V O Y A G E EN S Y R I E , etc.
puits à roue : il porte une inscription grecque, qui s’étend sur cinq
de ses faces. Quoique les caractères en fussent beaux et bien conservés,
nous ne pûmes les lire , parce que le pilier, placéde bas en
h aut, était caché en partie par un second soutien en moëlons, et
par la terre qu’on y avait amoncelée. Nous convînmes avec le jardinier,
que, moyennant quelques piastres, il retirerait le pilier de
sa pla ce , et le redresserait pour qu’il nous fût commode, le lendemain,
d’en copier l ’inscription. Nous y retournâmes en effet, munis
d encre et de papier •; mais le pilier était resté' à la même place.
Nous apprîmes que le propriétaire s’était formellement opposé à
l ’exécution du traité fait avec son jardinier. « Qui sa it, avait-il
» d i t , si ces Chrétiens, dont les connaissances leur viennent du
» diable, ne trouveront pas dans cette écriture l ’indication de quel-
» que trésor caché dans mon champ, qu’ils ne manqueront pas de
» m’enlever furtivement ? Qui sait s’ils ne feront pas quelques ma-.
» léfices qui porteront préjudice à mes planteset à mes fruits? »Plus
nous insistâmes, plus nous offrîmes d’argent, et plus le propriétaire
se méfia de nous ; de sorte qu’il fallut-y renoncer, non sans
peine; car cette inscription, qui date probablement des SéleucideS,
est la seule qu’on trouve à Latakie.
A l ’est de la ville on remarque un édifice antique, en grandes
pierres de ta ille , ressemblant à un aro de triomphe : sa forme est
carrée. On voit à chaque face une frise d ’un bon genre, ornée de
casques, de gardes d’épée, de boucliers. Deux de ses faces sont un
peu plus ornées que les deux autres. Le dessus est en terrasse : on
y montait autrefois par un escalier dont on voit l es restes à l’un
des angles.
A un demi-quart de lieue de la ville moderne et à l’extrémité
orientale de l ’ancienne, s ’élève un coteau Sur lequel était probablement
placée la citadelle de Laodicée ; car on voit de vieux murs
treS-épais : on y remarque des traces de vieilles tours. On voit
aussi, au bas du coteau, des restes de l’ancien aqueduc qui amenait
■de plus de deux lieues, à la ville, une partie de l ’eau de la rivière
dont nous avons déjà parlé.
En allant vers le rivage de la mer, au nord du port, on rencontré
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des catacombes creusées dans une roche calcaire assez dure. Leur
ouverture est à fleur de terre, et l’on y descend par une pente in sensible,
ou par un escalier assez bien eonservé. Elles consistent en-
une ou plusieurs chambres carrées, présentant, sur trois faces,
plusieurs rangs de loges ou-de sarcophages, tels à peu près que
ceux de Milo. Nous ne poussâmes pas notre examen bien loin à
l'égard de ces.catacombes, parce qu’en entrant dans la troisième
nous apperçûmes , au bas de l ’escalier, une femme étendue par
terre et couverte de ses vêtemens. L ’odeur cadavéreuse qui commençait
à se faire sentir, nous fit juger qu’elle était morte depuis
plusieurs jours. Nous appelâmes aussitôt le janissaire qui nous avait
accompagné : ii nous fit remarquer les traces du sang que cette
femme avait répandu, et les blessures qui l’avaient réduite dans cet
état.
. Nous apprîmes quelques jours après qu’un galiondgi, ayant attiré
cette infortunée dans ces lieux sombres et écartés, avait pris la
résolution de l ’assassiner, à la vue des sequins. et autres bijoux
qu’elle portait. Le gouverneur avait eu connaissance de ce crime ;
mais soit que l ’assassin fû t protégé, soit qu’il eût oédé son butin au
gouverneur, ainsi que le bruit en courait, il n’avait point été poursuivi
, scmsprétexte qu’un marin u tile, un bon Musulman , nedevais
point périr pour avoir assassiné une femme de mauvaise vie.
Nous étant approchés de la ruer, nous remarquâmes une grande
quantité de carrés longs et étroits, qui furent, selon les apparences,
autant de sépultures particulières. Nous en vîmes, quelques
autres trois fois aussi larges.,;qui s’avançaieot som? le rocher, destinés
probablement à recevoir le corps :de plusieurs personnes; et
sur le rivage même, dans des endroits entièrement submergés lorsque
la mer est orageuse, nous observâmes, sur une assez grande
étendue, des encaissemens carrés ou des espèces de Chambres taillées
dans le rocher , que l’on, supposerait avoir été des habitations.
) - .
D'après c© que nous: venons de dire , on. conviendra que Latakie
mérite de fixer l’attention des antiquaires 1 : elle mérite aussi le#
recherches dés naturalistes, sous les rapports; de la botanique «S de