à la colonne son tribut d’admiration, le voyageur
ne manque pas de visiter les catacombes qui se trouvent à
peu de distance de là , dans la partie du sud-ouest, tout près du
Kalidje. Quoiqu’elles ne soient pas si spacieuses que celles que nous
avons vues, dans la suite, elles méritent cependant l’attention des
curieux. Pour en avoir une idée exacte, il faut se représenter un
escalier creusé dans un tu f calcaire, sabloneux, tendre; des chambres
carrées et voûtées, qui communiquent les unes aux autres,
et qui sont taillées dans le tu f; ensuite quatre ou cinq rangées latérales
de lo g e s , où l’on plaçait les bières de sycomore, contenant
les corps embaumés. Ces loges ont ordinairement près de deux pieds
en carré, et six ou sept de profondeur. On en voit sur le nombre
qui ont une dimension double de celle des autres, et quelques-unes,
percées dans leur fon d , qui conduisent à de nouvelles chambres
moins spacieuses, dans lesquelles il n’y a point de loges. Les affais-
semens qui ont eu lie u , et surtout les sables et les terres que les
(1) Environ cinq pieds.