4*4 V O Y A G E E N S Y R I E , etc.
II ne pleut jamais dans cette partie de la Mésopotamie, depuis
floréal jusqu’en brumaire, et très - rarement pendant les autres
mois de l’année ; ce qui lait qu’on n’y peut cultiver que les terres
arrosées par l’eau des fleuves : mais les habitans de ces contrées,
plus prévoyans et plus industrieux sans doute que les Égyptiens,
ont été bien moins exposés à des famines que ces derniers,'parce
que, ne éomptant jamais sur les inondations pour ensemencer leurs
champs, tâchant même de les en garantir, ils étaient parvenus à
les arroser toutes les fois qu’ils en avaient besoin.
Il y a lieu d’être surpris que, avec tous les moyens que les Égyptiens
avaient lorsque tout le pays qu’ils occupaient, était coupé
par des canaux; lorsqu’ils pouvaient répandre sur leurs terres les
eaux du Nil par des moyens mécaniques, et les y laisser séjourner
si la crue n’était pas assez forte ; lorsqu’ils pouvaient de même faciliter
l’écoulement des eaux si le fleuve s’élevait un peu trop, il est
surprenant, dis-je, qu’ils aient pu être exposés à mourir de faim
dans les deux extrêmes de la crue du fleuve. Lorsqu’on y réfléchit,
on doit avoir une idée bien désavantageuse de leurs connaissances
hydrauliques et agricoles, ainsi que de leur gouvernement; qui
n ’avait jamais su éclairer le peuple sur ses intérêts, ni prévenir les
famines par des achats de grains chez les nations voisines.
Les Babyloniens étaient exposés aux mêmes fléaux que les Égyptiens.
Les vents de sud-, à la vérité , sont moins pernicieux en
Arabie qu’en É g yp te , parce qu’ils n ’ont point à parcourir une étendue
déterre aussi grande et aussi embrâsée que celle de l’A frique;
mais ils sont néanmoins très-nuisibles à la plupart des végétaux,
en ce qu ils hâtent leur maturité, et qu’ils dessèchent considérablement
la terre : ils agissent peut-être aussi sur eux à peu près de
la même manière qu’ils agissent sur nous, en rendant 1 air atmosphérique
moins propre à la respiration.
' A l'a suite de ces vents ori voit arriver, de 1 intérieur de 1 Arabie
et des contrées les plus méridionales de la Perse, des nuées de sauterelles
dont le rav ag e, pour ces contrées, est aussi fâcheux et presque
aussi prompt que celui de la plus forte grêle en Europe ; nous
en avons été deux fois le6 témoins. Il est difficile d exprimer 1 effet
que
que produisit sur nous la, vue de toute l’atmosphère , remplie de
tous les côtés, et à une très-grande hauteur, d’une innombrable
quantité de ces insectes, dont le vol était lent et uniforme, dont
le bruit ressemblait à celui de la pluie. Le ciel en était obscurci, et
la lumière du soleil considérablement'affaiblie. Dans un moment
lès terrasses des maisons, les rues et tous les.champs furent couverts
de ces insectes , e t , dans deux jou r s , ils avaient presque entièrement
dévoré toutes les feuilles des plantes. Mais heureusement
ils vécurent peu, et ne semblèrent avoir émigré que pour se reproduire
et mourir. En effet, presque, tous ceux que nous vîmes le
lendemain étaient accouplés , et les jours suivans tous les champs
étaient couverts de leurs cadavres (î).
A là suite de ces sauterelles on. voit toujours arriver le samar-
mar ou samarmog (2), connu des naturalistes sous le nom de merle-
rose. L ’hiver il habite, l’Indoustan, l ’intérieur.. de l ’Afrique et
( 1 ) AGridium peregrinum , thorace lineâ elevatd, segmentis tribus-) corpore Jlavo ,
alis h y a lin is , basi .margineque exteriori Jlavescèntibus.
Cet insecte n’est point une sauterelle mais un criqüet : nous l’avons nommé
Sauterelle pour'nous conformer an langage reen. Il diffère de toutes les espèces
designées jusqu?à présent Comme voyageuses. Tout son corps.est d’un beau jaune,
avec' les élytrea marquées de tacbes et de bandes obscures. Les ailes ont-leurs nervures
jaunes et obscures ; elles sont d’ailleurs transparentes, et ont une faible couleur
.jaune à leur base et au bord extérieur qui se perd insensiblement en s’avan-
çant vers le milieu de l’aile. Les jambes postérieures sont jaunes comme le reste du
corps, mais l’extrémité des épines, est d’un beau noiL Lé çorcelèt a une ligne au
milieü, moins élevée que dans lé criquet émigrant, ét trois lignés transversales
enfoncées,' indépendamment: de celle moins marquée qui se trouve près dm bord
antérieur. Les mandibules sont d’un jaune-gris. On voit une pointe conique,,perpendiculaire
assez marquée entre là base des premières pattes. Ce criquet a ordi-
nairement depuis deux pouces et demi jusqu’à jeu x pouces et trois quarts de la, tête
au bout des ailes. I l est quelquefois d’un rouge clair et pâle , au lieu d’être jaune.
J e l ’ ai trouvé en Egypte 7 en Arabie y en Mésopotamie et en Perse.
- (2)'Merle-Rose. BufFon, pl. enlum. 2.51 . > . v J
. Turdus roseus. Linn. Syst. nat. ’
Latliam ind. omithol.
Turdus seleucis. Forsk. Descript. anim.
Tome I I . H h h