mékias ou nilomètrè. Le bâtiment qui le contient, n’a rien de remarquable
: il consiste en un édilice carré, d’une vingtaine de pieds
de largeur, au milieu duquel on. voit une colonne octogone, ou
sont marquées les coudées qui indiquent la hauteur des eaux lors
•des inondations. Ces coudées sont divisées en vingt-quatre parties,
et on assure que la colonne l’est en vingt-quatre coudées.
On ne pouvait en compter que onze et demie au dessus du niveau
des eaux quand nous l ’avons vue : il en restait donc douze et demie
au dessous de ce même niveau. Cet édifice, au reste, est très-mesquin
et fort mal entretenu.
La mosquée, qui est adossée à sa face occidentale, est extrêmement
dégradée : elle est spacieuse, de forme carrée, découverte au
milieu, et ornée d’un assez grand nombre de colonnes d’une petite
proportion. Les salles qui se trouvent à l’est du mékias sont éga-
lémerit dégradées : on les regarde comme les restes du palais et de
la forteresse que E l-M é lik el-Saleh fit bâtir pendant son règn e ,
depuis 637, jusqu’en 647 de l ’hégire. Cette position est effectivement
là plus favorable des environs du Caire pour un palais, et
la plus susceptible d’être ornée et embellie.
L ’allée de sycomores, qui se prolonge depuis le mékias jusqu’au
milieu de l’île , n’est composée aujourd’hui que d’un seul rang d’arbres
, dont pas un n ’est bien aligné ni également espacé : elle n’est
remarquable que par l’ombrage qu’elle procure, et par la-croissance
que ces arbres Ont prise, quoiqu’ils aient, à ce qu’on assure, moins
de cinquante ans (1). Cette allée présente aussi un fait assez curieux.
Quelques-uns de ces arbres étant fort rapprochés les uns des autres,
leurs branches se sont croisées : le frottement a entamé en plusieurs
endroits leur écorce, et il en est résulté une réunion des deux
branches par une sorte de greffe naturelle ; ce qui n’arrive guère
que sur des arbres dont le bois est mou et le suc abondant.
Mourad-bey, à qui on avait conseillé d’avoir une marine fo r midable
au Caire, tant pour effrayer les Mameluks que pour se
(1) Le cit. Grobert ne leur donnait que vingt-huit ans en l’an 9 ; ee qui noue
parait peu vraisemblable.
rassurer lui-même, et se procurer, en cas d’événement, une retraite
inaccessible aux autres, avait fait abattre un grand nombre
de ces arbres, et en avait fait construire une frégate percée pour
quarante canons, quoiqu’elle ne fût pas capable d’en porter vingt.
C’est ainsi que, pour se prçcurer un épouvantail, cet ignorant
Circassien avait dégradé le seul endroit de promenade qui fût aux
environs du Caire ; car , si l’on excepte quelques jardins plantés
en palmiers, orangers, abricotiers, cassiers, acacias, que l ’on voit
dans cette île et à la partie occidentale du Caire, tout le reste est
n u , sec, poudreux et désert.