les boeufs qui font tourner ces roues, et il paie les homnies nécessaires
à cette opération ; et si la crûe du Nil n’était pas suffisante
pour permettre à l ’eau d’entrer dans les canaux qui aboutissent à
l ’intérieUr de la ville arabe , il serait obligé de la faire transporter
par des chameaux, et d’en remplir les citernes sons peine de perdre
la vie. Pour recevoir cet argent , il doit se faire délivrer une attestation
au mékemé, signée du cadi , des commandans, des, gens de
loi et des principaux habitans. On assure qu'il, y a près de cent ans,
la crûe du'Nil n ’étant pas suffisante, le bey de la Bahiréh lut obligé
d’employer trois mille chameaux pour le, transport d e -l’eau du
Kalidje aux citernes. Les habitans de la ville n’ayant pas été satisfaits
de la quantité d’eau qui leur avait été fournie de cette manière,
lui refusèrent l’attestation dont i l ayait besoin, et le commandant
du Caire lui lit trancher la tête.
• Si l’on va de la porte de Rosette directement auSud, après trois
quarts, d’heure de marche sur un sol uni, on arrive au Kalidje, en
suivant les petits canaux souterrains, destinés à distribuer annuellement
à la ville les eaux du fleuve. On apperçoit sur le mur intérieur
du Kalidje les ouvertures de ces canaux, placées les unes au
dessus des autres ; on doit les ouvrir successivement, à mesure
que le niveau des eaux s’élève ; mais il est probable que, les canaux
inférieurs sont obstrués aujourd’hui ou n’aboutissent plus à l’enceinte
arabe, puisque les citernes de la ville ne pourraient être
remplies, s i l ’eau ne parvenait aux ouvertures supérieures.
•'•Quelques familles d’A rabes bédoins sont campées aux environs
du Kalidje pour la culture des, terres : elles, y passent ordinairement
toute l’année, quoiqu’elles,n’aient plus rien à faire depuis la récolte
des grains , qui a heu en germinal et en floréal, jusqu’à , l ’époque
de la plus grande crue du Nil. Les terres sont si sèches pendant
l’été, qu’elles ne; permettent aucune sorte de,culture. Il n’est pas
douteux cependant-que si ces Arabes, pouvaient arroser leurs champs
dans cette saison., ils ne fissent des récoltes très-productives en
fru its, en melpnsr et en diverses plantes potagères. Les endroits
les plus élevés, ceux qui ne peuvent être arrosés, sont plantés de
dattiers , et semés en blé et en orge. Le terrain le pins bas, situé
entre le Kalidje et le lac Maréotis, fournit du blé , de l’orge, des
fèves, des pois, du trèfle et quelques plantes potagères. Vers le lac
il y a des prairies naturelles, d’où on retire un fourrage abondant
au commencement de floréal.
Le lac Maréotis occupe en hiver une étendue assez considérable :
ses eaux sont saumâtres, quoiqu’elles ne communiquent pas directement
avec celles de la mer. Il est si peu profond, que les Arabes
des villages situés à l’occident et an midi le traversent sans avoir
de l’eau jusqu’aux genoux. Il est vrai qu’ils ont l’attention de tracer
leur route pour ne point s’égarer, ou pour ne pas s’enfoncer dans
les endroits où le terrain se trouve un ,peu trop mou. Dès la fin
de floréal les eaux disparaissent, et il reste à sec pendant l’été. Les
Arabes y viennent alors ramasser un sel marin assez abondant,
moins salé et moins âcre que le sel ordinaire.
Ce lac n’a pas été creusé à mains d’homme, ainsi que l’a dit
Maillet, puisque tout le sol environnant est uni et bas, dans une
étendue très-considérable. Nous aurions désiré savoir s’il est au
dessus ou au dessous du niveau de la mer ; mais nous manquions
d’instruniens propres à cette opération, et les Européens d’ailleurs
ne sauraient être trop circonspects dans un pays où le peuple profite
volontiers du moindre prétexte pour se soulever contre eu x ,
et en exiger de l ’argent (1).
Les Européens établis à Alexandrie chassent assez souvent autour
de ce lac , en prenant la précaution de;se faire accompagner
de quelque Arabe bédoin établi aux environs. Les diverses espèces
de bécassines sont si communes dans les prairies où l ’eau séjourne,
qu’on peut tiçer plus de cent coups de fusil dans une matinée. En
suivant le Kalidje on peut tuer des canards, des sarcelles, des va-
neaux , des pluviers, des courlis : on trouve des tourterelles et des
coucous sur les dattiers. On chasse aux grives pendant l ’hiver dans
( j) Les Anglais ayant coupé dernièrement la chaussée sur laquelle posait le canal
d’Alexandrie , les eaux de la mer se sont-portées-dans ce la c , et l ’ont élevé de quelques
pieds ; ce qui prouve qu’il est au dessous du niveau de la mer.